Jan. 2022

Les damnés

APPARITIONS DE DAMNÉS - Extraits
Abbé Chatel 1922
Le temps des ennemis de la foi est annoncé par des épidémies, maladies inconnues dont les ravages seront affreux : il fallait que ce temps vint pour eux qu’il y eut sur terre un règne infernal sur la terre avant le règne divin.
Jahenn
y (stigmatisée bretonne) révèle aussi qu'il y aura un grand nombre d’âmes possédées obsédées par l’esprit infernal. Pour exorciser ces âmes, il faudra de nombreuses pénitences et de mortifications aux pères de l’Église que le ciel soumettra à cette dure épreuve. Quand la prière de l’Église ordonnera à l’infernal de sortir, qu’on soit revêtu de la croix qui est l’arme invincible qui le terrasse et lui impose sa rentrée aux enfers. Depuis peu, ces cas d’obsessions et de possessions démoniaques se multiplient dans des proportions insoupçonnées.
Le chef des milices célestes à Jahenny :
Voici mon épée flamboyante, je veux en faire part aux amis du sacré-coeur et leur offrir cette épée pour le combat, car l’heure n’est pas éloignée où vous tous, peuple fidèle, il faudra prendre les armes de la foi et du courage pour lutter contre l’acharnement de l’enfer à la vengeance des hommes.
(
28-sept-1880, réf).

Notre-seigneur a dit : Personne ne se perdra sans le savoir.

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Je suis damné pour une éternité

Le bienheureux Pierre de Jérémie naquit à Palerme l’an 1381 de parents illustres de noblesse et piété. Sa mère lui fit sucer la dévotion avec le lait. À l’âge de dix-huit ans il se rendit à Bologne pour y étudier le droit. Ayant achevé son cours, il se prépara à recevoir le bonnet de docteur. Une nuit, il entendit soudain frapper rudement à la fenêtre de sa chambre. Une frayeur secrète le saisit, il ne pouvait croire à une simple attaque nocturne, sa chambre était au troisième étage. Pendant qu’il s’interroge sur la cause d’un tel bruit, les coups se renouvellent avec plus de force. Son sang se glace dans ses veines ; n’osant sortir du lit pour ouvrir la fenêtre, il demande en tremblant : Qui frappe ? Aussitôt une voix lugubre répond : Pierre, je suis untel votre parent. Après avoir pris le bonnet de docteur en droit, j’exerçai la charge d’avocat avec beaucoup de réputation. Malheureux que je fus, je me chargeai de causes très injustes pour m’acquérir de l’honneur et du bien aux dépens de ma conscience. Je me suis trouvé sans avocat devant le tribunal redoutable de Dieu et j’ai été condamné aux peines éternelles. Je suis damné, damné pour une éternité ! Dieu m’a envoyé vous donner cet avertissement : fuyez, fuyez les tribunaux des hommes si vous désirez être acquitté devant le tribunal de Dieu !
Effrayé, Pierre fit les plus sérieuses réflexions. Quoi, se dit-il, j’irais risquer mon âme et mon éternité pour des biens si fragiles, pour des honneurs imaginaires et pour des plaisirs passagers et trompeurs ? Il forma dès ce moment la résolution de se consacrer à Dieu et fit voeu de chasteté perpétuelle. Après avoir demandé à Dieu dans quel ordre religieux il devait entrer pour le servir toute sa vie en esprit et en vérité, il se sentit intérieurement appelé à l’Ordre des frères-prêcheurs. Il suivit cette inspiration, c’était en l’année 1400. Pierre de Jérémie ou de Palerme devint un grand prédicateur et théologien. Il mourut le 3 mars 1452.


