Dans
ce récit d’Emmerich, vous verrez les canailles fréquenter les palais de Caïphe
et Ananus, les foules qu’ils entraînent dans la bassesse, Jésus être torturé
sans raison par ordre d’Hérode et Pilate, qui sont ceux et celles qui composent
la nouvelle assemblée, comment ils s'organisent et pourquoi ils n’iront plus
adorer au Temple.
La
fiancée de Jésus Christ est dans une dimension si réelle, comme l’a rapporté
Thomas dans son évangile : Le royaume du Père est comme une personne qui voulait
tuer quelqu’un de puissant ; encore dans la maison il sortit son épée et la
plongea dans le mur pour savoir si sa main pouvait le faire. Alors il tua le
puissant esprit.
Feu
mon père disait, petit train ira loin.
Gloire
et honneur à Dieu. J.
Legrand
C’est
dans le calme et la confiance que sera
votre force.
Après avoir donné son pain et son vin à ses
disciples, Jésus quitta la salle à manger la tristesse dans l’âme. Les onze
apôtres étaient dans la joie d’avoir reçu de Jésus le pain et le vin, et encore
pleins de son discours sur l’amour, quand ils suivirent Jésus qui les emmena sur
le mont des oliviers par la vallé. La pleine lune se levait sur le mont quand
ils arrivèrent à la porte de la vallée de Josaphat. Le seigneur s’avança dans la
vallée. Il leur dit qu’il viendrait juger le monde ici, non pauvre et faible comme à
l'instant, et que les autres trembleront en criant aux montagnes de les
cacher. (Joel 3.2, Osée 10.5)
—
Vous serez tous choqués de moi
cette nuit comme il est écrit (Zacharie 13.7)
: Je frapperai le berger et les brebis se disperseront. Lorsque je serai
ressuscité je vous devancerai en Galilée.
Mais ils ne
comprirent pas, ce qui arriva souvent dans la soirée, pensant qu’il divaguait
sous l’effet de la fatigue. Ils se pressèrent autour de lui pour exprimer leur
amour de différentes manières, soutenant qu’ils ne l’abandonneraient jamais,
mais Jésus continua à parler dans le même sens.
—
Même si tous se choquent de toi,
dit Pierre, je ne me choquerais jamais.
Le seigneur lui répondit qu’il le renierait
trois fois avant le chant du coq.
—
Même si je dois mourir avec toi, je
ne te renierais pas, insista Pierre.
Les autres vinrent
parler ainsi, l’un après l’autre, et la tristesse de Jésus augmenta. Pour le
calmer, ils poussèrent jusqu’à dire, à la façon des humains, que ce qu’il
prédisait n’arriverait pas. Et parce qu’ils forçaient inutilement, ils
commencèrent à douter, et la tentation vint sur eux. Ils traversèrent le torrent
Cédron par un autre pont que celui où Jésus sera emmené prisonnier. Il leur
faisait faire un détour avant d’aller à Getsemaneh (גת שמנה presse d’olives), ce jardin de la vallée de Josepha au pied du mont
des oliviers. La salle à manger était à 1 km de la porte de la vallée de
Josaphat, et de là même distance jusqu’au portique de Getsemaneh, où il avait
quelquefois enseigné ses disciples, où ces derniers jours il passait la nuit
parmi eux. Getsemaneh était un grand jardin bordé d’un muret de terre, avec des
arbres fruitiers, des plantes d’agrément et quelques maisons ouvertes inoccupées
où on pouvait prier et se reposer. Les apôtres et autres avaient la clé de ce
jardin, ceux qui n’avaient pas de jardin y faisaient des repas de fête.Il y avait des cabanes de feuillage, c’est
là que vont aller huit des apôtres, que les disciples rejoindront plus tard.
21 h
Il faisait nuit quand Jésus et ses apôtres arrivèrent à Getsemaneh. La
lune éclairait le ciel, un danger se rapprochait et Jésus leur annonça.
Percevant leur peur, il dit à huit d’entre eux de rester près des cabanes de
feuillage par cette phrase :
—
Restez ici pendant que je vais voir
où je peux prier.
Le jardin du mont
des oliviers était bien que plus petit que Getsemaneh et bordé que d’une haie,
il avait beaucoup d’oliviers avec des terrasses et des bancs d’herbes bien
entretenues, et de grandes grottes fraîches propices à la prière et la
méditation. Jésus va aller prier dans un côté plus sauvage. Le seigneur emmena
en haut que Pierre, Jean et Jacob. Passé le chemin qui
sépare Getsemaneh du jardin des oliviers, Jésus sentit une angoisse venir sur
lui et devint très triste. Jean lui demanda comment il pouvait être comme ça
alors qu’il les avait toujours encouragés. Jésus répondit :
—
Mon âme est triste jusqu’à la
mort.
(Psaumes 42)
Jésus aperçut des angoisses venir vers lui de
tous les côtés, des visions terribles approchaient sous forme de brouillards.
—
Restez ici veiller avec moi,
dit-il. Et priez pour ne pas tomber sous la tentation.
Il fit quelques pas et déjà ces visions
l’attaquaient et le saisissaient dans les angoisses. Il descendit un peu à
gauche sous un rocher où il y avait une grotte profonde de 2 m, des plantes
suspendues faisaient rideau. Les apôtres étaient juste au-dessus. Maintenant
qu’il s’était éloigné de tous ses apôtres, ces visions d’horreur se formèrent en
cercle autour de lui. Il tremblait et entra prier dans la grotte comme un homme
s’abrite d’un orage soudain, le terrain s’affaissa mollement. Les angoisses
augmentèrent. Ces visions menaçantes furent plus distinctes dans cette petite
grotte qui semblait contenir tous les péchés du monde, du premier jusqu’au tout
dernier, avec leurs châtiments : c’est dans cette grotte qu’Adam et Ève
s’étaient lamentés dans les larmes, chassés du paradis sur une terre étrangère.
C’est sur le mont des oliviers qu’ils étaient venus. Sans aucune résistance, le
seigneur se soumit aux souffrances qui allaient commencer avant sa
mort pour satisfaire la justice divine contre les péchés. Il remit sa
divinité sacrée comme fils de Dieu au sein
de la Trinité, et s’enferma dans son innocence humaine afin d’acquitter les
châtiments des péchés du monde par les douleurs et les angoisses. N’ayant
maintenant que l’amour pour enflammer son coeur d’homme dans sa volonté à
satisfaire la justice contre l’attachement aux mauvais penchants et croissance
des péchés, Jésus prit tout ce qui se rattachait d’expiations, de pénitences, de
purifications et sanctifications par amour et compassion envers nous autres
pécheurs. Afin de payer nos péchés sans nombre, il laissa des souffrances
interminables l’envahir et elles entrèrent dans les membres de son corps et dans
les facultés de son âme comme un arbre aux mille douleurs.
Péchés du monde | visions
Laissé à sa seule humanité, triste et courbé
d’angoisses, implorant Dieu devant tous les péchés du monde qui défilaient avec
mépris sous la vraie forme de leurs laideurs intérieures, dans sa prière il les
prit pour lui et s’offrit à la justice de son Père céleste en contrepartie de
cette dette colossale. Devant Jésus,parmi ces horreurs satan s’agitait
sous sa forme méprisable dans
un rire infernal et une fureur croissante, faisant succéder des scènes de plus en plus dégoûtantes et criant
sans cesse à l’humanité de Jésus :
—
Prendras-tu aussi celui-ci sur toi,
en souffriras-tu le châtiment ? Comment veux-tu satisfaire pour ça
?
22 h
Un rayon céleste partit du côté où le soleil monte et une armée d’anges
descendit le fortifier et le ranimer tandis que tout le reste de la grotte était
envahi de mauvais esprits qui l’attaquaient en lui montrant les souillures de
nos crimes et l’insultant. Il prit toutes ces horreurs d’un coeur aimant Dieu et
ses créatures parfaitement, et subissait la torture de leurs cruels châtiments,
si innombrables qu’une année ne suffirait pas à les rapporter. Cette masse
démesurée de péchés se déversa sur son âme comme un océan et Jésus s’offrit
comme victime expiatoire, appelant à lui tous les châtiments rattachés à nos
crimes impunis. Et comme au désert, satan souleva d’incessantes tentations et
osa accuser la pureté même en disant :
—
Comment veux-tu prendre tout ça sur
toi alors que tu n’es pas pur toi-même. Regarde ceci et ça aussi.
Sans gêne, il déroulait des fautes imaginaires,
lui reprochant les erreurs et soi-disant scandales
soulevés par ses disciples, et l’embarras qu’il avait amené dans le monde en
renonçant aux anciennes traditions. Se faisant le plus habile des pharisiens,
satan lui reprocha d’être la cause du massacre des innocents ainsi que des
souffrances de ses parents en Égypte, et de n’avoir pas sauvé Jean le baptiste
de la mort ; d’avoir désuni des familles, d’avoir protégé des accusés, de
n’avoir pas guéri des malades, d’avoir fait du tort aux habitants de Gergésa en
permettant aux possédés de renverser leurs cuves et aux démons de précipiter
leurs cochons dans la mer. Il mit sur lui les fautes de Marie-Magdala pour ne
pas l’avoir empêchée de retomber dans le péché, il l’accusait d’avoir abandonné
sa famille et d’avoir dilapidé le bien d’autrui. Dans le but de déranger son
âme, satan présenta à Jésus tout ce que ce tentateur peut reprocher à la
mort d’un homme ordinaire, il l’éprouva à titre d’homme juste ayant agi sans
motif supérieur, car sa divinité en tant que fils de Dieu lui fut cachée.
Parfait en son humanité, Jésus voulut aussi
souffrir l’épreuve de remise en question des bonnes oeuvres de ceux qui meurent
dans le mérite. Et pour vider tout à fait la coupe de l’agonie, il accepta que
le mauvais esprit, ignorant qu’il était fils de Dieu,puisse présenter
devant
Dieu ses oeuvres de charité comme des actes
coupables que la grâce de Dieu n’avait pas pardonnés. Il lui reprocha de vouloir
effacer les fautes d’autrui tandis que lui-même était dénué de mérite et avait à
satisfaire la justice divine pour des prétendues bonnes oeuvres. La divinité de
Jésus comme fils
de Dieu supporta que l’ennemi remette en question
son dévouement et le présente comme un homme qui se vante d’avoir une part
personnelle dans ses bonnes oeuvres, à moins qu’il joigne ses mérites au
sacrifice du seigneur. Le tentateur lui présentait les oeuvres de son amour
comme étant dépourvues de mérite et le mettaient en dette envers Dieu, il mit
des contrats sous ses yeux où ses bonnes oeuvres étaient inscrites comme dettes
et les montrait du doigt en disant :
—
Tu es redevable pour ça et pour cet
autre.
Il déroula un contrat sur ce que Jésus avait
reçu de Lazare Élazar et ce qu’il avait
dépensé de la vente de la propriété de Marie à Magdala, disant :
—
Comment as-tu osé gaspiller le bien
d’autrui et faire du tort à cette famille ?
Les péchés sans nombre se présentaient au
seigneur pour se faire expier et il s’offrait à eux. J’ai senti le poids des
accusations contre lui, car parmi les péchés du monde dont Jésus se chargeait je
vis aussi les miens en grand nombre, et toutes mes fautes affluant comme un
fleuve me furent montrées dans le cercle des épreuves qui l’assiégeaient.
Tournée vers lui comme les anges consolateurs, les yeux fixés sur mon-fiancé, je
priai dans les larmes. Hélas sous le poids des douloureuses angoisses, le
seigneur se tordit comme un ver. Je ne pus retenir ma colère quand satan
l’accusa de la vente du bien de Marie-Magdala et criai :
—
Comment peux-tu reprocher la vente
de ce bien comme un péché, n’ai-je pas vu le seigneur utiliser cette somme
remise par Lazare pour des oeuvres de compassion et libérer vingt-sept pauvres
prisonniers pour dette à Thirza.
Au début Jésus priait à genou avec calme, mais
il sentit de l’épouvante en voyant les innombrables crimes des hommes ainsi que
leur ingratitude envers Dieu. Il fut pris d’une angoisse si violente et douloureuse
qu’il cria en frissonnant de froid :
—
Mon Père, si c’est possible que
cette coupe s’éloigne de moi, éloignez cette coupe mon Père, tout vous est possible. Mais il se
reprit disant, cependant que votre volonté se fasse et non la mienne.
Sa volonté et celle
de son Père étaient une, même s’il s’émouvait en face des multiples formes de la
mort, il se sacrifiait par amour pour la cause des faiblesses de la race
humaine. Toutes espèces de méchancetés, de vices, d’ingratitudes, se déversèrent
avec leurs punitions. L’homme en lui ressentit les terreurs de la mort, des
souffrances expiatoires, avec autant de démons qui l’oppressaient et
l’attaquaient. Couvert de sueur, il tomba çà et là en se tordant les mains et
tremblotant de froid.
22 h 30
Il se releva malgré que ses genoux le
portaient avec peine. Totalement défait et méconnaissable, cheveux hérissés,
lèvres blanches, baigné de sueur et tombant à chaque pas qu’il faisait pour se
traîner jusqu’aux trois apôtres sur la plateforme, il les trouva allongés en
train de dormir, assommés de fatigue et d’inquiétude. Le seigneur alla vers eux
comme un homme terrorisé d’angoisse va vers ses amis, aussi comme un berger va
au-devant de son troupeau quand un danger menace, car il les savait dans
l’angoisse et la tentation. En approchant, de terribles visions le harcelèrent,
il joignit les mains et tomba avec tristesse auprès d’eux. Dans son
délaissement, il dit d’une voix éteinte :
—
Dors-tu Simon... Ne
pouviez-vous veiller une heure avec moi ?
Ils se réveillèrent et le soutinrent, car il
chancelait. Ils ne savaient plus quoi penser. S’il ne leur avait pas jadis
apparu entouré de cette lumière bien connue ils n’auraient jamais retrouvé en
lui ce Jésus.
—
Maître qu’avez-vous ? dit
Jean. Est-ce que je dois appeler les autres, devons-nous fuir ?
—
Même si je vivais trente-trois ans
à guérir et enseigner encore, cela ne suffirait pas pour faire ce qu’il me reste
à faire d’ici demain, répondit Jésus. N’appelle pas les huit que j’ai mis de
côté, car ils ne pourraient me voir dans la détresse sans se choquer, ils
tomberaient dans le doute et m’oublieraient après de nombreuses tentations. Mais
vous qui avez vu le fils de l’homme transfiguré, vous pouvez le voir assombri et
délaissé. L’Esprit est vivant, mais la chair est faible, veillez pour ne pas sombrer
sous les tentations et priez.
Il parlait pour eux et pour lui aussi.
Pour les encourager à persévérer, il leur enseigna à surmonter la faiblesse et
la mort. Après un quart d’heure, il retourna dans la grotte accablée de
tristesse, son angoisse augmenta encore. Ils tendirent les mains vers lui puis
tombèrent en larmes dans les bras l’un de l’autre se demandant :
—
Qu’est-il arrivé pour qu’il soit si
éprouvé...
Ils se couvrirent la tête tristement et
commencèrent à prier. Il s’était passé une heure et demie depuis leur arrivée au
jardin des oliviers comme dit l’écriture : N’avez-vous pu veiller une heure
avec moi ? Mais cela ne doit pas être pris à la lettre, à notre manière de
compter. Les trois apôtres ont d’abord prié puis ils se sont rendormis, par
manque de confiance ils retombèrent sous la tentation.
Attendant à l’entrée du jardin des oliviers, les huit apôtres ne dormaient pas,
la tristesse de Jésus dans ses dernières paroles les avaient mis dans l’inquiétude, ils
se traînaient en cherchant où se cacher sur le mont des oliviers en cas de
danger. De l’autre côté, les disciples et amis de Jésus, aussi inquiétés,
marchaient et parlaient ensemble dans l’attente de quelque événement. Il n’y
avait aucun bruit ce soir dans Iérusalem, les juifs faisaient les préparatifs de
la fête dans leurs maisons et les campements des étrangers venus pour Pesah
n’étaient pas près du mont des oliviers. Les dévotes, c’est-à-dire la mère du
seigneur, Marie-Magdala, Marthe, Marie de Cléophas, Marie-Salomé et Salomé,
avaient quitté la salle à manger pour aller chez Marie la mère de Marc dont la
maison était en bordure de Iérusalem, face au mont des oliviers. Avertie des
bruits qui couraient, Marie retourna en ville avec ses amies pour avoir des
nouvelles de Jésus. Nicodème et Joseph d’Arimathie vinrent la trouver avec
Lazare et sa parenté d’Hébron, comme les disciples ils avaient eu connaissance
des inquiétantes prophéties de Jésus dans la salle à manger et étaient allés
s’informer chez des pharisiens de leur connaissance ; ils n’avaient rien appris
d’une prochaine tentative contre le seigneur et disaient que le danger ne
pouvait être très grave, qu’on n’attaquerait pas le seigneur si près de la fête.
Ils ne savaient rien encore de la trahison de Judas, et Marie leur dit qu’il
était agité ces derniers jours et sûrement parti le trahir après avoir quitté la
salle à manger, qu’elle l’avait souvent averti d’être un fils de perdition. Puis
les dévotes retournèrent chez Marie la mère de Marc.
Expiations à faire | visions
L’âme aux douleurs, Jésus revint dans la grotte
et se prosterna sur son visage, bras étendus, il pria son Père céleste. Un
nouveau combat de trois quarts d’heure débuta. Des anges vinrent lui révéler les
souffrances qu’il devait assumer pour expier les péchés. Ils lui montrèrent
l’homme avant sa chute à la belle ressemblance de Dieu et comment il s’était
défiguré. Ils lui firent voir la racine d’où sortait la convoitise, sa nature et
ses ravages chez les humains, du premier péché jusqu’aux derniers, et
l’équivalent de leurs châtiments en disgrâce et durée. Ils lui expliquèrent
quelles souffrances il lui fallait subir en son âme et corps pour réparer la
justice divine et acquitter ainsi les châtiments redevables à la convoitise de
la race humaine, jusqu’à ce que les dettes de la race humaine soient entièrement
payées par le fils de Dieu, seul humain exempt de péché. En prenant sur lui les
châtiments redevables par la race humaine, il lui fallait aussi surmonter la
répugnance de la mort et ses souffrances. Les anges lui révélèrent tout par
différentes visions. Une sueur de sang coula sur le front de Jésus, son
épouvante à la vue de ces expiations était telle qu’on ne peut la définir,
l’humanité du seigneur fut oppressée sous la masse effroyable de douleurs et
d’horreurs à acquitter. Dans un mouvement de compassion, les anges souhaitaient
le réconforter et prièrent vivement devant le trône de Dieu pour l’amour qui se
sacrifiait, et en un instant il fut entre la miséricorde et la justice de Dieu.
Dieu révéla sa présence sous forme lumineuse, où la divinité du fils était
l’essence même de son Père et de l’Esprit saint qui procédait du Père au fils.
Le fils était un
peu en retrait dans le Père afin que son humanité porte les souffrances et que
sa volonté humaine ne cesse de prier le Père de les détourner. À la compassion
des anges, dans leur désir de le réconforter, au même instant Jésus reçut du
soulagement, puis tout disparut et les anges partirent. Il allait devoir subir
de nouvelles attaques. Sur le mont des oliviers, alors que Jésus se soumettait à
l’épreuve de la répugnance de la mort et ses douleurs, il fut décidé qu’il les
ressente afin de les surmonter, les subir faisait partie des souffrances, et il
fut permis au tentateur de faire ce qu’il fait à tout homme qui veut se
sacrifier pour une sainte cause. À la première agonie, il montra à Jésus
l’énormité de la dette qu’il devait acquitter, satan alla même jusqu’à inventer
des péchés dans ses oeuvres. À la seconde agonie, les anges montrèrent à Jésus
les douleurs expiatoires nécessaires pour acquitter la justice divine dans toute
l’ampleur de son amertume. Cela lui fut révélé par les anges, car le père du
mensonge ne peut pas montrer d’expiation possible, ce désespéré ne montre pas
comment s’exerce la compassion divine.
L’assemblée | visions
Par sa complète soumission à la volonté du
Père, Jésus ayant gagné le combat sans opposer aucune résistance, un nouveau
cercle de visions lui fut montré. Comme chez tout homme qui
se dévoue par sacrifice, le doute souleva cette inquiétante question : de quel
profit sera ce sacrifice... Et son coeur se
consterna à la vue du pire avenir.
Quand Dieu créa le premier homme, Il lui envoya le sommeil et ouvrit son
côté pour prendre une de ses côtes et en faire une compagne. Il emmena Ève la
mère de tous les vivants devant Adam qui déclara : Chair de ma chair, os de
mes os, l’homme quittera Père et mère pour s’attacher à sa femme et être une
seule chair. Jésus le nouvel Adam va accueillir le sommeil - la mort
de son
corps sur la croix, il va laisser ouvrir son côté à
la nouvelle Ève - l’assemblée litt. église, fiancée pure
et mère des vivants. Il va donner le nouveau sang du salut, l’eau de
purification et l’Esprit à la race humaine, trois témoins de la fiancée sans tache. En
donnant sa chair, il veut être sa tête et nous les membres soumis à sa tête,
chair de sa chair, os de ses os. Prenant la nature humaine pour subir la mort
pour nous, il quitte Père et mère pour s’attacher à sa fiancée, la nourrir de sa
chair et devenir une seule chair avec elle. Il veut être avec l’assemblée sur
terre et que nous soyons unis en lui fermement comme il a dit : Les portes de
l’enfer n’auront pas avantage sur elle.
Résolu à exercer un amour sans limite envers
les pécheurs repentants, Jésus devient le frère des pécheurs repentants et
prendre sur lui les châtiments redevables à leurs crimes. Il regarda tristement
la dette immense et les douleurs qui allaient tout réparer, et abandonna tout son être comme victime expiatoire
suivant la volonté du Père, béni soit-il. Voyant les douleurs des coups et des
blessures à venir, bien décidé à racheter sa fiancée céleste au prix de son
sang, il vit aussitôt l’ingratitude des hommes. Les difficultés de ses apôtres,
ses disciples et ses amis se montrèrent à lui et il vit l’assemblée peu
nombreuse à cause de divergences ; les dissociations survenaient sous
l’orgueil et la désobéissance, et augmentaient en répétant la chute du premier
homme ; il vit la mauvaise tiédeur d’innombrables croyants, de ceux qui
s’étaient souillés de mensonges, les prétendus docteurs et leurs tromperies,
l’héritage spirituel pollué par les sacrificateurs prêtres pourris et les conséquences néfastes de leurs actes, l’abomination de
la désolation dans le royaume de Dieu et dans le sanctuaire causée de cette
ingrate humanité qu’il veut racheter de son sang au prix de souffrances
innommables.