Prince damné pour son impénitence

Pendant le feu des guerres dont la Péninsule fut le théâtre au 16è siècle entre les italiens, les français, les espagnols et les allemands, la bienheureuse dominicaine Catherine de Racconigi multipliait ses prières en faveur de la paix. Notre-seigneur lui apparut et lui dit : Je suis venu du ciel en terre pour y apporter les semences de la paix, mais les hommes les rejettent et provoquent mes châtiments par leur inconduite, leur orgueil et leur obstination. — Ô mon espérance, reprit l’humble fille, vous pourriez les convertir et les ramener à vous. — Ce que tu dis est vrai mais ce procédé ne convient pas à ma justice, et je respecte leur libre arbitre ; résistants à toutes mes avances, ils se rendent indignes de recevoir ma pleine miséricorde. Et pour que tu reconnaisses la vérité de ma parole, je veux que tu réprimandes de ma part tel prince et que tu lui annonces sa mort prochaine et sa damnation s’il ne se hâte pas de changer de vie. À l’instant même une main invisible la souleva et lui fit franchir avec la rapidité de l’éclair un espace de 160 000. Le prince se promenait seul dans une salle quand la bienheureuse parut devant lui. Au nom du sauveur Jésus, lui dit-elle, cessez je vous en prie d’entretenir le feu de la discorde et de la guerre dans la république chrétienne. En voyant une femme entrer tout à coup et lui parler de la sorte, le prince se troubla et crut avoir affaire à un esprit surnaturel. Ne serais-tu pas le diable venu pour me tenter ? lui dit-il. — Ni le diable, ni aucun esprit, mais une simple fille envoyée de Dieu pour vous avertir de votre perte éternelle si vous ne vous arrêtez sur le chemin où vous courez. Là-dessus elle disparut en le laissant rempli d’épouvante.
Loin de profiter de l’avertissement, le prince persévéra dans ses mauvaises dispositions et mourut im-pénitent. Il fut donné à la dominicaine d’être témoin des opérations de la justice divine sur ce damné. Transportée auprès de ce malheureux, elle le vit dans les tourments de l’enfer. Me reconnaissez-vous ? lui dit-elle. — Oui, tu es Catherine de Racconigi, c’est toi qui m’as annoncé ma mort prochaine et la damnation que je subis en punition de mon impénitence. — Infortuné, reprit-elle, si vous aviez fait ce que je vous disais au nom de Jésus Christ, vous seriez maintenant dans le royaume des élus !