Ingrats | visions
Les scandales défilèrent en série devant
Jésus, les scandales des temps passés jusqu’à notre temps à la fin du
monde, dont les causes se basaient sur des erreurs, des faussetés, des
entêtements, des moqueries, des trahisons, des déviances de réformateurs
d’apparence sainte, de fanatiques enragés. Certains insinuaient de n’avoir pas
été bien crucifié, d’autres de n’avoir pas souffert comme ils supposaient, et
déchiraient la robe sans couture de son assemblée parce qu’ils ne l’acceptaient
pas comme il avait donné dans la largesse de son amour. Beaucoup dans son
assemblée le maltraitaient, l’insultaient, le reniaient, haussaient les épaules
ou secouaient la tête pour éviter ses bras tendus, et allaient tous dans l’abîme
se faire engloutir. D’autres sans nombre, qui n’osaient pas le renier
ouvertement, s’éloignaient de son assemblée, dégoûtés de ses maux, comme le
lévite s’éloigne de l’homme dépouillé par les voleurs, et s’écartaient de sa
fiancée blessée comme les lâches abandonnent leur mère quand des voleurs et des
meurtriers viennent la nuit, à qui ils ont laissé la porte ouverte par
négligence ou déloyauté. Jésus les vit prendre le butin et emporter au désert
des vases d’or et des colliers brisés ; il les vit tous loin de la vraie vigne,
dispersés dans les raisins sauvages comme des troupeaux égarés, livrés en pâture
aux loups ou conduits par des mercenaires dans de mauvais pâturages, refusant
d’entrer dans le refuge du bon berger qui donne sa vie pour ses brebis. Ils
erraient dans le désert, agités aux vents au milieu des sables, sans patrie,
refusant de voir sur la montagne la ville qui ne peut se cacher, maison bâtie
sur le roc de la fiancée son assemblée à qui il promet d’être près d’elle
jusqu’à la fin des siècles et que les portes de l’enfer n’aient pas avantage sur
elle. Il vit ceux qui refusaient de passer par la porte étroite pour ne pas
avoir à s’humilier, et suivaient ceux qui prenaient la porte large pour
construire des cabanes sur le sable, qu’ils défaisaient et refaisaient sans
cesse où il n’y avait ni sacrifice ni autel. Ils avaient sur leur toit des
girouettes qui tournaient au vent comme leurs doctrines, se contredisaient sans
pouvoir s’entendre, sans jamais de position fixe, et renversaient leurs cabanes
en lançant leurs débris sur la pierre angulaire imperturbable de l’assemblée.
Beaucoup de leurs maisons étaient dans l’obscurité, mais ils ne venaient pas
sous la chandelle de la maison de l’épouse, ils traînaient autour des jardins de
l’assemblée, yeux fermés, vivant des parfums qui s’en dégageaient. Ils ouvraient
leurs bras à de sombres idoles pour suivre des astres errants qui les emmenaient
à des puits sans eau. Au bord du gouffre et dévorés par la faim, ils refusaient
d’entendre l’épouse qui les appelait, riant avec arrogance aux serviteurs
envoyés pour les inviter au festin nuptial, refusant d’entrer dans le jardin à
cause de la haie épineuse. Ils n’avaient ni blé ni vin à leur faim, aveugles
imbus d’eux-mêmes, disant ne pas voir dans l’assemblée le verbe fait chair.
Jésus pleura. Il voulut souffrir même pour ceux qui refusaient de le voir, ou
refusaient de porter leur croix avec lui jusqu’à la montagne de la ville bâtie
sur le roc et manger de son pain et son vin. Une grande multitude rachetée par
son sang se fit étranglée, violemment arrachée par satan, malgré avoir reçu une
sanctification litt. consécration. Jésus
vit le repli des premiers croyants à présent et à venir, tandis que la voix du
tentateur lui répétait sans cesse :
—
Veux-tu souffrir pour des ingrats
pareils ?
Il sentit l’oppression. Le fils de l’homme
lutta, il joignit les mains et tomba accablé à genoux, sa volonté humaine livra
le difficile combat de surmonter le dégoût devant une race si ingrate envers
Dieu. Une sueur de sang coula tout le long de son corps jusqu’au sol et il dit
plusieurs fois :
—
Mon Père, est-il possible de
souffrir pour tous ces ingrats... O mon Père, que votre volonté se fasse si
cette coupe ne peut pas s’écarter de moi.
Il semblait crier, est-ce possible de supporter
une telle ingratitude ? Je vous prends à témoin de ce que j’endure. Regardant
autour, cherchant du secours dans sa détresse, prenant à témoin de ses
souffrances le ciel, la terre et les astres du ciel. Au même moment dans la
grotte il fit plus clair comme si la lune et les étoiles s’étaient rapprochées,
et Jésus cria de douleur. Les trois apôtres se réveillèrent et voulurent le
rejoindre. Pierre dit à Jacob et Jean :
—
Restez, je vais
aller à lui.
Il entra vite dans la grotte et dit :
—
Qu’avez-vous
maître ?
Il vit Jésus terrorisé et en sang qui ne
semblait pas faire attention à lui et ne répondait pas. Pierre revint dire que
le seigneur n’arrêtait pas de gémir. Alors ils se couvrirent la tête et prièrent
assis avec tristesse et larmes.
Légions du mal | visions
Quand satan se montrait, il empruntait pour
chaque péché des têtes d’animaux de renard, loup, dragon, serpent, tigre et
même homme noir, pour marquer l’abomination du péché avec les
démons. Ceux-là entraînaient les hommes par multitude et les déchiraient devant
le seigneur qui voulait subir le douloureux chemin de la croix pour leur
délivrance. Souvent ensuite satan emprunta la forme d’un serpent ayant un
serre-tête sur la tête qui lacérait de sa queue ceux qu’il renversait, et
envoyait ses légions avec leurs outils de destruction. Certains semblaient
aveugles, ils se frappaient entre eux et revenaient avec furie écraser le
seigneur d’injures et de malédictions. Ils frappaient sans relâche, le
transperçant de glaives ou de pieux comme des batteurs de grain dans une
aire immense en rage contre le grain de blé céleste tombé sur terre pour y
mourir et nourrir tous les hommes du pain de vie éternelle. Jésus chancela sous
leurs coups, il tombait, mais se relevait chaque fois. Ces légions d’enragés
étaient de ceux qui maltraiteraient son corps saint et saint-sacrement
dans
l’avenir par toutes sortes de déviances - des
aveugles, infirmes, sourds, muets, et même des enfants qui ne voulaient pas
regarder la vérité, qui refusaient de marcher dans la vérité, qui n’écoutaient
pas ses avertissements face aux menaces, qui ne voulaient pas combattre par la
Parole ; des enfants perdus à
cause de parents mondains ou maîtres oublieux de Dieu, nourris de convoitises
terrestres, ivres de vanité, dégoûtés aux choses célestes ou ayant grandi loin
d’elles et devenus incapables d’y goûter. Parmi eux beaucoup d’enfants de choeur
mal élevés, irrespectueux, qui n’honoraient pas le saint dans les cérémonies où
ils prenaient part : ces fautes retomberont en partie sur la négligence des
maîtres et des administrateurs d’église. Beaucoup de prêtres, certains même qui
se considéraient pleins de foi et piété le maltraitaient au saint-sacrement,
beaucoup ne le prenaient pas à coeur, d’autres étaient négligents ;
l’autel, le tabernacle, la coupe, l’ostensoir, les vases, les ornements et ce
qui sert de parure à la maison du roi du ciel et de la terre, tout était laissé
à la saleté et la poussière par indifférence. L’inhospitalité des hommes
l’attrista. Le seigneur allait se donner à eux sans se plaindre du verre sale,
de l’eau ou du vin souillés, des fidèles qui laissaient la crasse dans le
tabernacle de leur coeur. Et ces administrateurs d’églises insensés qui
s’empressaient aux projets ambitieux pour contenter les caprices des grands du
monde, tandis que le roi du ciel et de la terre était couché devant la porte
comme le pauvre Lazare, souhaitant les miettes que la charité ne donnait pas.
Les chiens seuls léchaient ses plaies faites par nos mains, pécheurs qui
retombent dans le péché comme le chien retourne à son vomi. Un an ne suffirait
pas pour rapporter les adversités qu’on faisait sur le corps de Jésus et au
saint-sacrement. Les membres de l’assemblée qui se réuniraient après son
sacrifice, se sépareraient, s’isoleraient, et se disperseraient. Il les regarda
tendrement dans ses visions et pleura de les avoir perdus. Ceux qui s’écartaient
de l’assemblée replongeaient dans les faussetés, sensibles au serpent qui les
agitait ; des peuples entiers furent arrachés de son sein, privés de
participer aux grâces de l’assemblée. Déchiré en mille et laissé aux angoisses,
Jésus sentit le poison dissocier l’arbre de ses branches et ses fruits, et
toutes dissociations jusqu’à la fin des temps quand le blé sera placé dans les
greniers et la paille dans le feu. Mon-fiancé céleste plaça gracieusement la
main sur le coeur par ces mots :
—
Nul n’a encore vu cela, et ton
coeur serait brisé de douleur si je ne le soutenais pas.
Fin des visions
infernales | visions
De grosses gouttes de sang coulaient sur son
visage. Jésus sortit de la grotte écrasé d’une lourde charge, l’âme profondément
blessée. Les trois apôtres s’étaient assoupis assis sur leurs genoux, tête
couverte comme en deuil, vaincus de tristesse et de fatigue. Jésus gémit. Ils se
réveillèrent à son approche, mais sous le clair de lune ils ne reconnurent pas
son visage défiguré couvert de sang et ses cheveux désordonnés. Le seigneur
joignit ses mains et ils se levèrent aussitôt le soutenir avec affection.
Il leur annonça sa mise à mort pour le
lendemain, qu’il serait pris dans une heure pour être emmené dans un tribunal où
il sera insulté et calomnié, puis il sera fouetté et livré à une mort cruelle.
Il ne leur parla que quelques minutes. Ils ne répondirent pas, ne sachant pas
quoi dire tant sa figure et son discours étaient graves, peut-être délirait-il ?
Il leur demanda de consoler sa mère ainsi que Marie-Magdala.
23 h 15 Le
seigneur voulut retourner dans la grotte, mais trop faible pour avancer, Jean et
Jacob l’emmenèrent et revinrent ensuite. À ce moment-là les huit apôtres, ayant
regagné les cabanes de Getsemaneh après avoir cherché un endroit où se cacher,
finirent par s’endormir découragés, perturbés de tentations. Les autres
disciples ayant d’abord vaqué d’un côté et d’autres, la plupart se retirèrent à
Bethphagé lorsqu’ils eurent connaissance des prophéties de Jésus. Lors de ses
agonies, sa dévote mère perdit conscience plusieurs fois après avoir vu de ces
choses, la tristesse et l’angoisse la firent plier en deux à genoux sur une
pierre du jardin de Marie la mère de Marc, avec Marie et Marie-Magdala.
Marie-Magdala aussi était sensible aux souffrances de notre-seigneur, c’est
pourquoi il la recommanda aux disciples, il vit qu’elle souffrirait beaucoup
pour lui et qu’elle ne l’offenserait plus. De nouveau dans la grotte, luttant
sans relâche contre la répugnance des penchants humains, épuisé de fatigue Jésus
pria :
—
Mon Père, éloigne de moi cette
coupe si c’est ta volonté, mais que ta volonté se fasse non la
mienne.
Nos patriarches | visions
L’abîme s’ouvrit. Les premières marches du
purgatoire se montrèrent au bout d’un lumineux tunnel. Jésus vit Adam et Ève,
tous les patriarches avec les prophètes, les justes, les parents de sa mère et
Jean le baptiste qui attendaient sa venue dans le monde d’en-bas. Son coeur
se fortifia à leur vue, car sa mort allait tirer ces captifs de la prison, et
leur ouvrir le ciel. Jésus vit tous ces saints de l’ancien monde avec un regard
de consolation et d’affection. Les anges lui montrèrent aussi les bienheureux
qui avaient joint leur combat au sien et s’unirent au Père céleste par les
mérites de son sacrifice litt. Passion. Ils passèrent
en foule devant lui investis de leurs actions et souffrances par ordre de date,
de classe et dignité, apôtres, disciples, vierges et dévotes, martyrs,
confesseurs, ermites, papes, évêques et religieux, en grandes troupes. Toute
l’armée des bienheureux se présenta à ses yeux. Jésus vit la sanctification
libératrice jaillir en flots continus de la source ouverte par son crucifiement.
Sur leur tête des couronnes de victoire formées de fleurs, dont les couleurs,
les odeurs et vertus variaient selon les souffrances du combat qui leur avaient
valu la victoire éternelle par leur union aux mérites de Jésus. Ces bienheureux
exerçaient les uns sur les autres une influence réciproque qui puisait dans
l’unique source du corps et saint-sacrement du sacrifice de Jésus. Tout en eux
formait une unité harmonieuse, travaux, martyr, victoire, vêtement, aspect. Bien
que diversifiée, cette unité travaillait dans les rayons de l’unique soleil de
son sacrifice et de sa parole faite corps qui éclaire les ténèbres, vie et
lumière des hommes. Lorsque la communauté des saints passa devant Jésus, il se
trouvait placé entre l’attente espérée des patriarches et la victoire à venir
des bienheureux. Entouré de ces deux groupes comme une couronne de victoire,
Jésus retrouva force et consolation. Ces visions de l’avenir planaient à une
certaine hauteur, et quand ces consolations disparurent un grand nombre d’anges
lui montrèrent son sacrifice très proche, tout près du sol.
Crucifiement | visions
Des scènes apparurent clairement devant lui
depuis le baiser de Judas jusqu’à ses dernières paroles sur le bois dans les
moindres détails, Judas, fuite des disciples, Ananus, Caïphe, Pilate, Hérode,
condamnation, couronne d’épines, portage de la croix, mère, bourreaux,
Véronique, mis en croix, coup de lance. Jésus vit tout, entendit tout et perçut
toutes les âmes, de son propre gré il accepta tout par sacrifice d’amour pour
les humains. Il pria pour qu’un état de nudité totale lui soit épargné et il lui
fut accordé d’avoir les reins ceints. À la fin des visions de souffrance, quand
les anges disparurent, Jésus tomba comme mort. Les sueurs de sang abondèrent et
imprégnèrent son vêtement. La grotte était encore dans l’obscurité lorsqu’un
grand ange ayant une longue robe bordée de franges vint vers Jésus, il apportait
dans ses mains une petite coupe de lumière rougeâtre et une petite fève sans que
ses pieds touchent sol. L’ange tendit sa main droite au seigneur et Jésus se
releva. Il mit cette nourriture à sa bouche et lui fit boire la coupe lumineuse,
puis il disparut. Jésus reçut une nouvelle force. Il resta quelques minutes
plongé dans une paisible méditation et rendit grâces à son Père céleste. Il fut
réconforté. Il revint sans chanceler vers les disciples, essuya son visage avec
un linge et remit de l’ordre dans ses cheveux humides de sueur de
sang.
Depuis déjà longtemps quelques sadducéens rusés
incitaient Judas à trahir, il s’était alors mis en relation avec quelques
pharisiens, fatigué de la vie errante et persécution d’apôtre. Ces derniers mois
il n’avait pas arrêté de voler les aumônes dont il était le dépositaire et son
avidité poussa plus quand il s’indigna que
Marie-Magdala verse un parfum d’aussi grande valeur. Il avait rêvé d’un
empire temporel où il aurait un emploi avantageux, mais ne voyant rien venir il
chercha qu’à s’amasser du capital et se mettre sous la protection des forts
de ce
monde face aux persécutions et difficultés
croissantes, et l’autorité du grand cohen lui fit impression. Récemment encore
ils vinrent à différentes reprises le trouver à Béthanie et ces derniers jours
Judas avait multiplié les démarches pour décider les chefs-sacrificateurs à
agir, et le sanhédrin fut intéressé à sa proposition. Voulant se rendre agréable
aux pharisiens et recevoir la récompense promise en livrant Jésus, Judas ne
pensait pas que la conséquence serait la condamnation de Jésus, ses pensées
n’allaient pas jusque là, seul l’argent le préoccupait. Encore malintentionné
malgré avoir reçu de Jésus le pain et le vin, satan s’empara de lui pour
accomplir son forfait. Car satan soulevait d’un côté la haine parmi les ennemis
de Jésus, de l’autre il dit à
plusieurs que Judas n’était qu’un misérable, et encore qu’on ne pourrait pas
rendre un jugement avant la fête ni réunir un nombre suffisant de témoins contre
Jésus. Autant satan poussait les juifs qui détestaient Jésus à vouloir sa mort,
autant il craignait la mort d’une innocente victime qui ne se dérobait pas à ses
persécuteurs. Aussi chacun mit en avant une différente proposition et on demanda
à Judas :
—
Pourrions-nous le prendre ?
N’a-t-il pas des hommes armés avec lui ?
—
Il est seul avec onze disciples
peureux et lui-même est découragé.
Judas leur dit qu’il fallait prendre Jésus
maintenant ou jamais, car il ne pourrait leur livrer une autre fois vu qu’il ne
retournerait peut-être plus vers lui. Il leur dit que s’ils ne le prenaient pas
maintenant Jésus viendrait se faire roi avec une armée de partisans. Cet
argument fit effet et on s’accorda à son avis. Il reçut trente pièces d’argent
comme prix de sa trahison. Voyant alors dans leurs manières du mépris à son
égard, Judas poussa l’orgueil en proposant de remettre cet argent au Temple et
passer pour un homme désintéressé mais ils refusèrent car le prix du sang ne
pouvait pas être offert au Temple. Quand Judas vit leur mépris envers lui, il
eut un sentiment de trahison qui lui donna un profond goût amer, sans pouvoir se
rétracter, mais ils ne le laissèrent pas repartir sans indiquer le chemin à
suivre pour prendre Jésus, accompagné de trois pharisiens. Judas dit que Jésus
n’était plus dans la salle à manger, mais sûrement au mont des oliviers où il
avait l’habitude de prier. Il demanda de
n’envoyer avec lui qu’une petite troupe de peur que les disciples
s’aperçoivent de quelque chose et soulèvent une sédition. Trois cents hommes
devaient se poster à Ophel, au sud du Temple, en cas de renfort, car le petit
peuple d’Ophel était des partisans de Jésus, dit-il. Il dit aussi de prendre
garde que Jésus s’échappe par des moyens mystérieux et recommandait de
l’attacher à une chaîne qu’il ne pourrait briser par des moyens magiques. Les
juifs eurent du dédain et répondirent :
—
N’en impose pas. Nous ne le
laisserons pas s’échapper si nous le tenons.
Judas fut vexé de leur dédain, mais ne se
repentit pas, car il s’était donné à satan (par l’argent).
Ils donnèrent
l’impression de s’accorder avec lui mais ils agissaient à son vis-à-vis comme un
traître à qui on ne se fie pas, qu’on repousse après s’être servi. Les soldats
avaient reçu l’ordre de le surveiller de près et ne pas le laisser aller
jusqu’à ce que Jésus soit amené ; parce qu’il avait reçu son prix d’avance, ils
craignaient qu’il parte avec l’argent sans prendre Jésus. La troupe de vingt
soldats qui accompagnerait Judas était de la garde du Temple sous les ordres
d’Ananus et de Caïphe. Leur tenue ressemblait à celle des soldats romains,
seule la barbe différait car les romains ne la portent qu’aux joues. Tous
étaient armés d’épées et de quelques piques, portant des torches et lanternes sur bâton, mais ils n’en
allumèrent qu’une. La plus grande partie des gardes resta à Ophel en cas de
soulèvement en faveur de Jésus. Judas partit avec vingt (20) soldats, suivis de
quatre (4) mercenaires apportant des cordes et des chaînes, derrière eux les six
(6) agents pharisiens en relation avec
Judas, un (1) sacrificateur proche d’Ananus, un (1) partisan de Caïphe, deux (2)
pharisiens et deux (2) sadducéens ennemis acharnés du seigneur.
3
Arrivés à la porte de la vallée de Josaphat,
les soldats prirent un autre ton et devinrent rudes avec Judas. Jésus et les
trois apôtres marchaient sur le chemin qui sépare Getsemaneh du jardin des
oliviers tandis que Judas se trouvait à vingt pas d’eux à l’entrée du
chemin. Il voulut aborder Jésus seul, mais les soldats du Temple lui dirent :
—
Pas ainsi camarade, tu n’échapperas
pas tant que nous n’avons pas le galiléen.
Quand Jésus et les apôtres virent le groupe
armé, Pierre voulut les affronter par la force et dit :
—
Seigneur, attaquons les
mercenaires, les huit sont tout près d’ici.
Jésus lui dit de rester tranquille et il se mit
en arrière. Quatre apôtres venus du jardin de Getsemaneh demandèrent ce qui se
passait, c’était Jacob le-mineur, Philippe, Thomas, et Nathanael fils du vieux
Siméon, avec eux des disciples qui les avaient rejoints à Getsemaneh. D’autres
disciples aux aguets se tenaient prêts à fuir. Les gardes empêchèrent Judas de
leur parler. Jésus s’avança vers la troupe et leur dit à haute voix :
—
Qui cherchez-vous ?
—
Jésus de Nazareth, dit le soldat en
chef.
—
C’est moi.
Ils reculèrent à ces mots et tombèrent comme
pris de paralysie. Quand Judas voulut s’approcher, Jésus lui tendit la main et
dit :
—
Mon ami, qu’es-tu venu faire ici ?
Judas marmonna quelque chose sur une affaire.
Jésus dit qu’il aurait mieux valu pour lui de n’être jamais né. Pierre et les
autres encerclèrent Judas en le traitant de traître et de voleur. Judas se mit à
mentir et les mercenaires vinrent le défendre, ce qui témoigna contre lui. Les
soldats une fois debout s’approchèrent de Jésus en attendant le signe du
traître.
—
Qui cherchez-vous ? leur dit encore
Jésus.
—
Jésus de Nazareth,
dirent-ils.
—
Je vous l’ai déjà dit, c’est moi.
Si c’est moi que vous cherchez, laissez aller ceux-ci.
À ces mots les soldats tombèrent saisis de
convulsion. Jésus leur dit de se relever, ils furent terrorisés. Les apôtres
serraient Judas de près mais les gardes le dégagèrent en le sommant de donner le
signal prévu.
Judas vint vers Jésus, il lui donna un baiser
en disant :
—
Je te salue.
—
Tu trahis le fils de l’homme d’un
baiser Judas, dit Jésus.
Les soldats entourèrent Jésus et les
mercenaires se saisirent de lui. Les apôtres se jetèrent aussitôt sur les
soldats en criant :
—
Devons-nous frapper avec l’épée,
maître ?