Jeune fille damnée pour ses mauvaises confessions

Au Pérou, dans la mission d’Itatina de la Compagnie de Jésus, sous la prètrise de Samaniego, un fait inouï arriva qui fut connu de tous les habitants de la ville et certifié par tant de témoins qu’on ne peut douter de sa vérité. Chez une dame considérable, se trouvait une jeune fille de 16 ans qui avait été recueillie durant la guerre, qu’on avait nommée Catherine au saint baptême. Elle devenait plus déréglée à mesure qu’elle grandissait, malgré qu’elle fût souvent punie par sa maîtresse. Elle en vint à entretenir en secret un commerce criminel avec quelques jeunes libertins, cependant elle continuait d’aller à confesse en cachant ses péchés par honte. Tombée malade en août 1590, elle fit venir un prêtre jésuite pour se confesser mais elle le fit superficiellement. Le prêtre revint neuf fois la voir, elle dit alors devant les domestiques qu’elle avait été obligée de s’y résigner et ajouta des paroles inconvenantes qu'ils rapportèrent tout scandalisés à leur maîtresse. Celle-ci vint et gronda Catherine comme elle le méritait, puis prenant une expression plus douce, elle lui demanda avec bienveillance ce qu'elle avait cachée. Celle-ci raconta tout sans difficulté et ajouta que toutes les fois qu’elle avait appelé le confesseur, elle avait aperçu à sa gauche un nègre qui lui conseillait de ne pas dire ses péchés parce qu’ils n’avaient aucune importance, et que le prêtre la tiendrait pour une personne dissolue ; tandis que s. Marie-Madeleine se tenait à sa droite et l’encourageait à tout lui dire. Sa maîtresse fit venir le missionnaire pour lui raconter ce qui s’était passé. De son côté il fit ce qu’il put pour encourager Catherine à une pénitence parfaite mais tout fut inutile : plus il l’exhortait, plus elle se montrait rebelle, de sorte qu’elle ne voulait plus prononcer le nom de Jésus. On lui présenta un crucifix afin qu’en regardant elle se rappelle que notre-seigneur était mort pour elle, mais elle dit avec impatience : Je sais tout cela, que voulez-vous donc ? La dame lui répondit : Que tu t’adresses à notre-seigneur qui te pardonnera tes péchés si tu les confesses sincèrement. — Je vous en prie, dit Catherine, ne m’ennuyez plus de ces choses ! Sa maîtresse partie, elle se mit à chanter des chansons impudiques amoureuses, elle persévéra dans cet état plusieurs jours et plusieurs nuits, jusqu’à ce qu’une nuit elle fit venir près de son lit sa patronne et autres servantes et leur dit : J’éprouve de cruels remords. Depuis ce moment jusqu’à minuit tous ses membres devinrent raides, de sorte qu’on la crut morte et qu’on se préparait déjà à l’ensevelir. Elle revint cependant à elle et le prêtre, ayant été appelé de nouveau, elle persévéra dans son impénitence. Au bout de trois heures, ses compagnes l’ayant engagée à prendre le crucifix et le cierge des agonisants dans ses mains en invoquant le nom de Jésus, elle dit : Quel est ce Jésus ? Je ne le connais pas. Elle se cacha dans le fond de son lit où on l’entendit parler avec un personnage invisible. Une autre servante qui était malade au lit dans la même chambre pria sa maîtresse de la faire porter dans un autre chambre parce qu’elle voyait autour d’elle des fantômes noirs qui l’épouvantaient.
La nuit où mourut Catherine, toute la maison fut remplie d’une odeur si infecte qu’on fut obligé d’exposer le cadavre en plein air. Le frère de la patronne fut tiré de sa chambre par le bras, une domestique reçut sur ses épaules quelque chose semblait être de la chaux et en porta les marques plusieurs jours ; un cheval très tranquille auparavant devint furieux et se mit à frapper des pieds les murs de son écurie toute la nuit ; les chiens de leur côté ne firent qu’aboyer et courir. Quand le cadavre fut enterré, une de servantes entra dans la chambre où Catherine avait été malade et vit voler vers elle un vase placé en haut d'une planche, sans voir personne. Dans la ville et les environs on vit des tuiles et des ardoises lancées à plus de 2 000 pas dans un bruit épouvantable, quoiqu’il n’y en avait pas sur la maison qui était couverte de feuilles de palmier, comme les habitations du pays. En présence des autres, une domestique fut tirée par la jambe sans qu’on vît personne ; le 7 octobre une autre alla chercher un vêtement dans le vestiaire et vit Catherine se lever prendre un vase, comme elle se sauva épouvantée, le vase frappa derrière elle avec une telle force contre le mur qu’il se brisa en mille morceaux. Le lendemain une croix dessinée sur un papier attaché au mur de cette chambre fut arrachée en présence de tous et déchirée en trois morceaux. Ce même jour, alors que la maîtresse soupait dans le jardin, une moitié de tuile tomba sur la table et la renversa, un petit enfant de 4 ans qu’elle avait se mit à crier : Maman, maman, Catherine m’étrangle ! On ne put le délivrer qu’en lui attachant des reliques au cou. Tout cela contraignit cette dame à quitter sa maison et à se retirer chez une de ses parentes après avoir laissé quelques servantes pour la garder. Le 10 du même mois, comme l'une d'elles entrait dans la salle à manger, elle entendit Catherine l'appeler trois fois. L’épouvante la saisit et lui ôta toutes forces. Les autres ayant conseillé d’invoquer le secours de Dieu et de retourner avec un cierge à l'endroit où la voix avait appelée, elle se fit accompagnée de deux autres plus courageuses ; quand elles arrivèrent dans la salle elles entendirent Catherine dire à la première d’éloigner ses compagnes, de jeter ce cierge qui lui faisait mal et de rester seule. Le spectre était d'une puanteur incroyable et jetait des flammes par ses jointures, sa tête et ses pieds en feu. Comme châtiment de son libertinage, elle avait autour des reins une ceinture de flamme large de 8 à 10 doigts tombant jusqu’à terre. La servante trembla lorsqu’elle entendit le spectre dire : Approche-toi donc, je t’ai déjà appelée tant de fois ! Celle-ci lui répondit sans trop savoir ce qu’elle disait : Bon Jésus, comment ne pas être épouvantée en te voyant ? Comme elles parlaient ensemble, un bel enfant en blanc apparut à la servante, lui dit de prendre courage et de bien remarquer ce que Catherine dirait afin de le rapporter, et d’aller aussitôt à confesse pour se purifier de ses fautes. Et Catherine lui dit : Sache que je suis damnée, que je souffre horriblement pour n’avoir déclaré dans mes confessions que des fautes légères, m’accusant d’avoir trop parlé, d’être portée à la colère, tandis que je cachais mes plus graves péchés, particulièrement mes relations criminelles. Apprends par mon exemple à te confesser mieux que moi et ne rien cacher ; c’est Dieu qui m’ordonne de te donner cet avertissement pour que tu le rapportes aux autres. Quand on entendit sonner l’angelus, le spectre partit dans un coin et disparut. L’enfant dit à la servante de retourner vers les siens (famille) et elle le fit. Ce fait est rapporté par le jésuite François Benci (Lettres annuelles p. 762, Compagnie de Jésus 1590).

                                                                                                                                        

Je brûle à présent en enfer

Nous lisons dans la vie de B. Richard de Sainte-Anne qu'il arriva dans la ville de Bruxelles deux étudiants déréglés et scandaleux qui projetaient de se rendre avec d'autres dans une maison de débauche. Ils y passèrent une partie de la nuit et l’un dit : J’en ai assez, retournons. — Pas encore, répondit l’autre. Le premier quitta et retourna à son appartement. Sur le point de se coucher, il se souvient de l’hommage qu’il rendait à la s. Vierge chaque jour. Bien que plus disposé à dormir qu’à prier, il s’acquitta de sa dévotion tant bien que mal.

À peine couché, il entend frapper à la porte de sa chambre. Une deuxième, une troisième fois, il entend des coups, quand soudain porte close il voit entrer son confrère de débauche qu’il venait de quitter, il demeure muet à son aspect tant il est saisi d’étonnement. — Me reconnais-tu ? demande l’infortuné après un moment de silence. — En vérité à voir votre figure et entendre votre voix, vous êtes le compagnon que j’ai quitté tout à l’heure, mais votre apparition si soudaine et surprenante m’en faisait douter. Le mystérieux visiteur pousse un long soupir et dit : Sache que tandis que nous étions vautrés dans la boue de nos impudicités, dépouillés de toute crainte de Dieu, satan nous a intenté un procès au Tribunal divin pour réclamer contre nous une sentence de damnation. Le souverain Juge lui a accord cette sentence et il ne s’agissait plus que de l’exécuter, mais la Vierge ton avocate s’est interposée en ta faveur, d’autant plus qu’à ce moment-là même, tu t’es mis en devoir de l’invoquer. Ton jugement a été différé mais le mien fut exécuté, car au sortir de cette maison où j’ai commis mes crimes, le diable m’a étouffé et m’a arraché l’âme du corps, il m’a entraîné en enfer où je brûle à présent ! Ce disant, il découvre son sein rongé de vers et dévoré par le feu. Il disparut alors, laissant après lui une odeur d'une horrible puanteur. Le jeune homme demeura à demi mort dans la stupeur de ce spectacle. Revenu à lui, il se prosterna contre terre et rendit grâces à son auguste avocate, pleurant amèrement ses égarements, et promit de s’amender sérieusement. Au même moment, il entend la cloche sonner les matines de minuit au couvent voisin des Frères mineurs, et projette de s’y rendre à la pointe du jour, faisant des réflexions jusqu’au matin sur le genre de vie de ces 'anges' de la terre qui prient et expient pour les autres. Dès qu'il fit clair, il y courut et se jeta aux pieds du prêtre gardien, il lui raconta les faits et sollicita la faveur d’être admis dans l’Ordre. On résolut d’aller contrôler le fait à l'endroit où il s’était passé et on trouva en effet le corps du malheureux, hideux et repoussant, gisant par terre. On le traîna jusqu'à la voirie pour l'enfouir comme le cadavre d’un animal. Le jeune converti fut reçu dans l’Ordre de st-François, donnant de rares exemples de vertu, et particulièrement de dévotion envers la sainte vierge Marie. Cela survint en 1604, le bienheureux Richard avait alors dix-neuf ans, il en fut spectateur, lui-même en fit le récit plus tard au prêtre théologien d’Andreda de la Compagnie de Jésus qu’il rencontra en Espagne. Tel fut l’aiguillon qui le détermina à devenir Frère-mineur Récollet, il reçut l’habit franciscain en cette même année 1604 au couvent de Nivelles. Il fut martyrisé au Japon en 1622. Ce trait est cité par le prêtre Bouvier dans la vie du bienheureux qu’il publia 50 ans seulement après son martyre. Le prêtre Sébastien Bouvier, né à Fosses dans la province de Namur, mourut au couvent des Récollets à Namur le 3 avril 1681.