Pierre prit l’épée et blessa l’oreille de
Malchus qui tomba, il était le valet du grand cohen. Bien qu’encore secoués de
leur chute, les soldats encerclaient Jésus sans quitter les mercenaires. Jésus
dit :
—
Pierre, remets ton épée dans
l’étui. Qui prend l’épée périra par l’épée. Penses-tu que je ne puisse prier mon
Père de m’envoyer plus de douze légions d’anges ? Ne dois-je plutôt pas
vider la coupe que mon Père m’a donnée à boire, comment l’écriture
s’accomplirait si ces choses ne se faisaient pas... Laisse-moi guérir cet homme.
Il toucha l’oreille de Malchus et pria, il le
guérit. Les disciples s’enfuirent dans toutes directions et les six pharisiens
calomnièrent Jésus :
—
Quel agent du diable. L’oreille a
paru blessée par ses sortilèges et ces mêmes sortilèges l’ont guérie.
—
Vous êtes venus avec des bâtons et
des pieux comme pour un assassin alors que j’ai enseigné dans le Temple tous les
jours parmi vous et vous n’avez pas mis la main sur moi. Voici votre heure,
l’heure du pouvoir des ténèbres est venue, leur dit Jésus.
—
Tu ne peux pas nous renverser avec
tes sortilèges, dirent-ils en donnant ordre de l’attacher.
—
Nous saurons mettre fin à tes
pratiques, dirent les autres.
Les quatre mercenaires ni les six pharisiens ne
furent renversés parce qu’ils étaient totalement sous les liens de satan, ainsi
que Judas près des soldats. Tous ceux qui furent renversés se convertirent, ce
fut signe de la conversion des soldats qui avaient encerclé Jésus sans vouloir
mettre la main sur lui. Après sa guérison Malchus se convertit aussi, mais
continua son service pour garder l’ordre, et dans les heures qui suivirent il
servit de messager à d’autres amis de Jésus et à sa dévote mère en leur
rapportant ce qui se passait. Alors que les pharisiens multipliaient moqueries
et insultes, les mercenaires attachèrent Jésus avec brutalité. De basse souche,
ces païens d’un teint brun rougeâtre étaient petits et robustes, très agiles,
n’ayant qu’une toile sur les reins et un haut sans manche. Ils serrèrent des
cordes neuves à ses bras, poignet droit sous coude gauche, lui mirent une
ceinture à pointes de fer, un collier de piquants rattaché à la ceinture par des
lanières croisées sur le torse, avec quatre longues cordes pour tirer à volonté.
D’autres torches furent allumées et ils se mirent en marche ; en avant dix des
vingt hommes de la garde du Temple, suivis des mercenaires, de Jésus, des
pharisiens et des dix autres soldats de la garde du Temple. Les pharisiens
donnèrent l’ordre d’arrêter Jean qui était à l’arrière, mais il s’enfuit en leur
laissant son manteau, n’ayant plus qu’un vêtement sans manche. Ce manteau dont
Jean se couvrait tête, cou et bras était une longue toile ordinaire aux juifs.
Les apôtres se tenaient à distance, dépassés et en sanglot. Jésus allait pieds
nus dans une longue robe de laine sans couture avec une autre par-dessus en plus
du sous-vêtement qui couvre la peau. Les juifs comme les disciples en général
couvrent leur peau d’un talith qui se composait de deux morceaux qui se joignent
aux épaules et ouverts aux côtés, ils couvraient leurs reins d’un sous-vêtement
fait de quatre morceaux. Ils traitaient Jésus comme un criminel, sans aucun ordre ni mandat.
Les mercenaires le frappèrent avec des cordes à noeuds à bétail et l’insultaient
pour flatter ces pharisiens. Jésus tomba deux fois sous leur brutalité. Ils
marchent vite et traverseront bientôt le pont du Cédron. Au milieu du pont ils
le poussèrent dans le torrent. Ses pieds se mirent à saigner suite aux coupures
des pierres et des épines, sans l’assistance divine cela aurait suffi à le tuer
; les cordes se détachèrent aux mains et il put protéger son visage des rochers.
L’impact de sa chute laissa une empreinte sur le rocher. Il but de l’eau au
Cédron selon l’écriture : Il boit au torrent en chemin, c’est pourquoi il
relèvera la tête.
Parole de
Iehvah à mon-seigneur : Assieds-toi à ma droite jusqu’à ce que je fasse de tes
ennemis ton marchepied. Iehvah étendra de Sion le sceptre de ta puissance pour
dominer au milieu de tes ennemis. Ton peuple est plein d’ardeur quand tu
rassembles ton armée avec des ornements sacrés. Du sein de l’aurore, ta jeunesse
vient à toi comme une rosée. Iehvah l’a juré et ne s’en repentira pas, tu es
sacrificateur pour toujours à la manière de Melchisédec. Le Seigneur à ta droite
brise des rois le jour de sa colère, Il exerce la justice parmi les nations,
tout est plein de cadavres, Il brise des têtes sur toute l’étendue du pays. Il
boit au torrent pendant la marche, c’est pourquoi il relèvera la tête.
(Psaumes 110)
23 h 45
Les mercenaires le remontèrent sur le pont au
bout de leurs cordes. Les six pharisiens le repoussaient de leurs bâtons en lui
disant :
—
Son annonciateur Jean le baptiste
ne lui a pas préparé un bon chemin ici.
—
J’envoie devant toi mon ange pour
te préparer le chemin ne s’applique pas ici.
—
Pourquoi ne ressuscite-t-il pas
Jean d’entre les morts pour lui préparer la voie.
À quelques minutes
de la porte du quartier Ophel situé sur le mont Sion où habitaient Ananus et
Caïphe, les soldats donnèrent le signal de renfort quand ils virent des gens et
une troupe de cinquante (50) avec des torches. Malchus et quelques soldats de la
garde se détachèrent du groupe et s’enfuirent vers le mont des oliviers. Siméon,
Nathanael et les huit apôtres partirent alerter les dévotes, la mère de Jésus,
Marthe, Marie-Magdala, Marie de Cléophas, Marie-Salomé, Marie mère de Marc,
Suzanne, Jeanne Chusa, Véronique et Salomé.
Au sud du Temple était Ophel, une colline
emmurée, Judas dit que les habitants d’Ophel pouvaient tenter quelque chose pour
le libérer car ils étaient en faveur de Jésus. Mais la plupart n’étaient que de
pauvres journaliers, porteurs d’eau ou de bois pour le Temple, et des maçons
blessés que Jésus avait guéris après le meurtre de Jean le baptiste.
Quand la communauté des croyants se distingua
des juifs, ils s’installèrent et aménagèrent leurs tentes et leurs cabanes dans
Ophel jusqu’au mont des oliviers. Étienne en faisait partie. Réveillés par les
soldats, les habitants d’Ophel sortirent pour voir ce qui se passait mais les
soldats les repoussèrent brutalement dans leurs maisons en disant :
—
Jésus votre faux prophète est
emmené prisonnier et sera mis en croix. Le grand cohen ne peut pas laisser ce
malfaiteur continuer le métier qu’il fait.
Ils commencèrent à gémir en courant de côté et
d’autre, certains même se jetèrent à genoux en criant en faveur de Jésus, les
bras tendus vers le ciel. Ils suivirent Jésus des yeux, disant :
—
Qui nous aidera...
—
Qui nous consolera et nous
guérira...
—
Rendez-nous cet homme.
La troupe s’arrêta un instant quand un soldat
ordonna aux mercenaires de relâcher un peu les liens. Un deuxième soldat apporta
de l’eau d’une fontaine voisine et Jésus le remercia en quelques mots et
prophétisa sur les sources d’eau vive. Cela raviva les railleries des
pharisiens. Ces deux soldats se convertirent avant sa crucifixion et
rejoignirent les disciples. Des gens du peuple, des racailles de dernier rang,
se joignaient aux soldats et se mettaient déjà à calomnier Jésus. Les soldats
passèrent une porte de la muraille et marchèrent jusqu’à la rue Millo, puis au
sud, et montèrent de grands escaliers avant d’arriver chez Ananus. Les
mercenaires frappaient Jésus, tombé sept fois sous la violence des coups. Pierre
et Jean suivaient de loin et vinrent chez des serviteurs d’Ananus que Jean
connaissait afin d’avoir accès à la salle du tribunal où serait conduit Jésus ;
ils furent vêtus de leur tenue pour les faire entrer au tribunal où se
trouvaient déjà les faux témoins. Les messagers officiels coururent à travers la
ville réveiller les anciens du peuple, des sadducéens, des hérodiens, scribes et
autres qui devaient prendre part au procès. Les apôtres allèrent avertir
Nicomède et Joseph d’Arimathie ainsi que d’autres membres du conseil bien
intentionnés, dont certains amis du seigneur que les pharisiens n’avaient pas
convoqués. À ce moment-là Judas vaquait parmi les débris et tas d’immondices qui
se trouvaient au bas des pentes du
sud de la ville.
4
Ceux que Jésus avait souvent confrontés, des
arrogants de Nazareth, Capharnaum, Thirza, Gabara, Jotapat, Siloh et autres
villes, se regroupèrent aux
pharisiens et sadducéens pour trouver des vauriens qui l’accuseraient
contre de l’argent, mais il n’y avait que d’anciens rancuniers. Ce regroupement
d’ennemis se composait de pécheurs non-repentis que Jésus refusa de guérir, de
pécheurs en rechute redevenus malades, de jeunes vaniteux qu’il n’avait pas
voulus comme disciples, de faux héritiers mécontents des biens donnés aux
pauvres, de débauchés repoussés par leurs anciens camarades convertis,
d’adultères séparés de leurs complices ramenés à la vertu, soit flatteurs, soit
instruments de satan ; tous ces juifs avec quelques principaux se mirent en
marche pour se présenter au palais de Caïphe et déposer leurs griefs.
Sous Ponce Pilate, cette nuit les souffrances
du seigneur commenceront, demain il sera crucifié, descendra aux enfers, sera
enseveli, ressuscitera le troisième jour, montera au ciel s’asseoir à droite de
notre Dieu et tout-puissant Père, et de là il jugera les morts et vivants, ainsi
soit-il.
Beaucoup d’hommes pieux amis de Jésus
tournaient ça et là se questionnant sur le mystère qui devait s’accomplir,
d’autres indécis quoique bien intentionnés furent ébranlés dans leur conviction
et cédèrent à la tentation. Ceux qui persévéraient étaient peu nombreux,
plusieurs avaient le coeur si touché devant la résignation du sauveur qu’ils se
retirèrent avec tristesse et silence.
5 |
6
24 h
Jésus se fit conduire au palais d’Ananus. Les soldats de la garde du
Temple le firent entrer avec les mercenaires dans une cour jusqu’à la salle où
siégeait Ananus et vingt-huit (28) conseillers placés sur une estrade.
La salle était pleine de soldats du Temple, de
juifs du peuple qui n’arrêtaient pas d’insulter Jésus, de domestiques d’Ananus
et les témoins qu’il avait rassemblés qui se rendront aussi chez le grand cohen
Caïphe.
Ananus |
tribunaux
Ananus avait cédé la fonction de grand cohen à
son beau-fils Caïphe, sa nouvelle charge maintenant était de prévenir
l’intégrité de la doctrine en amenant ceux qu’on accusait dans ce tribunal où il
siégeait avec ses membres et les chefs-sacrificateurs. Le visage baissé, les mains liées, rattaché par de longues
cordes aux mercenaires, le seigneur Jésus était debout silencieux devant Ananus.
Ce vieil homme maigre, la barbe peu fournie, imbu de lui-même, fit l’ignorant jusqu’à feindre l’étonnement que
Jésus soit le prisonnier annoncé.
—
Comment, c’est toi Jésus de
Nazareth... Où sont donc tes disciples, où est ton royaume... Il me semble que
les choses n’ont pas tourné comme tu le croyais. On a trouvé que c’était assez
d’insulter Dieu et les sacrificateurs, assez de ‘violations’ à shabat . Où sont tes disciples ? Parle donc
agitateur ! Séducteur ! N’as-tu pas mangé l’agneau de Pesah d’une
manière inhabituelle, en un temps et lieu que tu ne devais pas, veux-tu faire
une nouvelle doctrine ? Qui t’a donné le droit d’enseigner, où as-tu
étudié ? Parle. Quelle est ta doctrine qui met le trouble partout ?
Allons parle, quelle est ta doctrine ?
Jésus leva sa tête fatiguée et dit en regardant
Ananus :
—
J’ai parlé en public devant tous.
J’ai enseigné dans le Temple et les synagogues où s’assemblent les juifs, je
n’ai rien dit en secret. Pourquoi m’interroges-tu ? Demande ce que j’ai dit
à ceux qui m’ont entendu. Regarde autour de toi, ils savent ce que j’ai
dit.
Un mercenaire abject flatteur du grand cohen
frappa sa tête d’une main gantée de fer en disant :
—
Est-ce ainsi que tu réponds au
grand cohen.
Sous la force du coup Jésus tomba dans les
marches, son sang coula, il y eut un retentissement d’injures, de rires et de
murmures dans la salle. Ils relevèrent Jésus.
—
Si j’ai mal parlé, montre-moi en
quoi. Mais si j’ai bien parlé, pourquoi me frappes-tu ? dit-il avec
calme.
Ananus ordonna aux plaignants de déclarer ce
qu’ils avaient entendu. Il y eut alors une explosion de paroles confuses et
grossières :
—
Il a dit qu’il était roi, que Dieu
était son Père et que les pharisiens étaient adultères.
—
Il agite le peuple.
—
Il guérit le jour du shabat au nom
du diable.
—
Les gens d’Ophel l’ont appelé leur
sauveur et leur prophète.
—
Il se laisse appeler fils de Dieu.
Il se dit envoyé par Dieu.
—
Il crie malheur à Iérusalem, il
prédit la destruction de la ville.
—
Il n’observe pas les
jeûnes.
—
Il parcourt le pays avec une
nombreuse troupe.
—
Il mange avec des impurs, des
pécheurs et des publicains.
—
Il fait société avec les femmes de
mauvaise vie.
—
Tout à l’heure à la porte d’Ophel,
il a encore dit à un homme qui lui donnait à boire qu’il lui donnerait l’eau de
vie éternelle pour qu’il n’ait plus jamais soif : il séduit le peuple avec des
mots à double sens.
—
Il dilapide le bien
d’autrui.
—
Il débite toutes sortes de
mensonges sur son royaume.
Ils vinrent tous se plaindre à la fois et les
mercenaires le poussaient à répondre. Ananus et ses conseillers dirent :
—
C’est donc là ta doctrine, qu’as-tu
à répondre ?
—
C’est donc là ton enseignement
public, le pays en est plein, n’as-tu rien à dire ici ?
—
Roi, donne tes ordres ! Montre
ta mission, envoyé de Dieu !
Jésus chancelait sous les coups qu’il recevait
des mercenaires.
—
Qui es-tu, qui t’a envoyé ? dit
Ananus. Es-tu le fils d’un obscur charpentier ou bien es-tu Éli qui a été enlevé
sur un char de feu ! On dit que tu peux te rendre invisible, c’est vrai que
tu nous as souvent échappé. N’es-tu pas Malachie Malaqi dont tu
parles souvent pour te mettre en valeur ? On prétend que ce prophète n’a pas eu
de père, qu’il était un ange et qu’il n’est pas mort ; belle occasion pour
un fourbe de se faire passer pour lui. Quel roi es-tu donc, tu as dit que tu
étais plus que Salomon.
Ananus écrivit une série d’accusations qu’il
mit dans une calebasse creuse et soigneusement bouchée accrochée au bout d’un
roseau. Il présenta ce roseau à Jésus et dit :
—
Voilà le sceptre de ton royaume
avec tes titres de dignité et droits. Porte-les au grand cohen pour qu’il
reconnaisse ta mission et te traite selon ta dignité. Qu’on attache les mains de
ce roi, ordonna-t-il, et qu’on l’amène au grand cohen.
Caïphe |
tribunaux
Le palais de Caïphe était à trois cents pas de
celui d’Ananus, cependant les soldats du Temple passèrent difficilement au
travers de la foule, car les juifs s’agitaient en criant tout autour et Jésus
fut malmené parce que les plaignants disaient aux gens du peuple ce dont ils
l’accusaient. Des hommes du tribunal menaçaient ceux en faveur pour Jésus et
donnaient de l’argent aux plus violents
pour les faire venir dans la cour de Caïphe.
7
Le siège du grand
cohen occupait la plus haute place de l’extrade en demi-cercle où l’accusé était
placé au centre avec les soldats de la garde du Temple, les témoins se plaçaient
sur les côtés en arrière. Les trois portes du fond menaient dans une salle pour
les délibérations, ce tribunal avait aussi une prison de cachots souterrains.
Pierre et Jean y furent enfermés après la guérison du boiteux du Temple après
Shavouot litt.
Pentecôte. Le bâtiment et ses alentours étaient
éclairés aux torches et lampes, il y faisait aussi clair qu’en plein jour. Des
soldats et autres petits employés, témoins gagnés à prix d’argent, se pressaient
autour du feu d’une fosse creusée au sol, des femmes servaient un liquide rouge
et leur cuisaient des gâteaux contre de l’argent.
Caïphe était déjà assis ainsi que la plupart
autour de lui, les autres juges arrivaient progressivement. Les plaignants,
aussi des témoins, se tenaient à l’entrée alors que la foule se massait, retenue
par la force. Pierre et Jean passèrent dans la cour extérieure grâce à leur
tenue de messager.
Jean passa grâce à une connaissance dans la
seconde cour, la cour intérieure, mais on ferma la porte derrière lui à cause de
la foule. Pierre arriva à cette porte en même temps que Nicodème et Joseph qui
le firent entrer. Les deux apôtres remirent les tenues empruntées et se mêlèrent
à la foule entassée à l’entrée où on pouvait voir les juges, c’est-à-dire le
grand cohen, soixante-dix (70) membres du conseil, et les anciens, scribes et
fonctionnaires publics assis sur les côtés. Les soldats de la garde du Temple se
tenaient en deux rangs de l’extrade à la porte d’entrée. Caïphe portait un long
manteau rouge foncé à franges dorées, brodé de fleurs avec quelques plaques de
métal à l’avant, et une mitre ouverte à deux pans. Menaçant et grave, il était
là depuis quelque temps avec ses partisans membres du grand conseil,
s’impatientant, il courut à l’entrée demander pourquoi Jésus n’arrivait
pas.
8
Jésus passa près de Pierre et Jean en les
regardant sans tourner la tête afin de ne pas les trahir. Il fut accueilli dans
les injures et les cris et reçut aussi des coups. Caïphe dit d’emblée :
—
Voilà l’ennemi de Dieu qui nous
dérange dans cette nuit sacrée.
Après qu’on lui remit la calebasse, Caïphe,
plus hautain que le juge précédent, lui fit une série de questions, mais Jésus
gardait silence, yeux baissés, avec calme et patience. Les mercenaires le
bousculèrent brutalement, frappant sur ses mains et le piquant à la pointe de
leurs bâtons, mais il ne dit rien. Ils procédèrent alors à l’audition des
témoins des pharisiens et des sadducéens de toutes les régions du pays les plus
hostiles à Jésus.
—
Il guérit et chasse les démons par
le démon.
—
Il contrevient à shabat.
—
Il agite le peuple.
—
Il traite les pharisiens
d’adultères et race de vipères.
—
Il prédit la destruction de
Iérusalem.
—
Il fréquente des pêcheurs, des
publicains et des femmes de mauvaise vie.
—
Il parcourt le pays avec une
nombreuse troupe.
—
Il se fait appeler roi, prophète et
fils de Dieu.
—
Il parle toujours de son
royaume.
—
Il interdit le divorce. Malachie
2.16
—
Il a crié malheur à
Iérusalem.
—
Il s’appelle pain de vie.
—
Il enseigne des choses
ahurissantes, que quiconque ne mange pas sa chair et ne boit pas son sang ne
peut être sauvé.
La foule fit d’assourdissants tapages. Certains
témoins se contredisaient :
—
Il se donne pour roi, dit
l’un.
—
Non. Il se laisse appeler de ce
nom, mais il s’est enfui quand on a voulu le faire roi, dit l’autre.
—
Il dit qu’il est le fils de
Dieu.
—
Non. Il se nomme fils que parce
qu’il accomplit la volonté du Père.
Quelques-uns qui avaient été guéris disaient
que ses guérisons étaient de la sorcellerie parce qu’ils étaient retombés
malades. Plusieurs témoins qui l’accusaient de sorcellerie se contredirent sur
la guérison du paralytique à la piscine de Bethsaida. Caïphe répéta plusieurs
fois que la confusion des témoins était un effet de ses sortilèges. Les
pharisiens de la ville de Séphoris condamnèrent son enseignement sur le divorce.
Un jeune homme de Nazareth témoigna contre lui de l’avoir refusé comme disciple.
Ils l’accusèrent d’avoir innocenté la femme adultère dans le Temple et de s’en
prendre aux pharisiens. La comparution d’autres témoins apporta plus d’injures
que de faits et ils se disputaient entre eux.
—
Quel roi es-tu, montre ton pouvoir
? demandaient Caïphe et les membres du conseil sans arrêt:
—
Fais venir les légions d’anges
comme tu as dit au jardin des oliviers.
—
Où as-tu mis l’argent des fous et
des veuves que tu as trompés, tu as gaspillé des fortunes entières.
—
Parle devant le juge. Réponds.
Es-tu muet ?
—
Tu aurais mieux fait de te taire
devant le peuple et les troupeaux de femmes que tu as endoctrinés, tu parlais
beaucoup.
Certains le traitaient de bâtard tandis que
d’autres affirmaient que sa mère était une pieuse vierge du Temple qu’ils
avaient vue se fiancer à un homme craignant Dieu. Ils reprochèrent à Jésus et
ses disciples de ne pas sacrifier dans le Temple. En effet, Jésus et les apôtres
n’avaient apporté aucune victime au Temple excepté les agneaux du sacrifice de
Pesah, bien que Anne et Joseph de leur vivant sacrifiaient souvent pour Jésus,
mais les esséniens ne sacrifiaient pas non plus et n’étaient passibles d’aucune
pénalité. Certains se plaignirent qu’il avait mangé l’agneau de Pesah un jour
d’avance, ce qui était contraire à la loi, et qu’il avait aussi fait ce
changement l’année précédente. Cela souleva des cris injurieux de la foule.
Nicodème et Joseph d’Arimathie, parce que Jésus avait célébré Pesah dans une de
leur dépendance, expliquèrent que d’après d’anciens écrits, les galiléens
étaient autorisés de manger Pesah un jour plus tôt et que les sacrificateurs du
Temple s’étaient exécutés conformément à la règle ; Nicodème leur montra les
archives de ce droit accordé en raison du trop grand afflux au Temple, car les
cohanim ne pouvaient pas tout faire le même jour avant l’entrée du shabat, avant
le coucher du soleil. Les pharisiens reprirent l’audition des témoins et leurs
dépositions absurdes dont ces deux dépositions :
—
Jésus a dit je renverserai le
Temple construit par les hommes et j’en relèverai un nouveau en trois jours qui
ne sera pas fait de main d’homme.