 

Où est-tu ? En enfer, en enfer !

Les traits frappants de la justice de Dieu ne sont pas rares dans la vie missionnaire de François de Geronimo, de la Compagnie de Jésus. Le plus effrayant et plus extraordinaire de tous survint à Naples vers 1705 dans un intervalle de ses missions aux Abruzzes. Il avait conduit ses congréganistes de mission dans une rue des quartiers, non loin de l’église Trinité des espagnols. Catherine demeurait là, courtisane des plus scandaleuses et plus effrontées que les autres. François s'était mis en face de sa maison, entouré d’une nombreuse foule avide de l’écouter. Pour Catherine, cette prédication fut intolérable, la voix du prédicateur suscitait trop vivement les remords. Elle se mit à troubler le missionnaire par des chansons et des sons d’instruments bruyants. La foule s'indigna, les regards se portèrent vers cette femme scandaleuse qui insultait la morale publique et la religion. François alla frapper à la porte de cette maison de scandale mais en vain, elle n’ouvre pas et le bruit redouble. Et il cria : Catherine, Catherine, Dieu te punira avant 8 jours.

Huit jours plus tard, venu prêcher au même endroit, les congréganistes avaient déjà chanté Dio ti salvi, la maison de scandale était silencieuse et les fenêtres fermées. Commençant à parler, François témoigne d’abord son étonnement de ne plus entendre le même tumulte et demande ce qui était advenue de Catherine. — Elle est morte, répond un des assistants, elle est morte hier sans sacrement et sans repentir, on va la porter en terre profane. — Elle est morte, reprend le missionnaire, Dieu a vengé l’outrage fait à sa parole. Malheur d'être morte dans l’impénitence, ô terribles jugements de Dieu ! Il dit encore quelques mots sur les châtiments dans l’autre vie, puis il dit comme par inspiration : Allons voir Catherine. Il va vers la maison, monte l’escalier suivi de tous, s’approche du lieu où était le cadavre et s’écrie saisi de l’Esprit de Dieu : Réponds-moi Catherine, où es-tu maintenant ? II pose deux fois la question sans obtenir de réponse, mais après l'avoir répété une troisième fois, le cadavre agite ses lèvres à la vue de tous les assistants et fait entendre ces lugubres paroles : En enfer, en enfer ! Qu’on juge de la terreur dont tous furent saisis en fuyant ce lieu d’horreur. François répéta avec effroi : En enfer. O Dieu juste, Dieu terrible : en enfer. Un d'eux rendit témoignage de ce fait devant le tribunal apostolique : En vérité, ce que j’ai vu de mes propres yeux me fit une telle impression que maintenant encore, pendant que je l’atteste, il me semble voir Catherine sur son lit et entendre ses paroles, je suis en enfer ! Et chaque fois que je passe devant la maison qu’elle habitait, ce prodige me revient à l’esprit et m’inspire la frayeur. Cet événement est de la plus grande authenticité, les témoins ont assuré sa notoriété publique devant les juges ecclésiastiques. Le prêtre Stradiotti qui publia la vie du saint 3 ans après sa mort le rapporte ainsi.

 

Une damnée soufflète sa fille

Nous lisons l'histoire suivante dans la vie de la soeur visitandine Marie-Angélique Doublet, morte à Paris en 1726. À peine se fut-elle consacrée au service de Dieu par les saints voeux, la mère Louise-Eugénie de Fontaines la destina sur l’avis de s. Vincent de Paul au service des Filles-repenties-de-la-Madeleine, preuve sensible de l’estime qu’ils avaient de sa vertu et capacité. Un jour le confesseur de la maison vint la demander et dit : Ma soeur, j’ai beaucoup souffert cette nuit au sujet d’une fille dont vous avez soin, j’ai vu sa mère me dire qu'elle était damnée à cause d’elle et lui reprochait sa damnation. Quand la soeur alla la chercher, celle-ci raconta que sa mère lui était apparue la nuit même et l’avait souffletée en disant : Misérable, c’est à cause de vous que je suis damnée, si vous ne changez pas vous le serez comme moi ! La fille dit qu’à cause du soufflet de sa mère elle souffrait beaucoup de la tête et désirait se convertir de tout coeur. Soeur Marie-Angélique, secondant ces heureux mouvements de la grâce, la prépara à une bonne confession et la vit soutenir pendant deux ans avec joie l’exercice d’une solide mortification. Son mal de tête progressait considérablement sans que les médecins pussent en reconnaître une cause extérieure. La douleur devint vive et un de ses yeux lui sortit de la tête. On dut admettre l’entière résignation de cette pénitente à la volonté de Dieu. Les chirurgiens déterminèrent une opération qu'elle soutint avec une patience héroïque ; on trouva qu'une partie de sa cervelle et son crâne était brûlé sur le côté opposé du soufflet infligé. Enfin, elle se prépara à la mort dans la plus vive reconnaissance envers la divine miséricorde, dans des actes d’amour de Dieu si ardents qu’elle enflammait toutes les personnes qui l’assistèrent en ce dernier passage.

 

Converti par une damnée

À l’âge de 16 ans, s. Alphonse de Liguori fut reçu docteur de l’Université de Naples. Ce succès ne l’éblouit pas un instant ; jaloux de conserver la pureté de son coeur dont l’orgueil est le plus dangereux ennemi, le jeune homme se retirait souvent dans la solitude pour fortifier sa vertu. Sa retraite privilégiée était dans la maison des Lazaristes à Naples, la Missionnary della Vergine.

J’avais beaucoup fréquenté un de ces enfants de s. Vincent de Paul qui résidait à Naples, et je suis allé faire une visite. Avec une cordialité que je n’oublierai pas, le prêtre F. me fit les honneurs de la maison, il me montra l’église, la chapelle intérieure, les jardins, les cloîtres etc. Puis il me dit : Maintenant il faut que je vous fasse voir une cellule qui est pour nous un précieux sanctuaire. Et il me fit visiter la modeste cellule où le jeune Liguori faisait sa retraite annuelle. — Peut-être, ajouta le vieillard, ne seriez-vous pas fâché de faire connaissance avec celui qui a converti Liguori. Venez, il est chez moi. Nous sommes entrés dans une cellule et il me fit asseoir devant un tableau recouvert d’une épaisse voilure. — Ce tableau est à la mission depuis environ 100 ans, dit-il, il nous fut envoyé par un de nos pères de Florence.

Un vieillard de Florence entretenait des rapports criminels avec une femme, il se convertit après une longue résistance à la grâce mais la femme demeura impénitente et mourrut. Un soir que cet homme était en prière dans sa chambre au pied d’une image de notre-seigneur sur la croix, il entendit autour de lui un bruit d’ouragan et une voix lugubre au milieu. C'est la voix de la femme qui crie : Je suis damnée ! Par permission de Dieu, je viens vous donner une marque du feu qui me brûle. À cet instant, deux mains en feu s'imprimèrent sur le tableau qui perça de part en part.