—
Il veut construire un nouveau
Temple, dit l’autre. Et il a mangé Pesah dans un autre édifice parce qu’il veut
abolir l’ancien Temple.
—
Cet édifice est fait de main
d’homme, dit l’autre, par conséquent il ne peut pas s’agir de lui.
Ils n’étaient pas d’accord non plus. La
remarquable patience du seigneur Jésus face à ces dépositions haineuses et
contradictoires fit vive impression, des assistants se mirent à huer les témoins
malgré une retenue devant Caïphe. Le mutisme de Jésus indisposait, son silence
mettait mal à l’aise au point que dix (10) soldats de la garde s’en allèrent
sous prétexte de maladie. Ils dirent en passant à Pierre et Jean :
—
Ça soulève le coeur de voir le
galiléen se faire maltraiter sans dire un mot. Dites-nous où aller.
—
Si la vérité vous appelle
laissez-là vous conduire, le reste se fera tout seul, dirent les apôtres.
Menacés d’avoir quitté le tribunal pour
contester ce procès, ces soldats de la garde du Temple rencontrèrent d’autres
soldats qui les emmenèrent au sud de Sion vers les grottes où les apôtres
s’étaient réfugiés. Caïphe avec d’autres furent contrariés devant tant
d’inconsistances et de contradictions des témoins, Caïphe irrité se leva de son
siège et dit à Jésus :
—
N’as-tu rien à dire sur ce
témoignage ?
Jésus ne le regarda pas. Les mercenaires le
saisirent par les cheveux et lui assénèrent des coups de poing sous le menton.
Il chancela sans lever ses yeux vers le juge. Caïphe leva les mains et dit à
voix forte :
—
Je t’adjure par le Dieu vivant de
nous dire si tu es le messie fils de Dieu.
Grand silence. Encouragé par son Père, Jésus
dit avec dignité :
—
Tu l’as dit, je le suis. Je vous le
dis, vous verrez le fils de l’homme assis à droite de la majesté de Dieu venir
sur les nuées du ciel.
À ces mots, le ciel s’ouvrit, il resplendit de
lumière dans la présence du Père Dieu
tout-puissant au-dessus de lui. Les anges montaient vers son Trône avec
la prière des justes pour supplier en faveur de Jésus. L’Esprit saint dit de la part du Père et de Jésus :
—
Parce que je suis miséricordieux,
je souffrirais si je devais souffrir. Parce que je suis juste, j’ai pris chair
dans le fils afin que le fils de l’homme souffre pour les péchés de tous ceux-ci
que voici et les péchés du monde entier.
L’enfer sortit
soudainement des profondeurs au tribunal et la fureur
infernale entra dans Caïphe pour s’emparer de lui. Une boule de feu recrachée de
l’enfer avec de multiples formes en furie surgirent dans le tribunal, des chiens
noirs à longues griffes vinrent à la course et des ombres entrèrent en nombre
dans les assistants, ou se plaçaient sur leur tête ou l’épaule. Tous les juges
possédés se remplirent de rage. Inspiré par l’enfer Caïphe fendit son manteau de
son couteau et cria :
—
Il a blasphémé. Vous avez entendu
le blasphème, qu’est-il besoin de témoins, quelle est la sentence ?
—
Il mérite la mort, crièrent les
assistants en se levant.
—
Il mérite la mort.
Il y eut un semblant de triomphe des ténèbres
sur la lumière. Ceux qui n’étaient pas totalement réprouvés ressentirent de la
terreur à cette absurdité, ceux qui avaient encore une étincelle de bien se
couvrirent la tête et partirent avec ceux dont la conscience fut bouleversée.
Des esprits mauvais sortirent des tombes d’un côté de Sion, tandis que d’autres
se montrèrent près du Temple en traînant des chaînes de prisonniers :
démons ou âmes rattachés à certains lieux de la terre, par sa condamnation le
seigneur leur ouvrait la voie pour atteindre les purgatoires. Jean le vit et en
parlera plus tard. Le cohen dit aux mercenaires :
—
Je vous remets ce roi
blasphémateur, rendez-lui les honneurs qu’il mérite.
Il se retira alors dans la salle du fond avec
les membres du conseil. Jean se souvint de la pauvre mère et partit en hâte
comme si le seigneur lui-même l’envoyait. Pierre ne savait pas quoi faire mais
il ne put s’éloigner du maître.
9
Durant les auditions les mercenaires et autres
canailles lui avaient arraché les cheveux et la barbe, des gens de bien les
avaient recueillis avant de quitter.
Couvert de crachats, Jésus endura leurs coups de bâtons pointus sans
broncher. Ils laissèrent aller leur rage et enlevèrent sa robe, arrachant son
talith pour lui mettre une veste déchirée et une longue chaîne à bout pointu ;
puis ils jetèrent des ordures sur sa tête, lui rattachèrent les mains et
bandèrent ses yeux.
—
Dis-nous qui t’a frappé, grand
prophète, dirent-ils en le frappant.
Jésus soupira, il pria pour eux. Ils le
traînèrent sous les cris avec des coups de pied et de bâtons jusqu’à la salle où
se trouvait Caïphe, disant :
—
Que le roi de paille aille se
présenter au conseil avec les marques de respect qu’il a reçues.
Une resplendissante lumière était souvent
autour de lui depuis qu’il avait confirmé être fils de Dieu, elle n’eut pour
effet que de redoubler la rage de ces aveugles. Aussitôt rentrés dans la salle,
ils prirent un des torchons qui baignait dans un bac d’eau sale et le
promenèrent sur son visage, puis ils lui déversèrent le contenu du bac avec
coups et insultes, étant sous l’emprise désorganisée de démoniaques des
ténèbres.
10
Pierre et Jean souffrirent beaucoup à regarder
en silence les injures que leur maître endurait sans contester, ils n’avaient
plus la force de supporter plus longtemps et Jean partit rejoindre la mère du
seigneur et autres dévotes chez Marthe et Lazare, près de la porte de l’angle.
Pierre aimait trop Jésus pour s’éloigner. Ne pouvant plus se retenir, il pleura.
Voulant cacher ses larmes en présence d’une foule si hostile, il s’approcha du
feu près des soldats et des gens du peuple qui se racontaient comment avoir
ridiculisé Jésus et menaçaient de s’en prendre aux disciples aussi. Pierre resta
silencieux, mais la portière se rapprocha du feu et dit :
—
Tu es un des disciples du galiléen.
—
Femme, je ne le connais pas,
j’ignore ce que tu veux dire, dit Pierre de peur de se faire malmener par de
vulgaires gens.
Il s’éloigna de cette compagnie au moment où le
coq chanta. Comme il s’en allait, une autre servante le vit et dit à ceux à côté
d’elle :
—
Celui-ci était aussi avec Jésus de
Nazareth.
—
N’étais-tu pas un de ses disciples
? lui dirent-ils.
—
En vérité je n’étais pas son
disciple, je ne connais pas cet homme, dit-il apeuré.
Il passa vite de la cour intérieure à la cour
extérieure, il pleura, son chagrin pour notre-seigneur était si grand qu’il se
souvint à peine de ce qu’il venait de dire. Il vit alors de ses connaissances
regarder par-dessus le mur de la cour intérieure et voulut les avertir
du
danger. Il y avait beaucoup de gens dans la cour
extérieure et aussi des amis de Jésus, personne ne pouvait entrer dans la cour
intérieure mais on le laissa sortir ; il retrouva seize disciples que
l’inquiétude avait poussés à quitter les grottes du mont Hinnom. De ceux qui
avaient grimpé sur les murs entendre ce qui se passait, il y avait Bartélémi,
Nathanael, Saturnin, Judas Barsabas, Zachée, Manahem le jeune aveugle-né guéri,
et Siméon qui deviendra évêque de Iérusalem. Ils vinrent vers Pierre qui étant
si bouleversé leur dit seulement de se retirer à cause du danger pour eux. Aussi
ils retournèrent vers leurs retraites. Pierre prit un autre chemin mais sans
trouver de répit ; son attachement au maître le ramena dans la cour intérieure
de Caïphe. On lui permit d’entrer comme précédemment avec Nicodème et Joseph
d’Arimathie. Il revint près du tribunal et vit des gens de basse classe se
moquer de Jésus en paradant avec lui. Jésus le regarda et Pierre en fut saisi de
douleur et alla dans la cour en défaillant. D’autres encore parlaient de Jésus
avec des injures et quelqu’un lui dit :
—
Tu es aussi un de ses partisans,
ton accent laisse voir que tu es galiléen.
Pierre allait partir quand le frère de Malchus
arriva et lui dit :
—
N’est-ce pas toi que j’ai vu avec
eux qui as blessé mon frère à l’oreille au jardin des oliviers ?
Pierre perdit l’usage de la raison, dans son
anxiété il se mit à faire des serments et jurer qu’il ne connaissait pas cet
homme. Jésus au même moment se faisait emmener dans la prison de cette cour, il
se tourna avec douleur et compassion vers Pierre. Ses paroles lui revinrent en
force et il partit en courant au moment où le coq se remit à chanter, il avait
renié son maître quand celui-ci était persécuté et outragé par tous, victime de
juges injustes. Quand il fut dans la cour extérieure, hors d’haleine, il se
couvrit la tête de repentir et pleura. Maintenant il saurait dire qui il est et
ce dont il était coupable, il n’avait plus la crainte d’être interpellé par
personne.
11
La dévote mère connut les souffrances du fils,
elle tomba plus d’une fois et priait pour ses persécuteurs. Après que Caïphe
avait crié que Jésus méritait la mort, Jean partit dans la maison de la porte de
l’angle et rapporta ce qu’il avait entendu. Marie et des dévotes lui demandèrent
de les emmener près de Jésus. Jean passa par les rues éclairées sous la lune
mais leurs sanglots attirèrent l’attention et elles entendirent des paroles
injurieuses contre Jésus par ceux qui retournaient chez eux. À proximité du
palais de Caïphe, elles virent les ouvriers de Caïphe en train préparer le bois
de la croix se plaindre que Jésus les faisait travailler de nuit sous les lueurs
des torches. Des ordres furent donnés de préparer sa croix dès qu’il serait pris
et d’exécuter sa condamnation aussitôt après le jugement de Pilate, car ils
avaient prévu emmener Jésus très tôt au matin et que ce ne serait pas long. La
dévote Marie pria pour ces aveugles qui préparaient le sacrifice de l’agneau
expiatoire. Les ouvriers se firent apporter d’autre bois parce qu’il se fendait
ou ne convenait pas jusqu’à ce que tout soit fait comme Dieu le voulait ;
les anges les faisaient recommencer tant que cela n’était fait comme marqué. Les
romains avaient déjà fait les croix des deux bandits. Jean et les dévotes
s’arrêtèrent à la porte de la prison. La porte de la cour s’ouvrit et Pierre
sortit précipitamment avec d’autres, et à la vue de la mère de Jésus sa
conscience se réveilla.
—
Simon, que devient mon fils Jésus ?
lui dit Marie.
Il ne pouvait soutenir son regard. Marie vint à
lui et dit avec tristesse :
—
Simon fils de Jean, tu ne réponds
pas ?
—
O mère, dit Pierre en larmes, ils
l’ont condamné à mort et j’ai honte de l’avoir renié trois fois.
Jean voulut s’approcher mais Pierre s’enfuit
vers le mont des oliviers dans la grotte où les mains de Jésus s’étaient
imprimées, là où notre père Adam s’était lamenté lorsqu’il vint sur la terre.
Frappée par l’aveu de l’apôtre qui avait le premier reconnu le fils du Dieu
vivant, Marie s’affaissa près de la porte, sa main s’imprima sur la pierre. Jean
amena les dévotes près du cachot. Leur tristesse se fit aussi remarquer et elles
entendirent :
—
N’est-ce pas la mère du galiléen ?
Son fils sera sûrement crucifié.
En traversant le tribunal de Caïphe, la dévote
mère perdit connaissance là où Jésus avait affirmé être le fils de Dieu et en
retour ils avaient exigé sa mise à mort.
12
Jésus fut enfermé avec deux mercenaires dans un
cachot voûté qui subsiste encore en partie. Il demanda au Père céleste de bien
vouloir accepter que les mauvais traitements qu’il avait subis et ceux qu’il
allait subir servent de sacrifice
expiatoire àces mercenaires et
auxhommes coupables de colère
et d’impatience dans de pareils tourments. Ils l’attachèrent debout à une
colonne sans pouvoir s’appuyer, il se tenait péniblement sur ses pieds blessés.
On ne pourrait rapporter tout ce que ces bourreaux ont fait souffrir au saint
des saints de bas coups et d’injures sans se plaindre, et ces mercenaires se
faisaient remplacer dès qu’ils étaient fatigués. C’est aussi à cause de moi que
tout cela s’est fait, et nous verrons quelle part chacun de nous a pris au
supplice du fils de Dieu au jour du jugement.
—
Seigneur, faites-moi mourir plutôt
que je vous offense encore.
Jésus dans son cachot n’arrêtait pas de prier
pour ses bourreaux, et dans un instant de répit, il fut entièrement enveloppé de
lumière.
4 h
Au lever du jour, il leva ses mains à la lumière naissante et pria son
Père à voix haute pour le remercier de ce jour que les patriarches avaient tant
attendu, et que lui-même avait attendu depuis sa venue sur terre. N’avait-il pas
dit à ses disciples : Luc 12.50, Éz. 36.25
—
Je dois être baptisé d’un autre
baptême et je suis dans l’impatience jusqu’à ce qu’il s’accomplisse.
Il le remerciait
pour ces souffrances qu’il subissait, ces douleurs m’appartiennent, prix de mes
péchés. Le jour qui allait assurer notre salut arriva, le but de sa vie
était de :
–faire la volonté de son Père ;
–faire jaillir de la source les bénédictions sur les humains ;
–vaincre l’enfer, et
–ouvrir le ciel.
Environné de clarté, Jésus salua le jour dans
une action de grâce d’amour et de miséricorde, il accueillit le premier rayon du
jour du sacrifice. Les mercenaires qui s’étaient un instant assoupis le
regardèrent avec étonnement, mais ne le dérangèrent pas. Jésus fut au cachot un
peu plus d’une heure.
Judas revint de la vallée de Hinnom et se
rendit au tribunal de Caïphe demander aux gardes du palais ce qui advenait du
galiléen :
—
Il a été condamné à mort, il sera
crucifié, dirent-ils.
Des gens parlaient de la patience de Jésus
devant les actions barbares qu’on lui faisait et du jugement qui allait avoir
lieu chez le grand conseil des sacrificateurs. Judas fut saisi d’un désespoir et
se retira en arrière, il s’enfuit comme Caïn et se retrouva devant la tente où
se faisait la croix, les différents morceaux étaient placés en ordre et les
ouvriers dormaient à côté. Il s’enfuit.
Grand conseil des
sacrificateurs | tribunaux
13
Caïphe, Ananus, anciens et scribes se
rassemblèrent au lever du jour dans le tribunal de Caïphe pour la condamnation à
mort, afin de se conformer à la règle de ne juger de nuit que pour instruction
préparatoire d’urgence. La plupart des membres du conseil avaient passé la nuit
chez Caïphe. L’assemblée du grand conseil des sacrificateurs
était nombreuse, les chefs-sacrificateurs et leurs partisans voulurent exclure
Nicodème, Joseph d’Arimathie et quelques autres qui demandaient de reporter le
jugement après la fête, ajoutant que tous les témoins s’étaient contredits. Ils
quittèrent le tribunal et se retirèrent dans le Temple. Caïphe fit amener Jésus
devant les juges, et qu’aussitôt après ce jugement il le fasse amener devant
Pilate. Les mercenaires forcèrent Jésus à coups de poing pour remettre sa robe
couverte d’ordures, il fut aussi brutalisé par les soldats en poste devant le
tribunal où il va être condamné. Jésus était défiguré suite aux mauvais
traitements, l’indulgence ne trouvait pas de place chez ces juifs au coeur dur
inspirés à d’autres cruautés encore.
—
Dis-nous si tu es le messie du
Seigneur, lui dit Caïphe
—
Si je vous le demande, vous ne
répondez pas. Si je vous le dis, vous ne croyez pas et ne me laissez pas aller.
Dorénavant le fils de l’homme sera assis à la droite de la puissance de Dieu.
—
Tu es donc le fils de Dieu ? dit-il
avec dédain.
—
Vous le dites, je le suis, dit
Jésus avec calme et gravité, la tête relevée.
—
Qu’avons-nous besoin de preuves,
nous l’avons entendu de sa propre bouche, crièrent-ils tous.
—
Misérable vagabond.
—
Mendiant de basse
extraction.
—
Il voudrait être leur messie et
s’asseoir à la droite de Dieu.
Tous parlaient de lui avec dérision. Ils lui
mirent la chaîne des condamnés et l’emmenèrent chez Pilate. Ils voulaient rendre
Jésus coupable envers l’empereur, ils envoyèrent un message au gouverneur de
juger un criminel, car ils ne pouvaient appliquer une condamnation à mort sans
son accord, sauf pour leurs observances religieuses et la sécurité du Temple.
Les chefs-sacrificateurs et une partie du
conseil partirent en avant, suivis du seigneur, des mercenaires et des soldats,
la foule fermait la marche. L’autre partie du conseil se rendit au Temple
s’occuper des cérémonies du jour, tous se dépêchaient pour la fête. Ils
partirent de Sion pour se rendre au palais de Pilate en basse-ville.
14
On entendit dire dans la foule :
—
On conduit le galiléen chez Pilate.
—
Le grand conseil l’a condamné à
mort.
—
Il doit être crucifié.
—
Ils l’ont durement maltraité, ils
ne le laisseront pas en vie.
—
Il est d’une patience qui confond.
Il ne répond pas, il dit seulement qu’il est le messie et qu’il siégera à la
droite de Dieu.
—
C’est pour ça qu’on le
crucifie ?!
—
S’il n’avait pas dit ça on n’aurait
pas pu le condamner à mort.
—
Le vaurien qui l’a vendu était son
disciple et avait mangé l’agneau un peu avant avec lui.
—
Je ne voudrais pas avoir pris part
à ça. Que le galiléen soit ce qu’il voudra, il n’aurait pas dû livrer son ami
pour de l’argent.
—
Ce misérable mériterait la potence.
Les trente pièces d’argent pesaient lourdement.
Judas partit redresser son tort et rejeter vite le prix de sa trahison face aux
hommes, sans demander pardon aux pieds de Jésus et mourir avec lui, sans
confesser le regret de sa faute devant Dieu. Il arriva au Temple où se
trouvaient les membres du conseil qui avaient pris part au jugement et leur
dit :
—
Reprenez l’argent avec lequel vous
m’avez entraîné à vous livrer un tsadiq juste. Je romps notre
pacte, reprenez votre argent et libérez Jésus. J’ai gravement péché d’avoir
livré le sang innocent.
Ils regardèrent Judas hautainement avec les
trente pièces d’argent dans sa main droite et cachèrent leurs mains pour ne pas
les souiller par le prix du sang, disant :
—
Que nous importe si tu as péché,
c’est ton affaire si tu penses avoir vendu le sang innocent. Nous savons ce que
nous avons payé, car nous l’avons trouvé coupable de mort. Tu as ton argent,
nous ne voulons plus en entendre parler.
Ses cheveux se dressèrent sur sa tête, Judas
jeta l’argent dans le Temple et s’enfuit vers la vallée d’Hinnom. Pour le
pousser au désespoir, satan lui rappela les malédictions des prophètes
prononcées sur cette vallée où les juifs avaient tué leurs enfants en les
offrant aux idoles. Qu’as-tu fait Caïn ? Où est ton frère Abel ? Son
sang crie vers moi. Sois maudit sur terre, errant et fugitif.Genèse 4.9
Ils sortiront et verront les cadavres de ceux qui ont péché contre moi, dont les
vers ne mourront pas et le feu ne s’éteindra pas. Esaie
66.24 Arrivé au torrent Cédron, à la vue du mont des oliviers, il
détourna son regard à ces mots : Qu’es-tu venu faire Judas mon ami ? C’est
par un baiser que tu trahis le fils de l’homme ? L’horreur pénétra jusqu’au
fond de son âme et il perdit la raison. L’ennemi murmura encore :
—
C’est ici que David a passé le
Cédron en fuyant Abshalom et qu’Abshalom mourut pendu à un arbre. David parlait
de toi quand il dit : Ils me rendent le mal contre le bien, la haine contre
l’amour ; que satan soit à sa droite quand on le jugera et qu’il soit condamné,
que ses jours soient raccourcis et qu’un autre prenne sa charge. Le Seigneur se
souviendra des fautes de ses pères, et le péché de sa mère ne sera pas effacé,
car il a persécuté sans pitié le pauvre, car il a livré l’affligé à la mort.
(Psaumes 109). Parce qu’il a aimé la malédiction, elle tombera sur lui, il est vêtu
de malédiction comme d’un vêtement et elle pénètre ses entrailles comme de l’eau et
sesos comme de l’huile : elle
est comme son vêtement, comme d’une ceinture dont il est toujours
ceint.
Accablé par des pensées terrifiantes, Judas
arriva au pied du mont des scandales où personne ne pouvait le voir dans un
endroit marécageux plein de débris et d’ordures, et satan lui dit :
—
Parce que tu l’as vendu maintenant
on le mène à la mort. Sais-tu ce
qu’il y a écrit dans la loi ? Celui qui vend l’âme d’un de ses frères
enfants d’Israel et en reçoit le prix doit mourir de mort. (Exode 21.16 ). Finis-en misérable, finis-en.
Judas fut désespéré et se pendit à un arbre,
ses entrailles se répandirent par terre.
15
Pour se rendre chez Pilate avec Jésus, les
membres du grand conseil passèrent par le quartier le plus fréquenté de la
ville, dans les rues bondées de juifs venus de tout le pays pour immoler
l’agneau sur l’autel du Temple, ainsi qu’une grande multitude d’étrangers venus
en cette occasion. Caïphe et Ananus en habit de fête marchaient en avant avec
ceux du grand conseil, en arrière ceux qui portaient les rouleaux d’écritures
suivis d’un grand nombre scribes, des faux témoins, les pharisiens surexcités
par la mise en accusation de Jésus et autres juifs. À courte distance suivait la
troupe de soldats suivie des mercenaires et Jésus avec les six hommes qui l’ont
arrêté.