Lorsqu'il dit ces paroles, le prêtre soulèva le voile et je vis sur la vieille gravure l’empreinte de deux mains ayant soutirées le papier comme un emporte-pièce, tandis que les parties voisines restaient intactes. Circonstance inexplicable aux yeux de la science. Le talon des mains porté sur le cadre l’a carbonisé avec la même précision. Cela est horrible à voir. On montre ce tableau pour une retraite, dit le père F., vous jugerez de l’impression qu’il a produit sur le coeur de Liguori. Quoique déjà tout à Dieu, le jeune homme répétait : C’est à ma retraite aux Missionnaires della Vergine que je dois ma conversion.

 

Aïeul, père et fils damnés

Nous tenons le fait suivant du prêtre Pichot, religieux avancé en âge de la Compagnie de Jésus, de sa lettre du jeudi 13 avril 1911. Voici ce que lui a raconté le prêtre Mirbeau du diocèse de Bourges pendant les mauvais jours de la grande révolution de 1793, alors resté dans le diocèse afin de visiter la nuit les pauvres sans curé. Il voyageait d’ordinaire avec un autre prêtre, et un jour qu’ils avaient été trempés par un orage et que la nuit était avancée, ne sachant où trouver un gîte et confiant en Dieu, ils se dirigèrent vers une ferme près d’un château. Ils frappèrent à la porte et furent accueillis avec charité, mais quant à passer la nuit dans la maison, le fermier leur dit : Je le voudrais bien, mais impossible, notre pays est semé d’espions et si on venait à savoir que je vous ai donné l’hospitalité, on ferait un mauvais parti à moi et aux miens. Si vous avez du courage, vous trouverez un gîte dans un endroit que je vais vous indiquer, où les hommes n’iront pas troubler votre repos. Près d’ici est le château dont cette ferme dépendait, il était encore habité il y a un certain nombre d’années, mais il ne l’est plus en aucune façon, et personne dans la région ne voudrait y passer une seule heure de la nuit, car on dit dans toute la contrée qu’il y apparaît d’affreux revenants. Pensez à ce que vous voulez faire, c’est bien à contre-coeur que je ne peux vous garder chez moi la nuit. — Mon ami, dirent les deux prêtres, qu’à cela ne tienne, conduisez-nous au vieux château et nous y reposerons sous la garde de Dieu. Ce qui fut dit fut fait. Un quart-d’heure après, fermier et voyageurs entrèrent dans le château aux nombreux appartements et aux vastes salles, une en particulier possédait un grand et profond foyer où du bois en réserve s'y trouvait. On pouvait sans crainte y faire un bon feu. Les deux prêtres disent : Que Dieu vous récompense de votre charité. Nous allons faire un bon feu pour nous sécher parfaitement, nous réciterons notre bréviaire en attendant de nous livrer au sommeil.

Leur guide parti, les prêtres s'installèrent près du feu allumé et se mirent tranquillement à réciter leur bréviaire. Après un temps, ils entendirent soudain une grosse masse tomber sur la large table au milieu de la salle, derrière eux. Ils se retournent et tous deux aperçoivent le buste d’un homme, tête, cou, poitrine et haut de jambes. Cet être très âgé regardait fixement en silence les deux prêtres ; ceux-ci stupéfaits étaient pourtant sans trop de crainte, se demandant ce qui allait se passer. Peu de temps après un second personnage tombe aussi mystérieusement avec fracas sur la table derrière le premier, en demeurant tout à fait visible ; lui aussi n’avait de son corps que le buste et paraissait plus jeune que son compagnon. Ces deux êtres, réels ou fantastiques, gardèrent le silence un certain temps quand un troisième vient les rejoindre de même manière avec grand bruit et paraissait plus jeune qu’eux. Le silence ne fut rompu par aucun des cinq personnes qui se trouvaient dans la salle du château, ce que les prêtres trouvaient long. Puis tout à coup le plus âgé des trois bustes qui étaient apparus aux prêtres prit la parole et dit : Ne craignez rien, nous ne venons pas ici pour vous épouvanter ou vous faire du mal, non. Nous venons vous demander un service. Voici qui nous avons successivement été les seigneurs de ce château, nous sommes l'aïeul (grand-père), père et fils, nous en avons fait un lieu de débauche de toutes sortes tous trois et en avons couvert les murs de tableaux obscènes et réligieux, dont la plupart sont encore sur les murs des appartements. Chaque fois que des curieux viennent visiter le château, ces tableaux leur font faire de nombreux péchés et nous souffrons davantage en enfer à mesure qu’ils multiplient. Ayez pitié de nous, avant de quitter ces lieux, nous vous en conjurons, détruisez ces abominations afin que nos souffrances n’augmentent plus dans l’enfer. Les deux prêtres promirent d’exécuter fidèlement ce qui leur était demandé, puis les trois mystérieux personnages disparurent à l’instant. Et le lendemain, ils mirent leur promesse à exécution.