Les gens affluaient de tous côtés, des groupes
s’empressaient de se joindre au cortège dans les injures et les cris. Ce cortège
longea le mont Sion jusqu’à Acra, quartier au nord-ouest du Temple.
Pilate |
tribunaux
Défiguré des coups de la veille, robe couverte
d’impuretés et mains ligotées, Jésus s’avançait dans les injures, la longue
chaîne à son cou se cognait contre ses genoux. Les mercenaires le bousculaient
sans cesse, leurs mauvais traitements étaient sans relâche. Beaucoup de gens
s’attroupèrent pour venger son entrée le dimanche des rameaux une semaine avant
Pesah, et jetaient sous ses pieds des chiffons
sales, des bouts de bois ou des pierres tout en se moquant. Cela soulevait le
coeur de voir comment les sacrés sacrificateurs de Dieu étaient devenus damnés
sacrificateurs de satan dans cette tempête déchaînée de l’enfer avec tout le
sanhédrin et leurs faux témoins. Les pharisiens postèrent leurs gardes tout
autour pour avoir la route libre et empêcher tout soulèvement, mais les
habitants d’Ophel laissèrent Jésus dans son malheur, leur foi chancela. Les
pharisiens se moquaient d’eux en disant :
—
Voilà votre roi, saluez-le.
—
Finis ses miracles, le grand cohen
a mis fin à ses sortilèges.
—
N’avez-vous rien à lui dire
maintenant qu’il va à son couronnement avant de monter sur son trône.
16|17
Quand le cortège
arriva au palais de Pilate, le sanhédrin se plaça à l’entrée du tribunal et
Jésus fut traîné vers l’escalier. Sur la terrasse, Pilate était couché sur un
lit de repos, les attributs de sa dignité étaient derrière lui sur une table, à
ses côtés officiers et soldats avec les insignes de l’état romain.
6 h
Les chefs-sacrificateurs et les juifs se tenaient à distance du tribunal
dans la limite qu’ils ne franchissent pas sous risque de souillure. À la vue de
Jésus, Pilate se leva et dit aux juifs :
—
Que venez-vous faire de si bonne
heure, comment avez-vous mis cet homme dans un tel état ? Commencez-vous si tôt
à écorcher vos victimes à immoler.
—
Amenez-le en avant du tribunal,
crièrent-ils aux bourreaux. Nous ne pouvons entrer dans le tribunal pour ne pas
devenir impurs, dirent-ils à Pilate, entendez nos plaintes contre ce scélérat.
—
Lui seul est pur parmi les juifs,
cria-t-on. Lui seul peut entrer comme les innocents massacrés ici.
L’homme qui criait se nommait Sadoch, il était
cousin d’Obed le mari de Séraphia Véronique. Deux de ses enfants furent du
nombre des innocents égorgés dans cette même cour par Hérode. Il avait renoncé
au monde, et lui et sa femme vivaient dans la continence comme les esséniens
et les
apôtres. Il avait entendu parler de Jésus chez
Lazare, et lorsqu’il le vit se faire traîner en bas de l’escalier du tribunal,
il témoigna de l’innocence du seigneur parce qu’un vif souvenir des enfants se
réveilla en lui, puis il se perdit dans la foule. Jésus gardait une dignité que
rien ne pouvait enlever, Pilate avait beaucoup entendu parler de lui et n’était
pas disposé à le condamner sans preuve.
—
De quoi accusez-vous cet homme ?
dit-il.
—
Nous ne vous l’aurions pas livré si
ce n’était pas un malfaiteur, dirent-ils avec humeur.
—
Jugez-le selon votre loi, dit
Pilate.
—
Nous n’avons qu’un droit restreint
lorsqu’il s’agit de la peine de mort, dirent les juifs.
Ils étaient pressés d’en finir avec Jésus pour
sacrifier l’agneau avant la fête - ignorant qu’il est le véritable agneau, et
présentèrent trois accusations ayant trente témoins comme crimes de lèse-majesté
que le gouverneur romain devait condamner : troubler la paix publique
et inciter à la révolte. Ils dirent également qu’il rassemblait beaucoup
d’hommes et guérissait le jour du shabat, une ‘violation’ du shabat.
—
Apparemment vous n’êtes pas malades, autrement ces guérisons ne vous mettraientpas en colère, dit Pilate.
Ils dirent de plus que Jésus enseignait au
peuple qu’on devait manger sa chair et boire son sang pour avoir la vie
éternelle. Pilate s’étonnait de leur obstination, il dit :
—
On croirait que vous voulez obtenir
la vie éternelle sans vouloir manger sa chair ni boire son sang.
Ils accusèrent Jésus de ne pas payer d’impôt à
l’empereur et Pilate leur dit avec fermeté :
—
C’est un mensonge, je dois savoir
cela mieux que vous.
—
Cet homme de basse extraction a dit
malheur à Iérusalem, ajoutèrent-ils. Il parle en parabole d’un roi qui prépare
les noces de son fils, mais il s’est caché quand la multitude a voulu le faire
roi. Ces derniers jours il a fait une entrée très bruyante dans Iérusalem et a
fait crier, hosanna fils de David, béni soit le règne de notre père David qui
vient. On lui fait honneur depuis qu’il enseigne qu’il est le messie du
Seigneur, le roi promis aux juifs.
Ces allégations furent appuyées par leurs
témoins. Comme les sacrificateurs le mettaient en infraction aux droits de
l’empereur, Pilate le fit amener dans une salle, car il n’ignorait pas que les
prophètes avaient longtemps annoncé le messie du Seigneur comme un roi
libérateur qui sauve et que beaucoup de juifs l’attendaient. Il savait aussi que
les rois d’orient étaient venus vers Hérode rendre hommage à un roi nouveau-né,
ce pour quoi Hérode avait fait égorger de nombreux enfants. Païen qu’il était il
ne croyait pas à ces traditions d’un messie roi des juifs, néanmoins il s’était
figuré un puissant roi victorieux comme les juifs instruits, aussi Pilate
regarda Jésus avec étonnement.
—
Tu es donc roi des juifs ?
—
Dis-tu cela de toi-même ou d’autres
te l’ont dit de moi ?
—
Suis-je juif pour m’occuper de
pareilles misères ? Par cela ton peuple et ses sacrificateurs t’ont livré à
moi comme méritant la mort, dit Pilate, dis-moi ce que tu as fait.
—
Mon
royaume n’est pas de ce monde. Si mon royaume était de ce monde j’aurais des
serviteurs qui combattraient pour m’empêcher de tomber aux
mains des juifs. Mais mon royaume n’est pas de ce monde.
—
Tu es donc roi, dit Pilate plus
sérieux.
—
Comme tu dis, répondit Jésus, je
suis roi. Je suis né et venu dans ce monde pour rendre témoignage de la vérité.
Qui est de la vérité entend ma voix.
—
La vérité, qu’est-ce que la vérité,
dit Pilate en se levant.
Pilate ne pouvait comprendre Jésus, mais il
voyait bien que ce roi ne pouvait pas nuire à l’empereur puisqu’il ne prétendait
à aucun royaume de ce monde, et l’empereur ne s’inquiétait pas des royaumes de
l’autre monde. Alors il cria du haut de la terrasse :
—
Je ne trouve aucun crime en cet
homme.
Il y eut un torrent d’accusations. Jésus resta
dans le silence et priait.
—
N’as-tu rien à répondre à ces
accusations ? lui dit Pilate.
Jésus ne répondit pas.
—
Je vois bien les mensonges qu’ils
font contre toi, dit Pilate.
—
Comment ne trouvez-vous pas de
crime en lui, dirent-ils avec insistance, n’est-ce pas un crime que de soulever
le peuple et répandre sa doctrine dans tout le pays depuis la Galilée jusqu’ici
?
—
Cet homme est galiléen et sujet
d’Hérode ? dit Pilate.
—
Oui, ses parents ont demeuré à
Nazareth, son logement actuel est à Capharnaum.
—
Puisqu’il est sujet d’Hérode,
amenez-lui. Il est ici pour la fête et peut le juger, dit Pilate.
Il se déroba à juger Jésus, il fit
reconduire Jésus et envoya un officier vers Hérode, désirant ainsi faire une
politesse à Hérode avec qui il s’était brouillé. Furieux de se faire renvoyer
devant tout le peuple, et forcés d’aller chez Hérode, la colère des juifs
retomba sur Jésus. Bien que le palais d’Hérode n’était pas loin, des soldats
romains joignirent le cortège par précaution.
18
Aux endroits où Jésus était tombé depuis
l’arrestation, et prenant les coups sans résister, Marie s’y arrêtait et
embrassait le sol ainsi que Marie-Magdala, puis Jean les relevait et les amenait
plus loin. La dévote mère rassembla en chemin ces inestimables dépositions du
fils pour les offrir au Père avec le sacrifice de son coeur, car Jésus était
maltraité et amené à mourir à cause des fautes dont il s’était chargé.
Marie-Magdala éleva son coeur comme un parfum d’encens envers le saint, mais un
abîme s’ouvrit entre elle et lui, partagée qu’elle était entre le dégoût d’un
peuple non reconnaissant et le devoir de l’amour sacré, et elle se jeta dans les
profondeurs du repentir. Jean conduisait pour la première fois la mère de son
maître sur ses pas dans le chemin de la croix, l’avenir lui apparut
alors.
19
Claudia Procle la femme de Pilate regardait
avec inquiétude le cortège emmener Jésus. Grande et pâle, cheveux rassemblés
autour de la tête et voile en arrière, elle portait des pendants d’oreilles, un
collier et une agrafe pour maintenir un long châle, elle vint voir Pilate pour
le supplier de ne faire aucun mal à Jésus, car elle avait eu la veille une
vision qui lui montra l’annonciation, l’adoration des bergers et des rois mages,
la prophétie du vieux Siméon et d’Anne, la fuite en Égypte, la tentation au
désert et tous les bienfaits de sa vie publique. Sous cette nouvelle lumière
elle vit son imperturbable patience et toutes les horreurs qu’il souffrirait.
Elle vit aussi le massacre des enfants tout près du palais. Elle fut bouleversée
sans pouvoir l’exprimer ni vraiment tout comprendre. Son mari lui
dit :
—
J’ai vu toute la malice des juifs
dans cette affaire. J’ai déclaré que je ne trouvais aucun crime en cet homme, je
ne le condamnerai pas.
Il lui remit un cachet en gage. Toutefois
Pilate était corrompu, il ne reculait devant rien s’il en trouvait du profit. Et
chaque fois qu’il se trouvait en position difficile, son embarras lui soulevait
des superstitions ridicules et il allait après ses idoles pour leur offrir de
l’encens dans un coin secret de la maison et demandant des signes ; tantôt
satan lui soufflait un plan, tantôt un autre pour l’amener dans la confusion. Il
pensa d’abord libérer Jésus qui était innocent, mais il eut peur que ses idoles
se vengent contre lui. Et s’il libérait Jésus, qui semblait être une sorte de
demi-dieu ou le dieu des juifs, se disait-il, il pourrait leur faire du tort,
car il y avait tant de prophéties sur un roi des juifs qui devait régner sur
tous. Et si c’est le roi que les mages d’Orient sont venus chercher ici, il
pourrait s’élever au-dessus de mes idoles et de mon empereur, j’aurais alors
grand tort s’il ne mourait pas. Les merveilleux songes de sa femme lui revirent
à l’esprit et il voulait être juste, mais il ne le pouvait pas. Il avait demandé
qu’est-ce que la vérité, mais il n’attendit pas la réponse. Pilate était dans
une grande confusion, il ne savait pas que la vérité, c’est Jésus de Nazareth,
le roi des juifs, c’est lui qui dit vrai.
Hérode | tribunaux
20
Le peuple vint en grande foule, du voisinage
d’Hérode jusqu’au marché. Un grand nombre de soldats romains furent postés aux
sections importantes et un groupe de soldats romains rejoint le cortège, la
plupart de ces soldats venaient d’une région située entre la Suisse et l’Italie.
Hérode était aussi gouverneur, son palais se trouvait dans une autre division de
la ville ; il attendit assis sur des coussins, dans une grande salle,
entouré de courtisans et de gens de guerre. Les chefs-sacrificateurs entrèrent
par les colonnades et se mirent sur les côtés, Jésus sur le seuil. Flatté que
Pilate lui reconnaisse le droit de juger un galiléen en présence des
sacrificateurs, Hérode se réjouit d’avoir ce Jésus qui l’avait toujours
dédaigné, et sa curiosité était vive depuis les déclarations de Jean sur Jésus
et des rapports faits sur lui. Il se préparait à faire un grand interrogatoire
devant ses courtisans et les chefs-sacrificateurs. Pilate lui fit savoir n’avoir
rien trouvé en cet homme ; il avait vu là un avis pour traiter les
accusateurs froidement. Il regarda Jésus avec curiosité, mais voyant son état
lamentable, le visage en sang et le vêtement sale, il eut autant pitié que de
dégoût et dit aux sacrificateurs :
—
Nettoyez-le. Comment pouvez-vous
amener un homme si sale et si meurtri en ma présence. On voit qu’il est tombé
dans les mains de bouchers. Commencez-vous les immolations avant le
temps ?
De l’eau fut apportée dans le vestibule et les
mercenaires essuyèrent Jésus, frottant brutalement son visage. Les
chefs-sacrificateurs refirent leurs accusations. Hérode dit à Jésus tout ce
qu’il savait de lui, il parla longuement et avec beaucoup d’emphase.
Il lui posa beaucoup de questions et lui
demanda de faire un prodige. Les yeux baissés, Jésus ne répondait pas, cela
déconcerta Hérode. Alors il chercha à le flatter :
—
Je suis peiné de voir peser sur toi
des accusations aussi graves. Sais-tu que tu m’as offensé à Thirza lorsque tu as
délivré sans ma permission des prisonniers que j’avais fait mettre là, mais tu
l’as peut-être fait dans une bonne intention. Maintenant que le gouverneur
romain t’envoie à moi pour te juger, qu’as-tu à répondre à toutes ces
accusations ? Tu gardes silence. On m’a beaucoup parlé de la sagesse de tes
discours et de tes enseignements, je voudrais t’entendre répondre à tes
accusateurs, que dis-tu ? Est-ce vrai que tu es le roi des juifs ? Es-tu le fils
de Dieu ? Qui es-tu ? On dit que tu as fait de grands miracles, fais-en
quelqu’un devant moi. Il dépend de moi de te faire relâcher. Est-il vrai que tu
as rendu la vue à des aveugles-nés, ressuscité Lazare d’entre les morts, nourri
des milliers d’hommes avec quelques pains... Pourquoi ne réponds-tu pas ?
Crois-moi, fais un de tes prodiges, cela te sera utile.
Jésus gardait silence.
—
Qui es-tu, qui t’a donné cette
puissance ? Pourquoi ne la possèdes-tu plus ? dit Hérode. Es-tu celui dont la
naissance est racontée de manière merveilleuse ? Des rois d’Orient sont venus
vers mon père pour voir un nouveau-né roi des juifs. Est-il vrai que cet enfant
c’était toi ? As-tu échappé à la mort donnée à tant d’enfants, comment se
fait-il, comment est-on resté si longtemps sans parler de toi ? Ou bien
t’attache-t-on cela que pour te faire roi. Réponds donc, quelle espèce de roi
es-tu ? En vérité, je ne vois rien de royal en toi. On dit qu’on t’a récemment
conduit en triomphe jusqu’au Temple, qu’est-ce que ça signifie ? Parle
donc, réponds-moi. D’où vient que les choses ont pris une telle tournure
?
Jésus ne lui parlait pas parce que cet Hérode
était devenu abominable par son mariage adultère avec Hérodiade la femme de son
frère et par le meurtre de Jean le baptiste. Ananus et Caïphe profitèrent du
mécontentement causé par son silence et répétèrent leurs accusations, ajoutant
que Jésus avait traité Hérode de renard et qu’il travaillait à rabaisser le
pouvoir de sa famille depuis longtemps, qu’il voulait établir une nouvelle
religion et avait célébré Pesah la veille. Bien qu’irrité Hérode ne resta pas
moins fidèle à ses vues politiques et ne voulut pas condamner Jésus. Il
éprouvait devant lui une terreur secrète et des remords au meurtre de Jean. Puis
il détestait ces chefs-sacrificateurs qui ne voulaient pas excuser son adultère
et l’avaient exclu des sacrifices. Hérode traita Jésus avec mépris, disant à ses
gardes :
—
Prenez cet insensé et rendez les
honneurs dus à ce roi. C’est plutôt un fou qu’un criminel.
Caïphe et Ananus essayèrent par tous les moyens
imaginables de le pousser à condamner Jésus mais Hérode leur dit de manière à
être entendu des romains :
—
Ce serait un crime de le condamner.
Il voulait dire, un crime envers Pilate qui a
eu la politesse de lui envoyer. Alors ils amenèrent Jésus dans la grande cour du
palais, Hérode les regarda quelque temps du haut du toit en terrasse. Les
chefs-sacrificateurs envoyèrent leurs gens dire aux pharisiens du quartier
d’Acra d’aller au palais de Pilate avec leurs partisans, et ceux-ci
donnèrent de l’argent à la foule pour réclamer la mise à mort de Jésus. Certains
firent des menaces s’ils n’obtenaient pas la mort de ce ‘blasphémateur’,
ajoutant que Jésus s’unirait aux romains contre les juifs, que c’était là le
royaume dont il avait parlé. Ils répandirent aussi la rumeur qu’Hérode avait
condamné Jésus, mais que le peuple devait publiquement déclarer sa volonté
; s’il était libéré, on craignait que les partisans de Jésus dérangent la fête à
l’aide des romains, lesquels feraient vengeance. Les pharisiens répandirent de
fausses rumeurs contradictoires pour susciter l’inquiétude et irriter le peuple.
Ils donnèrent aussi de l’argent aux soldats d’Hérode pour que Jésus soit
maltraité à mort, souhaitant ainsi qu’il perde vie avant que Pilate le relâche.
Les soldats d’Hérode vont battre Jésus de coups aussi durs et barbares que les
gardes juifs de Caïphe. Il y avait là deux cents (200) soldats et serviteurs de
différents pays ; chacun imaginait une nouvelle vexation contre lui, ils
s’inclinaient, poussaient, injuriaient, crachaient, frappaient son visage pour
n’avoir pas répondu à leur gouverneur, se moquant, jetant de la boue, le faisant
danser, le jetant par terre. Ils le traînèrent dans un canal qui entoure la cour
et sa tête cogna sur les colonnes et aux angles des murs. Ils le relevaient et
continuaient leurs insultes. Tous agissaient brutalement, se poussant entre eux
sous les huées, ceux qui avaient reçu l’argent des pharisiens frappaient Jésus à
coups de bâton, ils éclataient de rire quand la douleur lui arrachait des
gémissements. Sa tête était complètement ensanglantée, ces coups auraient été
fatals sans l’assistance des anges qui soignaient sa tête au-dessus de lui.
Les philistins de la carrière de Gaza avaient
été moins violents avec Samson quand ils l’ont torturé. Le seigneur tomba trois
fois sous leurs coups. Le temps les pressait. Dès que les chefs-sacrificateurs
surent que tout se ferait au palais de Pilate suivant leur intention, ils
sollicitèrent Hérode de nouveau et celui-ci renvoya Jésus à Pilate. Un serviteur
vint dire à Pilate que son maître lui renvoyait le célèbre galiléen, n’ayant vu
en lui qu’un fou et l’ayant traité comme tel. Pilate fut satisfait qu’Hérode
n’ait pas condamné Jésus. Ils redevinrent amis depuis l’écroulement de
l’aqueduc.
21
Ils passèrent par un chemin plus long, le temps
que leurs agents travaillent encore les masses. Le chemin était inégal et Jésus
tomba à différentes reprises dans la boue, il reçut encore des coups de pied et
des coups de bâton. Il pria Dieu de ne pas en mourir pour compléter ses
souffrances pour notre rachat.
8 h 15
Alors que le cortège arrivait au palais de Pilate, la foule s’était
regroupée entre gens de même pays que les pharisiens avaient suscité une
antipathie contre le seigneur, et avaient joint avec eux les plus vils et
pervers du peuple juif qui déclencheraient l’exemple d’injures grossières.
Pilate avait fait placer mille (1000) hommes aux entrées, Jésus arriva dans la
cour sous les huées. Les mercenaires lui firent monter l’escalier et il trébucha
sur son vêtement, les marches de marbre blanc se couvrirent de sang. Les
chefs-sacrificateurs riaient et les gens les imitaient avec les pharisiens. Il
fut relevé à coups de pied. Pilate s’avança sur la terrasse entouré d’officiers
et d’hommes portant des écritures, et dit aux plaignants :
—
Vous m’avez emmené cet homme accusé
d’agiter le peuple. Je l’ai interrogé devant vous et je ne l’ai pas trouvé
coupable de ce que vous l’accusez. Hérode n’a pas trouvé de crime non plus, je
vous ai envoyés vers lui et il n’a pas porté de sentence de mort. Je vais donc
le faire fouetter et le renvoyer.
Pilate leur demanda s’ils avaient besoin de verser plus de
sang innocent avec leurs immolations d’agneaux d’aujourd’hui. De
discordants murmures s’élevèrent et les pharisiens firent d’autres distributions
d’argent. C’était le temps d’après une ancienne coutume que le peuple se
présente avant de célébrer Pesah pour demander la libération d’un prisonnier,
c’est pourquoi les pharisiens avaient incité les gens de ne pas réclamer la
libération de Jésus.
—
Faites ce que vous avez toujours
fait pour la fête, cria-t-on à Pilate.
—
C’est la coutume de vous libérer un
prisonnier pour la fête. Qui voulez-vous que je libère, Barabbas ou Jésus le roi
des juifs, celui qu’on dit être le messie du seigneur, dit Pilate.
Pilate appelait Jésus roi des juifs parce qu’il
sentait bien que les chefs-sacrificateurs étaient envieux de cet innocent, qu’il
pouvait bien être ce roi miraculeux, ce messie promis aux juifs. Marie, Jean et
les dévotes se tenaient dans un coin, des regroupements de gens de Capharnaum
derrière elles faisaient semblant de ne pas les connaître devant un fils
vertueux si maltraité. Jésus se destinait au supplice de sa volonté d’homme,
dans le même état d’âme que les innocents avant leur mort, la dévote mère savait
aussi que sa mort était le moyen du salut des hommes. Barabbas était un scélérat
condamné pour meurtre dans une émeute et pour avoir éventré des femmes. Il y eut
quelques hésitations et des voix crièrent Barabbas, les chefs-sacrificateurs et
les pharisiens firent des menaces au peuple.
—
Lequel des deux dois-je vous
libérer ? cria Pilate.
—
Nous ne voulons pas celui-ci,
donnez-nous Barabbas, crièrent-ils.
—
Que dois-je donc faire de Jésus,
appelé le messie roi des juifs ? dit Pilate.
—
Qu’il soit crucifié, qu’il soit
crucifié, crièrent-ils avec force.
—
Je ne lui trouve pas de crime qui
mérite la mort, je vais le faire fouetter et remettre en liberté, dit Pilate.
—
Crucifiez-le, crucifiez-le,
criaient-ils.
Les membres du grand conseil des sacrificateurs
et les pharisiens criaient avec hystérie. Pilate condamna Jésus aux fouets et
libéra Barabbas.
22
Les juifs continuaient de crier, crucifiez-le
crucifiez-le, tandis que Pilate fit entendre plusieurs fois cette phrase qui
n’avait aucun sens, je ne trouve pas de crime en lui c’est pourquoi je vais le
faire fouetter et le remettre en liberté. Passant à travers d’une foule
furieuse, les mercenaires poussèrent Jésus jusqu’à la colonne des fouettements,
au nord du palais de Pilate, Jésus trembla à sa vue. Six bourreaux, d’anciens
esclaves des frontières d’Égypte, malfaiteurs condamnés aux travaux forcés,
vinrent avec de longues tiges et des cordes, ils avaient déjà fouetté des
condamnés jusqu’à mort. Ils lui donnaient des coups de poing sans motif. Il dut
retirer ses vêtements avec ses mains blessées, il fallut aussi retirer le linge
autour de ses reins. Détournez vos yeux de moi, pria-t-il sa mère. Jésus
embrassa la colonne. Les mercenaires l’attachèrent à un anneau de fer jusqu’à ce
que ses pieds ne touchent plus sol. Les deux premiers bourreaux avaient des
tiges de bois dur et se mirent à le fouetter de la tête aux pieds. Les coups
étaient terribles, il gémissait. On entendait crier ‘faites-le mourir,
crucifiez-le’, puis le son des fouets, les gémissements du messie, les injures
des bourreaux, le bêlement des agneaux se faisant laver dans la piscine des
brebis qui s’unissaient aux gémissements du seigneur. Le peuple se tenait à
une certaine distance, beaucoup allaient et venaient, passant en silence ou avec
des injures, il semblait qu’un rayon touchait ceux qui étaient émus. Des jeunes
gens préparaient de nouvelles tiges, d’autres partirent chercher des branches
d’épines. Les mercenaires du grand conseil donnèrent de l’argent pour apporter
aux bourreaux une cruche d’un épais liquide rouge qu’ils burent pour s’enivrer.
Ils furent remplacés après un quart d’heure. Le corps du seigneur était saisi de
tremblements convulsifs, son sang coulait jusqu’à terre, il était entièrement
couvert de bleus rouges et noirs.
Les deuxièmes bourreaux se jetèrent sur lui
dans une nouvelle rage avec des cannes épineuses terminées par des nœuds, la
peau de Jésus se déchira aussitôt, son sang rejaillit sur leurs bras. Il priait
et gémissait. Plusieurs étrangers sur des chameaux virent avec stupeur comment
il se faisait torturer, certains de ces voyageurs avaient reçu le baptême de
Jean et écouté les sermons de Jésus. Les troisièmes bourreaux qui vinrent les
remplacer avaient des cordes terminées par des crochets de fer. Chaque coup lui
arracha des morceaux de chair. Dans leur perversion, ils le mirent dos à la
colonne, cordé sous les bras et sous les genoux. Ils frappaient comme des chiens
enragés et l’un d’eux prit une tige souple pour lui lacérer le visage, son corps
se contractait de douleur. Il regarda ses bourreaux les yeux pleins de sang et
semblait demander grâce, mais ils redoublèrent de rage. Les gémissements se
firent plus faibles. Cela durait depuis trois quarts d’heure quand un étranger
de bas rang, de la parenté de Ctésiphon l’aveugle que Jésus guérit, se précipita
avec une lame tranchante et cria d’une voir indignée :
—
Arrêtez de frapper cet innocent à
mourir.
Il trancha les cordes qui le retenaient à la
colonne et repartit dans la foule. Les bourreaux ivres s’étaient arrêtés
étonnés, Jésus s’écroula sur le sol. Les bourreaux partirent boire et appelèrent
les valets qui avaient tressé la couronne d’épines avec des gants. Quelques
filles perdues s’arrêtèrent le regarder un instant avec dégoût. Il leva son
visage blessé vers elles, la douleur de ses blessures redoubla, il semblait leur
dire, vous-mêmes m’avez ainsi déchiré et vous vous moquez de moi.
Elles s’éloignèrent sous les rires des soldats
et des mercenaires. Des anges en pleurs entouraient Jésus, résolus que sa prière
monte vers le Père sous la grêle des coups qui tombaient sur lui durant le
fouettement. Baignant dans son sang, un ange lui présenta une chose lumineuse
qui lui rendit ses forces. Le ciel était couvert, il tombait un peu de grêle par
intervalle, à l’étonnement de tous. Le ciel s’éclaircira et le soleil brillera
vers midi. Les mercenaires vinrent donner des coups de pied et de bâton, ils
n’en avaient pas fini avec ce roi, disaient-ils. Jésus se traîna par terre pour
prendre sa ceinture et couvrir ses reins lacérés tandis qu’ils le poussaient du
pied. Ils jetèrent sa robe sur ses épaules avec laquelle il essuya le sang sur
son visage, puis ils le ramenèrent rapidement à la garde en passant devant les
chefs-sacrificateurs.
—
Qu’on le fasse mourir, qu’on le
fasse mourir, crièrent-ils.
Quand Jésus essuya le sang de ses yeux, il vit
sa mère tendre ses mains vers lui. Elle vit les traces de sang laissées sous ses
pieds quand il partit avec les mercenaires. Ils arrivèrent dans la cour
intérieure où se trouvaient des mercenaires, des esclaves et d’autres brutes,
tout le rebut de la population. Pilate fit venir du renfort à cause de
l’agitation.
23
La dévote mère portait une robe blanche, un
manteau de laine claire avec un voile blanc jauni ; depuis hier elle
tournait dans les rues de Iérusalem et dans la vallée de Josaphat. Plus grande
et forte, Marie-Magdala avait ses vêtements déchirés et tachés de boue, les
cheveux dénoués sous un voile en lambeaux ; ses anciennes passions, son
repentir, puis à présent cette intense douleur avaient détruit toute sa beauté,
elle ressemblait presque à une folle. Beaucoup de gens de Magdala et ses
environs qui l’avaient vue mener une vie mondaine la montraient du doigt et
l’insultaient, ils lui ont même jeté de la boue, mais elle ne s’aperçoit de
rien. La dévote mère souffrit ce qu’il souffrit au fouettement, Marie d’Héli sa
soeur aînée la soutenait, elle ressemble beaucoup à leur mère Anne, et sa fille
Marie de Cléophas était presque toujours à son bras. Tremblantes d’inquiétude,
les dévotes s’étaient approchées de Marie comme en attente de leur propre mort.
Quand Jésus s’effondra au pied de la colonne, Claudia la femme de Pilate fit
remettre de grandes pièces de tissu qui servirent à essuyer son sang : la
dévote mère et Marie-Magdala, avec vingt personnes bien intentionnées qui les
cachaient, s’en étaient chargées lorsque la foule se tournait d’un autre
côté.
9 h
Après avoir essuyé le sang de Jésus, la dévote mère avec ses amies se
retirèrent avec les linges sanglants
dans une petite maison. Aram et Themni neveux d’Arimathie avec les fils
de Siméon, d’Obed et de Véronique, s’occupaient du Temple dans l’attente
et l’anxiété.
24 | 25
|
26
Les juifs arrivaient continuellement en groupe
et tous les nouveaux groupes se faisaient aborder par les agents des
chefs-sacrificateurs pour les soulever contre Jésus, ainsi qu’il se fit entendre
lorsque le seigneur se fit conduire à la garde romaine :
—
Qu’on le tue, qu’on le tue.
Il y eut une pause parce que Pilate donnait des
ordres, puis il se retira consulter ses idoles. Les membres du grand conseil se
firent apporter à manger et à boire. La foule se pressait autour de l’édifice
cerné de soldats romains en rang. La couronne fut tressée avec des branches de
nerprun, de prunellier et d’épine blanche, elle avait 2 cm d’épaisseur et
15 cm de hauteur, les pointes tournées dedans, il y avait aussi des ronces sur
le bord. Le couronnement d’épines se fit près du palais de Pilate dans la cour
bordée de colonnes, au-dessus des prisons où cinquante (50) vauriens se
trouvaient en compagnie de valets de geôliers, de mercenaires, d’esclaves et
autres, qui allaient prendre part aux mauvais traitements que Jésus va subir.
Ils roulèrent d’abord une base de colonne au milieu de la cour et déposèrent des
morceaux de pots brisés avec des cailloux. Le seigneur fut encore dévêtu et
couvert d’un vieux manteau de soldat qui n’allait pas jusqu’aux genoux, ce
manteau était mis sur les criminels après leur fouettement pour éponger leur
sang ou par dérision. Les mercenaires le firent asseoir soudainement et lui
mirent la couronne autour du front sans encore l’enfoncer, puis ils frappèrent
sur la couronne avec un gros roseau épais.
Les épines entrèrent brutalement dans son crâne
et son visage fut aussitôt inondé de sang.
—
Salut roi des juifs, criaient-ils
en crachant sur lui.
Ils renversèrent son siège puis ils l’assirent
encore ainsi pendant une demi-heure. Jésus avait soif, sa chair était déchirée
jusqu’aux os et il grelottait de fièvre.
27
Il était méconnaissable. Quand il fut reconduit
à Pilate, marchant plié en deux, le peuple et les membres du conseil des
sacrificateurs l’insultèrent encore. Pilate en frémit et dit en s’appuyant sur
un officier :
—
Si le diable est aussi cruel que
les juifs il ne fait pas bon d’être en enfer.
Pilate le fit approcher pour que tout le monde
puisse le voir et il fut accueilli dans un horrible silence. La trompette
annonça que le gouverneur voulait parler, Pilate le montra du doigt en
disant :
—
Voilà l’homme... dit-il aux
chefs-sacrificateurs. Je le fais amener encore une fois devant vous pour que
vous sachiez que je ne le trouve coupable d’aucun crime.
—
Qu’on le fasse mourir, qu’on le
crucifie, criaient les gens du peuple.
Les chefs-sacrificateurs étaient furieux de
voir Jésus encore debout. Ayant su que Claudia était en sa faveur, les
pharisiens propagèrent la rumeur que la femme de Pilate s’est laissée séduire
par les partisans de Jésus et que tous les juifs seraient exterminés s’il était
remis en liberté parce qu’il s’unirait aux romains. Alors que les agneaux des
étrangers passaient se faire laver à la piscine des brebis, leurs bêlements
témoignèrent en faveur du nouvel agneau qui se révélait en silence pour
compléter les prophéties du sacrifice de ce saint jour. La trompette
sonna.
—
Je ne le trouve coupable d’aucun
crime, dit Pilate, prenez-le et crucifiez-le vous-mêmes.
—
Nous avons une règle, il doit
mourir parce qu’il s’est dit fils de Dieu, dit un sacrificateur.
Cette parole souleva les superstitions de
Pilate et il le prit à part pour savoir d’où il était. Jésus ne dit rien.
—
Tu ne me réponds pas, dit Pilate,
ne sais-tu pas que j’ai le pouvoir de te crucifier ou de te libérer ?
—
Tu n’as aucun pouvoir sur moi que
ce qui t’est donné d’en haut, dit Jésus. Et celui qui m’a livré à toi commet un
plus grand péché.
Pilate lui promit de le remettre en liberté
s’il répondait, il supplia Jésus de lui dire s’il était un dieu, s’il était ce
roi promis aux juifs, et jusqu’où s’étendait son royaume. Jésus lui dit avec
gravité que sa royauté et son royaume consistaient dans la vérité. Il
révéla à Pilate ses péchés cachés, ainsi que l’exil qui l’attendait, sa misère
prochaine et terrible fin, et que le fils de l’homme viendrait prononcer un
juste jugement sur lui. Mi-irrité, mi-effrayé, Pilate revint sur la terrasse et
dit qu’il voulait libérer Jésus.
—
Tu n’es pas l’ami de César si tu le
libères, celui qui veut se faire roi est l’ennemi de César, lui
cria-t-on.
—
Nous t’accuserons devant l’empereur
de troubler notre fête.
—
Il faut en finir, car nous devons
être à dix heures au Temple, disaient d’autres.
De nombreux démons se trouvaient dans la foule
et parlaient aux juifs, ils entraient par leur bouche et décuplaient leur
mépris ; tout ce qu’ils faisaient était contradiction, désordre, désespoir,
et confusion insensée. Toute la masse devint agitée et une insurrection était à
craindre. Le même cri retentit sur tous les toits où les gens étaient montés et
on entendit de tous les côtés :
—
Qu’il soit crucifié.
Le tumulte était effrayant devant la patience
immuable du seigneur Jésus. Les efforts de Pilate étaient inutiles devant
ces furieux, il se fit apporter de l’eau et quand le serviteur lui déversa sur
ses mains, il cria :
—
Je suis innocent du sang de ce
juste, ce sera à vous d’en répondre.
—
Que son sang soit sur nous et sur
nos enfants.
Dès que ce cri sortit de toutes les bouches du
peuple juif de toutes les régions d’Israel, le peuple fut encerclé de ténèbres
et un feu sombre s’abattit sur eux, certains totalement pénétrés, d’autres qu’en
surface. Ceux-là se convertiront après le crucifiement de Jésus. Ceux que la
malédiction pénétra dans la moelle des os atteignit les enfants dans le sein de
leur mère, Jésus le vit et pria par amour pour ses ennemis. Le seigneur
implorait leur conversion dans son moindre souffle, et la dévote mère ne cessait
de prier pour le salut des bourreaux, elle offrait ses larmes partout où Jésus
offrait son sang pour les péchés des hommes.
28
Beaucoup d’anges se réunirent près de lui,
ainsi que du petit nombre des croyants présents, leur visage comme leurs
vêtements différaient suivant qu’ils consolaient ou priaient, leur onction
lumière variait selon leur
miséricorde : différents rayons lumineux de couleurs sortaient de leur
bouche pour exprimer leurs consolations, aussi des écriteaux qu’ils portaient
dans leurs mains. Les flux intérieurs des âmes humaines se manifestaient par une
lumière ou une noirceur à différentes vitesses : tous les malveillants ont
collaboré aux souffrances du seigneur, tous les charitables et aimants ont
enduré avec lui, l’agneau de Dieu qui a pris tous les péchés du
monde.
29
Blessé dans son orgueil, Pilate devint furieux
que l’homme qu’il avait fait fouetter et qu’il pouvait faire crucifier lui
prédise une fin aussi misérable, et qu’il ose le citer à son tribunal au dernier
jour dans de telles circonstances. Quand les juifs le menacèrent de se plaindre
à l’empereur, la peur de l’empereur terrestre l’emporta, et il se dit, que meurt
avec lui ce qu’il sait de moi et ce qu’il m’a prédit. Pilate livrait Jésus aux
juifs, mais il devra répondre comme juge inique, car il l’appelle juste et
répand son sang. Sous les injures sanguinaires de la foule, Pilate mit ses
vêtements de cérémonie, le diadème serti d’une pierre précieuse, le manteau et
le bâton. Entouré de soldats, d’officiers du tribunal, de scribes avec leurs
rouleaux et tablettes et du sonneur de trompette, il siégea à son tribunal nommé
Gabatha, en face de la colonne du fouettement, en présence du grand conseil,
Ananus, Caïphe et vingt-huit (28) membres. Les autres membres étaient partis au
Temple avec plusieurs pharisiens.
—
Voilà votre roi, dit
Pilate.
—
Crucifiez-le, répondirent-ils.
—
Dois-je crucifier votre roi ? dit
Pilate.
—
Nous n’avons pas d’autre roi que
César, crièrent les chefs-sacrificateurs.
Jésus se tenait au bas de l’escalier du
tribunal. La trompette se fit entendre et Pilate prononça son jugement : il
fit un long préambule où des noms pompeux étaient adressés à l’empereur Tibère
puis exposa l’accusation contre Jésus, que les chefs-sacrificateurs l’avaient
condamné à mort pour avoir troublé la paix publique et violé leur règle en se
faisant appeler fils de Dieu et roi des juifs, et que le peuple avait demandé sa
mort sur la croix d’une voix unanime.
—
Je condamne Jésus de Nazareth, roi
des juifs, à être crucifié, déclara-t-il.
Il cassa un bâton et
jeta les morceaux devant Jésus. Il ordonna aux mercenaires d’apporter la croix
et sous les huées de la foule, on emmena Jésus rejoindre deux
malfaiteurs.
10 h
Voici le jugement écrit par Pilate, qu’ils copièrent trois fois et le
remirent aux messagers :
« Forcé
par les chefs-sacrificateurs du sanhédrin et du peuple sur le point de se
soulever pour réclamer la mort de Jésus de Nazareth, coupable d’avoir troublé la
paix publique et d’avoir violé leur règle, je le leur ai livré pour être
crucifié même si leurs charges ne me semblent pas claires, afin de ne pas être
accusé devant l’empereur de favoriser l’insurrection et mécontenter les juifs
par un déni de justice. Je le leur ai livré avec deux autres criminels déjà
condamnés parce qu’ils voulaient que Jésus soit exécuté avec eux. »
Il écrit aussi sur un écriteau « Jésus de
Nazareth roi des juifs » en trois lignes. Cet écrit ne satisfaisait pas les
chefs-sacrificateurs qui se plaignirent qu’on le fasse roi des juifs plutôt
qu’il s’est dit roi des juifs.
—
Ce que j’ai écrit est écrit, leur
dit Pilate
Le soir même Claudia Procle retourna le gage de
Pilate et quitta discrètement le palais pour rejoindre les amis de Jésus. Elle
fut gardée en secret dans une pièce sous la maison de Lazare à Iérusalem, elle
se convertit et suivit Paul dans sa prédication. Quand la sentence fut
prononcée, Jésus devint encore une fois la proie des mercenaires du sanhédrin.
C’était la coutume des romains de rendre les vêtements des condamnés, et on
rendit à Jésus les vêtements que Caïphe avait pris, ils étaient propres, des
hommes compatissants les avaient lavés. Jésus était à la merci de ces barbares
qui avaient eu quelques retenues en présence du tribunal. Après lui avoir jeté
son talith, ils lui retirèrent le manteau rouge dans un geste et rouvrirent ses
blessures. Ils lui arrachèrent aussi la couronne d’épines car elle ne passait
pas dans sa robe brune sans couture et les plaies se remirent à saigner. Il
reçut aussi son vêtement de laine blanche, sa large ceinture et son manteau, et
ils lui remirent le cercle à pointes de fer attaché aux cordes et la chaîne au
cou. Les deux bandits avaient les mains liées, n’ayant comme vêtement qu’un
linge autour des reins, un talith et un couvre-tête de paille, leurs peaux
portaient les marques des fouets de la veille. Celui qui se convertit par la
suite était calme et pensif, l’autre grossier se joignit aux insultes des
mercenaires. Jésus les regarda avec affection, il offrait ses souffrances pour
leur salut, il souhaitait porter le poids des péchés de l’humanité et répandre
son sang pour les expier. Alors que Caïphe et Ananus avaient leurs deux copies
du jugement, ils partirent en hâte vers Temple pour l’immolation des agneaux
dont le sacrifice faisait déjà place au nouveau sacrifice perpétuel. Bien qu’ils
avaient pris toutes les précautions pour éviter les impuretés extérieures, ils
n’empêchaient pas de souiller leurs âmes des impuretés de la colère et de la
haine.
Des esclaves jetèrent à ses pieds le bois de la
croix, les autres morceaux vont être portés par des valets. La croix s’élevait
en Y comme deux
branches d’arbre prolongées au centre par le tronc, les bras étaient attachés
avec des cordes. Il fallut allonger la croix d’un nouveau morceau de bois pour
l’écriteau. Le seigneur se mit à genou, prit la croix dans ses bras et
l’embrassa trois fois ; il remercia son Père pour la rédemption du genre
humain et embrassa ce nouvel autel. Les anges l’aidèrent à mettre ce fardeau sur
son épaule droite, il n’aurait pas pu le soulever sans leur aide. Jésus
rappelait Isaac portant le bois du sacrifice. Deux mercenaires maintenaient la
croix à chaque bout avec des cordes pour qu’elle ne touche pas terre. Les
bourreaux mirent les troncs des croix sur le cou des deux bandits et y
attachèrent leurs mains. Vingt-huit (28) pharisiens armés vinrent à cheval
escorter Jésus jusqu’au supplice, six d’entre eux avaient participé à son
arrestation, l’un d’eux dit à Jésus :
—
Le temps des beaux discours est
passé. Qu’on nous débarrasse de lui, en avant, en avant.
La trompette sonna le départ. Pilate, en armure
et entouré d’officiers, était devant sa cavalerie, suivi de trois cents (300)
soldats d’infanterie à pied. Un soldat sonnait la trompette et annonçait la
condamnation à chaque coin de rue ; derrière lui une troupe d’hommes et
d’enfants apportant cordes, clous, paniers d’outils, perches, échelles, et le
bois transversal des croix des bandits ; puis les pharisiens à cheval et le
garçon portant l’écriteau et la perche avec la couronne d’épines retirée pour le
portage de la croix. L’escorte passa par une rue très étroite, derrière des
maisons où il y avait beaucoup de déchets, les gens aux fenêtres l’injuriaient,
d’autres lui jetaient des ordures ou un liquide noir infect, même les enfants
jetaient des pierres sous ses pieds. Les rues étaient encore pleines
d’étrangers, esclaves, ouvriers, femmes et enfants, qui se précipitaient de tous
côtés pour voir passer l’escorte et plusieurs allèrent jusqu’au mont Goulgolat.
Après la condamnation, la majorité des juifs partirent chez eux ou au Temple
terminer les préparatifs de l’agneau.
31
Jésus chancelait
sous la charge, les pieds en sang, fiévreux et épuisé par la perte de sang, il
ressentait également d’innombrables angoisses. Sa main droite retenait la croix,
son vêtement était collant et rouvrait ses plaies. Arrivé un peu avant l’aqueduc
qui conduit à la piscine probatique, près de la porte des brebis où l’eau
ruisselait dans les conduits, il n’eut plus de force et s’abattit de tout son
long sur la pierre, entraîné par les cordes des mercenaires. Il tendit la main
en vain. Il pria pour ses bourreaux. Ce sera bientôt fini, se dit-il.
—
Relevez-le, crièrent les
pharisiens, sinon il mourra entre nos mains.
Des femmes
pleuraient et les enfants furent effrayés, Jésus releva la tête par un secours
surnaturel. Ils lui remirent la couronne d’épines.