 

Il y a un enfer et j’y suis

De Ségur fait le récit suivant. C’était en Russie, un peu avant l’horrible bataille de 1812. Mon grand-père maternel Rostopchine, comte et gouverneur militaire de Moscou, était lié avec le comte et général Orloff, connu pour sa bravoure, mais aussi impie que brave. À la suite d’un souper bien arrosé, le comte Orloff et son ami général V. voltairien comme lui, se mirent à se moquer de la religion et surtout de l’enfer. Orloff dit : Et si par hasard il y avait quelque chose de l’autre côté du rideau ? — Eh bien, dit le général V., que celui qui s’en ira le premier revienne en avertir l’autre. Est-ce convenu ? — Excellente idée, répondit le comte Orloff. Et tous deux se donnèrent très sérieusement leur parole d’honneur. Quelques semaines plus tard éclata une de ces guerres comme Napoléon pouvait en soulever alors : l’armée russe se mit en campagne et le général V. eut l’ordre de partir prendre un important commandement. II avait quitté Moscou depuis deux ou trois semaines, lorsqu’un matin de très bonne heure, pendant que Rostopchine mon grand-père faisait sa toilette, la porte de sa chambre s’ouvrit brusquement devant le comte Orloff en robe de chambre, les cheveux hérissés, l’oeil hagard, pâle comme un mort. — Quoi Orloff, c’est vous à cette heure, dans un costume pareil ? Qu’avez-vous donc, qu’est-il arrivé ? — Mon cher, répond Orloff, je crois devenir fou, je viens de voir le général V. — Il est donc revenu ? — Non, dit Orloff en se jetant sur un canapé et pressant sa tête à deux mains, non il n’est pas revenu, et c’est ce qui m’épouvante. Mon grand-père ne comprit pas et chercha à le calmer. — Racontez-moi ce qui vous est arrivé, dit-il, et ce que tout cela veut dire. Dominant son émotion, le comte Orloff lui raconta ainsi : Il y a quelque temps, V. et moi avons mutuellement juré que le premier de nous qui mourrait viendrait dire à l’autre s’il y a quelque chose de l’autre côté du rideau. Or ce matin, il y a une demi-heure à peine, quand j’étais tranquillement dans mon lit, depuis longtemps éveillé sans penser à mon ami, les deux rideaux de mon lit se sont tout à coup ouverts brusquement, le général V. debout à deux pas de moi, pâle, main droite sur sa poitrine, m'a dit : Il y a un enfer et j’y suis ! Puis il disparut et je suis venu vous trouver.

Quelle chose étrange, je ne sais quoi penser. Mon grand-père le calma comme il put mais ce ne fut pas chose facile, il lui parla d’hallucinations ou de cauchemars, peut-être dormait-il. Puis il fit atteler ses chevaux pour reconduire le comte Orloff à son hôtel. Douze jours après cet incident, un courrier de l’armée apporta à mon grand-père la nouvelle de la mort du général V. : ce matin à la même heure où Orloff avait vu et entendu son apparution à Moscou, le général était sorti pour reconnaître la position de l’ennemi et eut la poitrine percée par un boulet.