32
La dévote mère demanda que Jean l’amène sur le
chemin où Jésus passerait, et partant du quartier de Sion, ils longèrent la
maison de Caïphe jusqu’à où Jésus avait reçu la croix. Un portier charitable
laissa Jean passer avec le neveu de Joseph d’Arimathie, la dévote mère, Suzanne,
Jeanne Chusa et Salomé de Iérusalem. On entendit approcher le son de la
trompette et le héraut crier au coin de la rue quand le portier ouvrit la porte.
Marie dit à Jean :
—
Dois-je voir ce spectacle, dois-je
m’enfuir, pourrais-je le supporter ?
—
Si vous ne restez pas, vous vous le
reprocherez plus tard, dit Jean.
—
Qui est cette femme qui se lamente
? demanda-t-on.
—
C’est la mère du
galiléen.
Ils se moquèrent d’elle et l’un d’eux présenta
les clous d’un air amusé. Les mains jointes, Marie vit Jésus brisé sous les
douleurs, la couronne d’épines au front. Ses yeux en sang se posèrent sur sa
mère, il tomba sur les genoux sous le fardeau. La dévote mère se jeta vers lui
et le serra dans ses bras dans ces mots :
—
Mon fils.
—
Mère...
Les mercenaires l’insultèrent.
—
Femme, que viens-tu faire
ici ? dit l’un d’eux. Il ne serait pas dans nos mains si tu l’avais mieux
élevé.
Quelques soldats
émus la firent reculer et aucun mercenaire ne la toucha. Marie tomba à genoux
sur la pierre de la porte, une pierre veinée de vert, ses genoux et ses mains
laissèrent des traces. Comme on dit les pierres en seront émues, et aussi, cela
fit impression. On a transporté cette pierre dans l’église près de la piscine de
Bethsaida sous le patronage de Jacob le-mineur.
Dresse-toi
des indices sur les chemins, fais des monceaux de pierres, prends garde aux
chemins, par quelle voie tu es venue. Retourne, vierge d’Israel, retourne à tes
villes. Jérémie 31.21 (Bible
Martin) Malheureuse battu de la tempête que
nul ne console, voici Je garnirai tes pierres d’antimoine et Je te donnerai des
fondements de saphir, Je ferai tes créneaux de rubis, tes portes d’escarboucles,
et toute ton enceinte de pierres précieuses : tous tes fils seront
disciples de l’Éternel et grande sera la postérité de tes
fils. (Esaie 54.11)
33
Les cordes des bras de la croix se détachèrent
et un bras se prit dedans. Jésus l’embrassa. Des femmes voilées versèrent des
larmes. À une croisée de trois rues, il achoppa contre une grosse pierre et
tomba de tout son long alors qu’il voulait s’appuyer.
—
Le pauvre homme se meurt, dirent
les gens qui allaient au Temple.
—
Trouvez quelqu’un pour porter sa
croix ou nous ne pourrons l’amener vivant, dirent les pharisiens.
Ils dirent cela aux soldats du Temple, ils
voyaient que Jésus n’arrivait pas à se remettre debout. Les soldats virent un
ouvrier et le prirent pour porter la croix ; Simon de Cyrène, jardinier païen de quarante
ans, revenait avec ses trois enfants des jardins à l’est de la ville,
chaque année il venait à Iérusalem tailler les haies comme d’autres de ce
métier. Il était fort et portait des bandeaux autour des reins, ses courroies de
sandales montaient autour des jambes, et ses fils Rufus et Alexandre portaient
des robes bariolées, le plus petit connaissait Étienne, ils se réuniront aux
disciples. Des femmes de sa connaissance prirent ses enfants. Le seigneur
pleura. Les mercenaires mirent un bras de la croix sur l’épaule de Simon, il eut
de la répugnance devant Jésus.
34
L’escorte passa dans une longue rue, les gens
bien vêtus s’écartaient par crainte de se souiller, Jésus et Simon avaient
marché deux cents pas.
Une femme se jeta devant l’escorte, elle se
nommait Séraphia, épouse d’un membre du conseil des sacrificateurs nommé Sirach.
Elle vint aussi quand Jésus rencontra sa mère, mais incapable de passer au
travers de la foule, elle revint près de sa maison. Elle avait préparé avec une
petite fille de neuf ans un vin aromatisé pour son douloureux chemin. On voulut
la chasser, mais elle passa avec l’enfant au travers des gens et des soldats et
tomba à genoux devant Jésus en lui présentant un voile en fine laine. Il était d’usage d’aller vers les affligés et
leur essuyer le visage en marque d’affection et de tristesse.
—
Permettez-moi d’essuyer le visage
de mon-seigneur.
Le
seigneur posa le voile sur son visage en sang et le pressa,
puis la remercia. Elle se releva après avoir posé un baiser. Les mercenaires
empêchèrent qu’il se désaltère avec le vin que la jeune fille présentait.
Séraphia étendit le voile sur la table de chez elle et tomba sans connais-sance
en voyant l’empreinte du visage du seigneur Jésus.
—
Le seigneur m’a donné un signe, je
veux tout quitter, dit-elle agenouillée.
En lien avec Marie et Joseph depuis longtemps,
sa famille tenait de leur père un grand désir du messie. Son père était cousin
de Zacharie le père de Jean le baptiste, et aussi de la parenté au vieux Siméon.
Lorsque Jésus enfant resta à Iérusalem après la fête, Séraphia avait envoyé de
la nourriture dans l’hébergement où il restait. Jésus et les disciples venaient
souvent loger dans cet hébergement prévu pour les pauvres.Elle fut appelée Véronique, vera icon vrai
portrait à cause de ce qu’elle fit. Elle conserva ce
voile jusqu’à sa mort puis les dévotes le remirent à l’assemblée, à Marie et aux
apôtres.Son mari Sirach, un descendant de la chaste Suzanne, était
membre du conseil du Temple, alors très opposé à Jésus, Nicodème et Joseph
d’Arimathie l’avaient ramené à la raison. Ensemble ils ont quitté le sanhédrin
après s’être déclarés pour Jésus au tribunal de Caïphe.
35
Arrivés au portique de la muraille de la ville,
les mercenaires les pressaient, Simon de Cyrène dévia la croix et Jésus fut projeté dans un grand bourbier
qu’il y avait devant la muraille.
—
Hélas Iérusalem ! J’ai voulu
réunir tes enfants comme la poule rassemble ses petits sous ses ailes parce que
je t’ai aimée, et tu me chasses avec cruauté hors de tes portes,
dit Jésus.
—
Cet agitateur n’a pas fini, il
tient encore de mauvais propos, dirent les pharisiens en le frappant.
—
Arrêtez vos bassesses sinon je
jette la croix là même si vous voudrez me tuer, cria Simon de Cyrène.
Ils le sortirent du bourbier en le traînant. Passé ce portique il y
avait trois routes : – une au nord vers le mont Goulgolat litt.
Golgotha jusqu’à Bethsur, étroite et rocailleuse ;
– une au sud vers Bethléem, par la vallée de Gihon ; – une à
l’ouest vers Emmaus et Joppé.
Ils avaient mis un écriteau sur la route pour
indiquer la condamnation des bandits et de Jésus, les caractères étaient collés.
Le mot goulgolat remonte au prophète
Élisé dans le temps où c’était une colline avec de nombreux murets, de grottes
et de tombeaux, le prophète descendit prendre un crâne parmi les ossements et un
ange lui dit : C’est le crâne d’Adam. Il ne lui permit pas de l’emporter.
Suite à son récit on appela cet endroit crâne. Le bois de la croix sera mis
juste au-dessus du crâne d’Adam. L’endroit était au centre de la terre, de là on
voyait différents pays, leurs montagnes, déserts, mers, fleuves et villes, les
plus proches comme les plus éloignés. Ce n’était pas là qu’Abraham est venu
sacrifier Isaac, peut-être sur le mont Moriah. Des femmes en pleurs se tenaient
sur le coin, la plupart étaient de dévotes vierges, de pauvres femmes et leurs
enfants de Iérusalem, et d’autres venues de Bethléem et d’Hébron et de leurs
environs. Voyant que le seigneur Jésus était faible et tombait en défaillance si
Simon ne l’avait soutenu, les femmes crièrent de douleur et présentèrent des
voiles pour essuyer son visage. Il leur dit :
—
Filles de Iérusalem, ne pleurez pas
sur moi, mais sur vous et vos enfants. Le temps vient bientôt qu’on dira,
heureuses les stériles, les entrailles qui n’ont pas enfanté, les seins qui
n’ont pas allaité. Et on dira aux montagnes tombez sur nous, et aux collines
couvrez-nous, car si on traite ainsi le bois vert, qu’en sera-t-il du bois
sec.
Il leur dit que leurs larmes seraient
récompensées, qu’elles marcheraient sur d’autres chemins.
36
Pilate rebroussa chemin, mais il laissa cent
(100) soldats romains escorter ceux qui apportaient les instruments du
crucifiement sur le Goulgolat. Le haut de sa plateforme était aussi large qu’un
manège de moyenne taille et on pouvait voir la ville par-dessus la muraille. Ils
se remirent à avancer, Jésus titubait sous leurs coups et montait péniblement la
pente tortueuse, il tomba de nouveau et se fit plus mal encore. Ils poussaient
et frappaient le seigneur plus brutalement qu’avant.
11 h 30 Simon
de Cyrène
aussi fut brutalisé. Dès que Jésus arriva sur le rocher qui surplombait le mont,
il s’affaissa une septième fois sous le fardeau. Les mercenaires chassèrent
Simon de Cyrène en se moquant de lui, ils renvoyèrent également les ouvriers dont
ils n’avaient plus besoin. Bien qu’indigné par les mauvais traitements, Simon de
Cyrène
souhaitait encore soulager Jésus, il ira bientôt se réunir aux apôtres. Les
pharisiens à cheval vinrent du côté ouest par des sentiers plus commodes, tandis
que la pente où étaient passés les condamnés était abrupte et difficile. Le mont
Goulgolat était à une croisée de cinq routes. On retrouvait ces croisées de
chemin à de nombreux endroits, surtout où on puisait l’eau et baptisait, ainsi
qu’à la piscine de Bethsaida ; plusieurs des villes avaient aussi cinq
portiques, disposition ordinaire aux anciens temps qui s’est conservée jusqu’à
présent par une bonne inspiration ; en ce jour son sens prophétique
réalisera les cinq voies de salut par les cinq plaies.
La centaine de soldats romains prirent position
sur les côtés et plusieurs vinrent près des deux bandits étendus un peu plus
bas, bras attachés aux bras de leur croix par des cordes d’écorce, faisant place
libre en haut. Il y avait beaucoup de gens, de ceux qui ne craignaient pas se
souiller, leur nombre allait en augmentant parce que beaucoup s’arrêtaient là
avant de se rendre en ville. Sur la montagne de Gihon, du côté ouest, se
trouvait un grand camp d’étrangers venus pour la fête qui regardaient de loin
tandis que d’autres s’approchaient à mesure. Les mercenaires délièrent les bois
et poussèrent Jésus en criant :
—
Nous allons arranger ton trône, roi
des juifs.
Il s’étendit lui-même sur la croix sous les
regards des pharisiens, son corps meurtri ne lui permettait pas de faire vite et
ils lui firent durement sentir. Ils prirent la longueur de ses jambes puis
l’enfermèrent dans une cave creusée dans le roc près de là, il y fut poussé si
violemment que ses genoux se seraient brisés sans l’aide du ciel grâce aux anges
qui avaient empêché qu’ils se brisent. Il gémit d’une façon si déchirante que la
pierre se ramollit sous ses genoux. Ils fermèrent l’entrée de la cave et
postèrent des soldats pendant que les mercenaires creusaient des trous sur la
plateforme, surélevée d’un demi-mètre, et façonnaient la croix afin que le poids
du corps ne porte pas seulement sur les mains.
37
Par son amour de souffrir avec lui et ne pas
l’abandonner, Marie reçut une force prodigieuse et partit avec ses compagnes
chez la maison de Lazare où se trouvaient Marthe, Marie-Magdala, avec d’autres
et quelques enfants. Elles étaient au nombre de dix-sept (17) quand elles
prirent le chemin de la croix et retracèrent les pas de Jésus avec une gravité
qui commande le respect, malgré les insultes de la foule. Une lumière intérieure de grâce guidait Marie
et lui indiquait chaque grave incident, ce prodige permit que ces lieux
sanctifiés soient honorés par la suite. D’autres gens bien intentionnés
s’ajoutèrent dont quelques hommes et leur nombre devint plus grand que le
cortège précédent des membres du grand conseil. Passant calmement le long des
rues, elles arrivèrent chez Séraphia et virent avec émotion l’empreinte laissée
sur le voile.
Elles prirent le vin
aromatisé et continuèrent vers le Goulgolat, Marie sentit combien Jésus
souffrait à la vue du supplice qui se préparait et une autre peine souleva le
fond de l’âme, Marie-Magdala aussi en fut affectée et chancelait. Cet endroit
était terrifiant avec ces croix de torture, les marteaux, les cordes, les clous,
et les bourreaux à demi-nus faisant leur travail dans les grossièretés. Le
groupe monta le Goulgolat par la pente douce et se répartit en trois autour de
la plateforme :
– Jean, la dévote mère, sa nièce Marie de Cléophas et Salomé
; – Marthe, Marie d’Héli, Séraphia Véronique, Jeanne Chusa, Suzanne, Marie
et Marie-Magdala ; – sept autres avec quelques-unes qui communiquaient entre
les groupes.
Il avait grêlé par intervalle jusqu’à 10 h,
moment de la sentence, puis le ciel s’était éclairci alors que l’escorte
conduisait Jésus au Goulgolat, puis vers midi un brouillard cacha le
soleil.
38
Jésus pria son Père de le fortifier et
s’offrait encore en sacrifice expiatoire pour les péchés de ses ennemis quand
les quatre mercenaires l’arrachèrent de la cave à coups de poing et
d’outrages ; ils le traînèrent jusqu’à la plateforme dans les insultes de
la foule, les soldats maintenaient l’ordre. Les dévotes leur remirent de
l’argent pour permettre à Jésus de boire le vin aromatisé, mais les bourreaux le
burent à sa place et lui donnèrent le vin d’absinthe et de myrrhe destiné aux
condamnés. Jésus y posa les lèvres, mais n’en but pas. Il y avait aussi un autre
pot de vinaigre de fiel. Sur les dix-huit (18) mercenaires présents sur la
plateforme, six l’avaient fouetté, quatre l’avaient escorté,
deux avaient tenu les cordes aux bouts de la croix, les six autres allaient le
crucifier ; ces robustes petits hommes servaient aux romains et aux juifs
contre de l’argent. Les formes du mal étaient présentes, des démons qui
appuyaient la cruauté, invisibles aux autres, et une quantité sans fin de
crapauds, serpents, dragons, insectes venimeux qui obscurcissaient l’air et
entraient par la bouche dans le coeur des assistants, se posaient sur leur
épaule ou leur tête, les saturant de pensées impures et paroles vexantes. De
grands anges et des visages glorieux pleuraient au-dessus du seigneur, il y
avait aussi des esprits de consolation au-dessus de ses amis. Les mercenaires
arrachèrent la couronne d’épines pour enlever la robe que sa mère lui avait fait
et ôtèrent tous ses vêtements en rouvrant les plaies ; ses épaules étaient
déchirées aux os, le corps complètement lacéré et au bord de s’effondrer.
Ils l’assirent et lui remirent la couronne
d’épines en proposant du vinaigre de fiel, mais il s’en détourna. Ils retirèrent
ses bras qui couvraient alors sa nudité, ce qui souleva l’indignation chez ses
amis. Sa mère pria avec ardeur avec la pensée d’arracher son voile. Notre Dieu
tout miséricordieux les exauça et au même instant un homme vint hors d’haleine
apporter un linge que Jésus attacha à ses reins avec remerciement. L’homme
montra le poing en disant aux mercenaires :
—
Gardez-vous d’empêcher ce pauvre
homme de se couvrir.
Et il se retira aussi vite que venu. Jonadab,
ce neveu de Joseph le charpentier, habitait Bethléem, son père avait pris en
gage un âne contre une somme d’argent lors de sa visite à la crèche, qui servit
aux dépenses pour recevoir les rois mages annoncés par la dévote mère. Jonadab
s’était indigné d’apprendre que Jésus avait été dépouillé de vêtement au
fouettement, et dans le Temple il fut encore alarmé et courut sur-le-champ
couvrir Jésus au Goulgolat comme Shem, indigné contre Ham , s’était hâté de couvrir Noah. Ses
bourreaux aussi étaient issus de Ham, et Jésus foulait le sang du salut au
pressoir quand Jonadab vint lui prêter assistance. Jésus s’était étendu sur la
croix. Ils avaient de gros marteaux, des maillets de fer d’une pièce, des
perceuses en forme de T, et des clous triangulaires de 16 cm, ayant 1 à 2 cm de large, qui
passaient au travers. Ces clous firent frissonner le seigneur. Le bras droit
attaché au bras de la croix, un mercenaire mit son genou sur sa poitrine,
l’autre maintenait sa main ouverte lorsque le troisième la transperça d’un coup.
Son sang rejaillit sur leurs bras, il gémit. Avant de clouer sa main gauche, ces
bourreaux ivres disloquèrent son bras parce qu’il leur manquait 5 cm : ils
tirèrent le bras gauche d'une corde en appuyant leurs pieds contre le bois. Le
bras se déchira au coude et on vit ses os. Ils enfoncèrent le second clou à
trois de la même manière, on entendait ses gémissements à travers les coups de
marteau, les
pharisiens se moquaient de lui et s’adressaient à sa mère avec des injures. Ses
bras étaient si distendus qu’on voyait l’oblique de la croix en Y. Ils ajoutèrent un
morceau de bois pour ses pieds au tiers de la croix, que ses mains ne se
déchirent pas, et creusèrent le bois aux talons et au bas du dos pour caler le
corps, que son poids ne l’entraîne pas. Ils prirent des cordes et tirèrent sa
jambe droite jusqu’à ce qu’elle se disloque pour que ses pieds arrivent au
morceau de bois qu’ils venaient de fixer. Sa poitrine craqua et il cria :
—
O mon Dieu, mon Dieu. (saumes
22.1)
Qui a cru à ce qui nous
était annoncé, qui a reconnu le bras de Iehvah ? Il s’élèvera devant lui comme
une faible plante, tel un rejeton issu d’une terre desséchée, qui n’a ni beauté
ni éclat pour attirer nos regards et rien qui nous plaise dans son aspect.
Méprisé et délaissé par les hommes, homme de douleur habitué à la souffrance,
semblable à celui dont on détourne le visage, nous l’avons dédaigné et n’avons
fait aucun cas de lui. Cependant, ce sont nos souffrances qu’il a portées, ce
sont nos douleurs qu’il s’est chargé, nous l’avons considéré punissable, frappé
de Dieu et humilié. Mais il fut blessé pour nos péchés, brisé pour nos
iniquités, et le châtiment qui nous donne la paix est retombé sur lui, et nous
sommes guéris par ses blessures. Nous étions tous errants comme des brebis,
chacun suivait sa voie particulière, quand Iehvah a fait retomber l’iniquité de
nous tous sur lui. Il a été maltraité et opprimé et il n’a pas ouvert la bouche,
semblable à un agneau qu’on mène à la boucherie, à une brebis muette devant ceux
qui la tondent, il n’a pas ouvert la bouche. Il a été enlevé dans l’angoisse et
le châtiment. Qui a cru parmi ceux de sa génération qu’il serait retranché de la
terre des vivants, frappé pour les péchés de mon peuple ? On a mis son sépulcre
parmi les méchants, son tombeau avec le riche, quoiqu’il n’eût pas commis de
violence et qu’il n’y eût aucune fraude dans sa bouche. Il a plu à Iehvah de le
briser par la souffrance après qu’il ait livré sa vie en sacrifice pour le
péché. Il verra une postérité et prolongera ses jours, et l’oeuvre de Iehvah
prospérera entre ses mains. Il rassasiera ses regards à cause du travail de son
âme : par sa connaissance, mon juste servant justifiera beaucoup d’hommes en se
chargeant de leurs fautes, c’est pourquoi Je lui donnerai sa part avec les
grands, il partagera le butin avec les puissants, parce qu’il a été mis au
nombre des malfaiteurs, qu’il s’est livré lui-même à la mort pour porter les
péchés de beaucoup d’hommes, et qu’il a intercédé pour les coupables. (Ésaie
53)
Ils trouèrent le pied gauche et l’attachèrent
sur le droit, puis ils enfoncèrent un clou dans la blessure du pied gauche et
clouèrent le pied droit au morceau de bois, jusqu’au tronc de la croix, par
trente-six coups (36) de marteau. La puissance de cette douleur, de la
dislocation de tous ses membres, étouffa autour de lui toutes les injures, des
anges en larmes se montrèrent au-dessus de lui, il y eut une agitation et des
cris d’horreur se firent entendre.
—
Pourquoi la terre n’engloutit-elle
pas ces misérables ? s’écrièrent les dévotes.
—
Pourquoi le feu du ciel ne les
consume-t-il pas ?
Ses bourreaux, les mercenaires, répondirent par
des grossièretés. Jésus priait même en gémissant, et évoquait les écrits des
prophètes et de David, dans les psaumes, dont il exécutait les prophéties :
c’est ainsi qu’il n’avait pas cessé de prier tout le long du chemin de la croix,
et ce qu’il fit jusqu’à la mort de son corps. L’écriteau de
Pilate fut posé par un chef de troupe romaine. Les soldats riaient du titre de
roi des juifs. Forts des débats de la veille, les pharisiens revinrent demander
à Pilate une autre inscription, mais il ne voulut pas les voir. Les mercenaires
agrandirent le trou trop étroit où planter la croix et le rocher extrêmement
dur. Les hommes qui burent le vin aromatisé eurent des malaises, il brûlait et
leurs entrailles semblaient se déchirer. Ils traitèrent Jésus de sorcier. Ils
coururent plusieurs fois au bas du mont Goulgolat pour boire du lait d’ânesse
que les femmes du campement vendaient. Quand ils eurent fini de percer Jésus au
bois, le son des trompettes qui marque les sacrifices retentit dans le Temple au
même moment.
39
La croix pénétra dans la terre avec une forte
secousse et Jésus poussa un cri de douleur quand toutes ses plaies s’élargirent
et que ses os s’entrechoquèrent sous son poids. Des pleurs se firent entendre.
Les mercenaires ébranlèrent la croix pour l’enfoncer davantage. Jean, les
dévotes et tous ceux au coeur pur saluèrent Jésus en levant leurs mains
tremblantes, comme pour secourir. Le visage tourné au nord-ouest, ses pieds
étaient assez bas pour pouvoir les embrasser.
Au son du bois sur le roc, il se fit un profond
silence. En enfer, une terreur se fit sentir, l’hystérie saisit les démons, et à
la porte des purgatoires, ce bruit tonna en signe de triomphe et une joie saisit
les âmes prisonnières, ils ne l’avaient jamais encore ressenti. La croix se
dressa au centre de la terre comme un nouveau plant d’arbre sacré du paradis, le
sang du messie coula en quatre fleuves de vie qui fertilisent la terre et
repoussent la malédiction. Dans la stupeur du silence, alors que le son des
trompettes du Temple annonçait les sacrifices des agneaux, on se souvint de la
parole de Jean le baptiste :
—
Voici l’agneau de Dieu qui prend
sur lui les péchés du monde. (Jean 1.29)
40
Ce fut au tour des bandits. Accusés de
l’assassinat d’une juive et ses enfants sur la route de Iérusalem à Joppé et
ayant prétendu être de riches marchands quand on les arrêta, ils étaient
longtemps restés en prison. Gesmas le plus âgé était grand scélérat et maître de
l’autre dénommé Dismas, ce ne sont pas leurs vrais noms. Installés avec des voleurs aux frontières
d’Égypte, ils avaient donné une nuit d’hospitalité à Jésus enfant et sa
famille en fuite, et Dismas enfant fût guéri de sa lèpre après que sa mère le
lava avec l’eau du bain de Jésus. Dismas était tombé très bas, mais tant de
patience chez Jésus l’avait touché, étendu par terre il ne parlait que de lui :
—
Ils maltraitent le galiléen pour
avoir enseigné une nouvelle doctrine, qui doit être pire que ce que nous avons
fait... Mais quelle patience et grand pouvoir il a sur tous les hommes.
—
Quel pouvoir a-t-il, peut-il nous
aider s’il est aussi puissant qu’on dit ? répondit Gesmas.
Le soleil s’assombrit, il y eut un mouvement
dans la nature comme à l’approche d’un orage. Les mercenaires hissèrent leur
croix à l’aide d’échelles après les avoir privés de leur vêtement et fait boire
du vinaigre de myrrhe. Ils lièrent leurs poignets, coudes, genoux et pieds, mais
les cordes étaient si serrées que cela fit craquer leurs jointures jusqu’au
sang. Ils poussèrent des cris et Dismas s’écria :
—
Si
vous nous aviez cloués comme ce pauvre galiléen vous
n’auriez pas pris la peine de nous mettre
en l’air.
Les mercenaires se firent des lots pour diviser
entre eux les habits de Jésus couverts de sang, et déchirèrent son manteau en
plusieurs morceaux, car il était large de plusieurs plis en bas et avait des
poches dans la doublure avant. Ils déchirèrent sa longue robe ainsi que la bande
qu’il portait au cou, sa ceinture, son talith et le sous-vêtement qui couvrait
ses reins. Pour sa robe sans couture ils prirent une table à chiffres pour jeter
des dés en forme de fèves. Un envoyé de Nicodème et Joseph vint leur dire qu’il
y avait des acheteurs pour tous ces habits et ils vendirent le tout. On les
conserva comme reliques de grande estime.
41
La croix bien droite, ils détachèrent les
cordes aux bras de Jésus, son sang alla aux blessures et ravivèrent toutes ses
plaies. Il fut étourdi sous mille souffrances de feu à travers ses veines des
mains et des pieds, et des flèches brûlantes frappèrent tous ses membres et ses
organes de douleur. Il fut inanimé, tête basse, bouche entrouverte, les yeux
inondés de sang. Il revint à lui après sept minutes, et essaya de relever la
tête avec la grosse couronne autour du front. Il était disloqué des épaules aux
bras et à la jambe, la poitrine écrasée, le corps en sang, on pouvait compter
tous ses os. (Psaumes 22.17, 34.20)
Le teint de
Marie et son fils était d’un beau jaunâtre où se fondait un rouge transparent.
Jésus avait une poitrine large, non velue d’un poil rougeâtre comme Jean le
baptiste; son visage avait la forme un parfait ovale, le front dégagé haut et
large, les cheveux fins d’un brun cuivré, raie au milieu, tombaient sur les
épaules, une courte barbe séparée sous le menton ; épaules larges aux bras
robustes, jambes longues, genoux endurcis par les voyages et les prières, pieds
fortement bâtis, plante des pieds endurcie par les nombreux trajets sur des
chemins cahoteux où il marchait pieds nus. Un bandit priait, l’autre avait
l’injure à la bouche contre le seigneur ; lèvres noircies par le breuvage,
yeux rougis, corps disloqués et cruellement garrottés, ils étaient agités
de mouvements convulsifs et la souffrance causée par les cordes trop serrées
leur arrachait des hurlements.
42
Les mercenaires se partagèrent les vêtements
des bandits et se retirèrent. Les pharisiens à cheval ne se retirèrent pas avant
de dire encore de mauvaises paroles comme si leur haine n’avait pas atteint le
fond. La troupe des cent (100) soldats romains fut
remplacée par une autre de cinquante (50) commandée par Abénadar, un arabe de
naissance baptisé plus tard Ctésiphon. Cassius son second commandant
portait les messages à Pilate, il fut nommé Longin plus tard. Un soldat mit une
éponge trempée de vinaigre au bout d’une perche et la présenta aux lèvres du
seigneur qui sembla y goûter. Lors du remplacement des troupes, ils n’arrêtaient
pas de dire des railleries, Jésus souleva un peu la tête et dit :
—
Mon Père, pardonnez-leur, car ils
ne savent ce qu’ils font. Psaumes 14.1
—
Si tu es le messie, sauve-toi et
sauve-nous, dit Gesmas.
Les membres du conseil arrivèrent à cheval, il
y avait douze (12) pharisiens, douze (12) sadducéens, douze (12) scribes et
quelques anciens. Ces derniers firent le tour de la plateforme et chassèrent la
dévote mère en la traitant de mauvaise femme. Ils s’adressèrent à Jésus,
hochant la tête avec dédain:
—
Eh bien imposteur, renverse le
Temple et rebâtis-le en trois jours.
—
Il a toujours voulu secourir les
autres, mais il ne peut se sauver lui-même.
—
Descends de la croix si tu es le
fils de Dieu.
—
Qu’il descende de la croix s’il est
roi d’Israel et nous croirons en lui.
—
Il a eu confiance en Dieu, qu’il
lui vienne en aide maintenant.
—
Sauve-toi toi-même maintenant si tu
es roi des juifs, dirent aussi les soldats.
—
Son démon l’a abandonné, dit
Gesmas.
Jésus continuait de prier en silence. Dismas
fut profondément touché que Jésus prie pour ses ennemis. La prière de son fils
fortifia sa mère, elle se rapprocha alors de la croix suivie de Jean, Salomé et
Marie de Cléophas. Le centurion ne les chassa pas. Par la prière de Jésus,
Dismas eut une révélation à l’approche de la dévote mère et reconnut qu’il avait
été guéri dans son enfance.
—
Comment pouvez-vous l’insulter
quand il prie pour vous ? dit-il. Il se tait et endure vos violences avec
patience parce qu’il prie pour vous. C’est un prophète, il est notre roi, c’est
le fils de Dieu.
À cette déclaration imprévue d’un assassin sur
la croix, un grand tumulte se fit parmi les assistants et ils ramassèrent des
pierres pour le lapider, mais le centurion Abénadar rétablit l’ordre, il les en
empêcha et les fit disperser. Dismas dit à son complice :
—
Ne crains-tu pas Dieu même condamné
à un pareil supplice ? Pour nous, c’est justice de subir le châtiment de
nos crimes, mais lui n’a rien fait de mal. Pense à ta dernière heure et
convertis-toi.
Touché et éclairé à la fois, il lui confessa
ses fautes et dit au seigneur :
—
Seigneur, ce sera justice si vous
me condamnez. Mais ayez miséricorde de moi.
—
Tu éprouveras ma miséricorde, dit
Jésus.
Midi
Dismas était en profond repentir pendant un
quart d’heure et il reçut la grâce. De grands changements se produisirent dans
l’âme des gens lorsque la nature montra des signes surprenants, qui les
inquiétèrent. Vers midi, ou 6e heure selon le compte des juifs, un
brouillard rougeâtre vint devant le soleil.
43
Une éclipse se produisit quand la pleine lune
s’éleva à grande vitesse par-dessus le mont des oliviers et se mit devant le
soleil déjà voilé sous la brume. De plus une masse jaune sombre de l’ouest vint
le recouvrir entièrement, un anneau rouge feu l’entourait. Le ciel s’obscurcit
aussitôt et les étoiles apparurent d’une clarté rougeâtre. Hommes et bêtes
furent saisis et les bestiaux se mirent à beugler et à fuir, les oiseaux
tombèrent en masse sur les collines alentour du Goulgolat et cherchaient où se
réfugier, on pouvait les prendre par la main. Ceux qui injuriaient Jésus
baissèrent le ton. Les pharisiens qui voulaient tout expliquer par des causes
naturelles furent aussi saisis. Beaucoup se mirent à genoux pour demander
pardon. Tout le monde leva les yeux au ciel, certains même se frappèrent la
poitrine en criant :
—
Que son sang retombe sur ses
meurtriers.
Jésus tourna vers eux son regard de la croix.
Les ténèbres grandissaient, la croix fut délaissée sauf par sa mère et ses
proches. En profond repentir et humble espérance, Dismas leva sa tête vers Jésus
et dit :
—
Seigneur, pensez à moi quand vous
serez dans votre royaume.
—
En vérité je te le dis, tu seras
aujourd’hui avec moi dans le paradis, répondit Jésus.
Jean, sa dévote mère, Marie-Magdala et Marie de
Cléophas se mirent entre Jésus et les bandits. Marie pria pour que Jésus la
laisse mourir avec lui, mais il la regarda tendrement et lui dit, les yeux
tournés vers Jean :
—
Femme, voilà votre fils. Il sera
votre fils plus que si vous l’aviez enfanté. Il a toujours eu une foi
inébranlable et jamais ne s’est scandalisé sinon quand sa mère a voulu qu’il
s’élève au-dessus des autres. Voilà ta mère, dit-il à Jean.
13 h 30 Jean
embrassa la mère de Jésus avec respect, puis les dévotes firent asseoir Marie,
et elles l’emmenèrent en dehors de la plateforme à cause de sa faiblesse. Tout
est écrit pour les enfants qui croient, qui espèrent, qui aiment.
Ténèbres | croix
44
D’épais brouillards obscurcissaient les rues et
envahissaient la ville au point que tous marchaient à tâtons. Plusieurs
s’étaient allongés par terre et frappaient leur poitrine, d’autres sur le toit
de leur maison fixaient le ciel en se lamentant. Les animaux beuglaient et
baissaient la tête comme pour se cacher, les oiseaux volaient au ras du sol et
tombaient. Pilate partit chez Hérode, ils regardaient le ciel de la terrasse où
le matin même Hérode avait vu Jésus se faire outrager par le peuple.
—
Ce n’est pas naturel, dirent-ils
inquiets. On est sûrement allé trop loin avec ce Jésus.
Ils sortirent du palais escortés de soldats et
traversèrent rapidement la place publique sans regarder vers Gabatha, où Jésus
avait été condamné par Pilate. Les places s’étaient presque toutes vidées, on
voyait encore quelques-uns se précipiter chez eux ou courir en pleurs, et de
petits regroupements çà et là. Dans son palais, Pilate fit venir les vieux juifs
et dit que ces ténèbres venaient de leur Dieu en colère d’avoir exigé la mort du
galiléen, qui était clairement leur prophète et roi. Mais ces anciens
attribuaient tout cela à des causes naturelles, persistant dans leur
endurcissement afin de ne pas se convertir. Beaucoup se convertirent. Tous les
soldats romains renversés à l’arrestation sur le mont des oliviers se
convertirent et la foule se rassemblait déjà devant le palais de Pilate, là où
le matin même on avait crié, faites-le mourir, crucifiez-le, ils criaient
maintenant :
—
À bas le juge inique. Que son sang
retombe sur ses meurtriers.
Le cousin du mari de Séraphia Véronique, ce
Sadoch qui avait clamé Jésus aussi innocent que les enfants assassinés, parlait
si durement que Pilate faillit le faire arrêter. Pilate mettait tout sur les
juifs, disant lâchement n’y être pour rien, que Jésus était leur prophète, non
le sien, c’est eux qui voulaient sa mort, qu’il s’était lavé les mains et
s’était innocenté de ce meurtre. Les brouillards de ténèbres recouvrirent le
Temple d’un coup pendant qu’ils saignaient les agneaux. Ils en furent terrifiés,
saisis par la peur, des cris se firent entendre. Les chefs-sacrificateurs
allumèrent les lampes tout en s’efforçant de maintenir le calme, mais
l’affolement se changea en panique et Ananus même courut se cacher d’un coin à
l’autre du Temple. Les grilles des fenêtres vibraient comme sous un violent
orage tandis que les ténèbres s’étendaient à travers la ville. Près de la
muraille dans les jardins au nord-ouest, les tombeaux s’étaient écroulés comme
par un tremblement de terre, ces tombeaux avant l’agrandissement étaient
autrefois hors de la ville. Des tombeaux s’écroulèrent ailleurs, on pouvait voir
des os et des lambeaux de tissus, et certains tombeaux avaient une odeur
désagréable. Les brouillards de ténèbres eurent un effet persuasif autour du
Goulgolat, les gens devinrent tout à coup pensifs et s’écartèrent de la croix à
mesure que les ténèbres avançaient. Dans le silence qui survint, après que Jésus
confia sa mère à Jean et qu’elle fut amenée à distance, la crainte des ténèbres
saisit le peuple. De ceux qui fixaient le ciel, certains retrouvèrent leur
conscience et se frappèrent la poitrine en direction de la croix, remplis de
repentir, et se groupèrent ensuite
ensemble, les pharisiens qui trouvaient ces causes naturelles finirent par
baisser le ton. Le soleil s’assombrit en plein jour, cerné de rouge, on voyait
les étoiles rougeâtres, les oiseaux s’abattaient sur le Goulgolat et se
laissaient prendre, les chevaux et les ânes des pharisiens s’étaient blottis
ensemble têtes basses. Les ténèbres recouvrirent tout le Goulgolat d’épais
brouillards. Durant ce délaissement, le seigneur priait encore, comme depuis le
début de son sacrifice, répétant des passages des psaumes qui trouvaient leur
accomplissement en lui. Il priait son Père céleste avec amour et des anges
étaient tout autour de lui. Jésus ressentit ce qu’un homme délaissé de
consolation divine et humaine peut souffrir, il obtint pour nous la force
d’acquérir les mérites de la persévérance
dans la lutte du
délaissement absolu par l’union de
notre délaissement au sien. Qui s’unira à Jésus ne pourra jamais
désespérer lorsque tout est assombri par absence de lumière et consolation, nous
ne descendons plus sans protection dans ce désert de la nuit intérieure, il est
la lumière, la voie de la vérité descendue dans la route sombre, il a élevé sa
croix dans le désert et répandu les bénédictions qui surmontent les terreurs.
Réduit au plus bas niveau d’abandon et de pauvreté, laissé sans soutien, il fit
son testament devant Dieu, il donna tous ses mérites à son assemblée et aux
pécheurs repentants. Il n’omit personne dans son abandon et pria aussi pour ceux
qui ont prétendu qu’il n’avait ressenti aucune douleur par son sacrifice et
n’avait souffert comme un homme souffre dans la même situation.
15 h
Il ressentait ce délaissement plus difficilement qu’un homme ordinaire
parce qu’il était intimement lié à la divinité, parce qu’il buvait la coupe
amère qui déversait des horreurs par son délaissement. Il cria très fort :
—
Éli Éli, lamah azabtani. (Psaumes 22.1)
Ce cri rompit le
silence en haut du Goulgolat. L’un des pharisiens dit qu’il appelait Éli, un
autre répondit de voir si Éli viendra l’aider. La dévote mère revint au pied de
la croix suivie de Jean, Marie-Magdala, Salomé et Marie de Cléophas. Passant là
à cheval pour la fête, un groupe de trente (30) hommes importants de Judée et de
Joppé virent Jésus si maltraité et les menaces de la nature, et dirent avec
dégoût :
—
Malheur à cette ville... Si le
Temple de Dieu ne s’y trouvait pas, on devrait la brûler pour avoir pris en elle
un si grand péché.
Des murmures et des gémissements se firent
entendre et la foule se divisa entre ceux qui insultaient et ceux qui
compatissaient. Les pharisiens furent moins arrogants alors que les plus
compatissants se regroupaient ensemble, mais craignant une émeute à Iérusalem,
ils s’entendirent avec le centurion Abénadar de fermer le portique voisin pour
couper les communications avec la ville, et renforcer les troupes en cas
d’émeute. Un messager fut envoyé vers Pilate et Hérode. Pour maintenir l’ordre,
le centurion Abénadar fit cesser toute insulte pour ne pas indigner la
foule.
15 h 10 La
lune commença à s’écarter du soleil vers une direction opposée, on aurait dit
qu’elle tombait, et la lumière revint peu à peu. Les étoiles disparurent dès que
le soleil se remit à briller malgré le ciel sombre. Les pharisiens gagnaient en
arrogance à mesure que la lumière revenait, mais Abénadar ordonna à tous de se
tenir tranquilles.
Tremblement de terre | croix
45
La lumière revint et le seigneur dit :
—
Je suis pressé comme le raisin
pressé ici la première fois pour rendre tout mon sang jusqu’à ce que l’eau
vienne et que l’enveloppe devienne blanche, mais on ne fera plus de vin ici.
À une époque après le déluge, cette contrée
pierreuse était couverte de vignobles et de grandes prairies avec d’immenses
troupeaux, le vieux patriarche Japhet était entouré de nombreux enfants dont les
maisons étaient creusées dans la terre, avec des toits couverts de fleurs et
d’herbages, et des vignes tout autour. En présence de Japhet ses enfants
essayaient un nouveau moyen de presser le vin dans un tronc de bois creux avec
des leviers sur le côté. Jésus s’affaiblit et sa langue devint sèche, il dit :
—
J’ai soif. Ne pouviez-vous me
donner une goutte d’eau ? dit-il tristement à ses amis.
—
Nous avons oublié, seigneur,
répondit Jean.
—
Mes proches ont oublié de me donner
à boire afin que s’accomplisse ce qui est écrit. (Psaumes
69.21)
Cet oubli l’affecta beaucoup. Ils proposèrent
aux soldats de l’argent contre un peu d’eau, mais en vain, un soldat trempa une
éponge dans le vinaigre en ajoutant du fiel, mais le centurion Abénadar pressa
cette éponge pour n’y mettre que du vinaigre et l’éleva au bout de sa lance
jusqu’à Jésus qui aspira le vinaigre. Puis le seigneur dit :
—
Quand ma voix ne se fera plus
entendre la bouche des morts parlera.Psaumes
37.30, Job 33.22
—
Il blasphème encore, crièrent
quelques-uns.
Abénadar leur dit de se tenir tranquilles.
15 h 30
L’heure était venue. Jésus lutta contre la mort, une sueur froide sortit
de ses membres, il leva la tête au ciel et cria :
—
Tout est consommé. Abimon Père, je remets mon Esprit dans tes mains. Ps.
89.26, Ps. 31.5
L’appel à son Père passa au travers du ciel, de la terre et de l’enfer,
il rendit l’âme tête basse, et pour signe, un tremblement de terre fendit le roc
du Goulgolat, entraînant d’importants décombres à Iérusalem et dans tout le
pays, et Dieu renversa la nature pour accomplir les prophéties jusque dans les
profondeurs.
J’ai été sous ta garde dès
le sein maternel, tu as été mon Dieu dès le ventre de ma mère. Ne t’éloigne pas
de moi quand la détresse est proche, quand personne ne vient à mon secours. De
nombreux taureaux sont autour de moi, des taureaux de Basan m’entourent et
ouvrent leur gueule contre moi comme un lion qui rugit et déchire. Je suis comme
l’eau qui coule, tous mes os se séparent. Mon coeur fond comme la cire dans mes
entrailles. Ma force sèche comme l’argile et ma langue colle à mon palais. Tu me
réduis en poussière par la mort et des chiens m’encerclent, une bande de
scélérats rôdent autour de moi, ils ont percé mes mains et mes pieds. Je
pourrais compter tous mes os. Eux observent, ils me regardent, ils se partagent
mes vêtements, ils tirent au sort ma tunique. Mais toi Iehvah, ne t’éloigne pas,
car tu es ma force, viens vite à mon aide : protège mon âme de l’épée et ma vie
au pouvoir des chiens. Sauve-moi de la gueule du lion, délivre-moi des cornes du
buffle. Je publierai ton Nom parmi mes frères, je te célébrerai au milieu de
l’assemblée. Car le règne appartient à Iehvah qui domine les nations. Tous les
puissants de la terre mangeront en se prosternant, car ceux qui ne peuvent
conserver leur vie, tous ceux qui descendent dans la poussière, s’inclineront
devant lui. La postérité le servira et on parlera du seigneur à la génération
future qui viendra, elle annoncera sa justice, elle annoncera son oeuvre au
peuple nouveau-né. Psaumes 22.11
Son âme descendit dans les purgatoires dans un éclair avec Gabriel et un
groupe d’anges. Les anges firent descendre dans l’abîme de nombreux mauvais
esprits de la terre. Jésus fit monter des âmes dans leurs corps pour alerter les
non-pénitents et attester de lui. Ce signe se manifesta dans toute la
nature :
– dans leurs tombes des morts ressuscitèrent ; – dans
le Temple le voile se déchira et les murs s’écroulèrent ; – dans tout le
pays des bâtiments et des montagnes entières s’effondrèrent.
Jean et les dévotes s’étaient jetés sur le sol,
la grâce vint éclairer l’âme d’Abénadar, son cheval baissa la tête, il jeta sa
lance et frappa sa poitrine avec force, criant :
—
Béni est le tout-puissant Dieu
d’Abraham, d’Isaac et de Jacob. Cet homme est vraiment un tsadiq juste, le fils de Dieu.
Aux paroles de leur chef, plusieurs soldats
certifièrent avec lui que Jésus était le fils de Dieu et firent autant. Abénadar
remit son cheval et sa lance à l’officier de second rang, il ne voulait pas être
au service des adversaires pharisiens. Des gens se
convertirent ainsi que des pharisiens arrivés plus tard, beaucoup se frappaient
la poitrine et repartaient chez eux dans les larmes par la vallée de Gihon,
d’autres aux vêtements déchirés se jetaient de la poussière sur la tête. Ayant
dit quelques mots à ses soldats, Abénadar partit de la vallée de Gihon à la
vallée d’Hinnom, aux grottes où se réfugiaient les disciples, et leur annonça la
mort du seigneur, puis il repartit en ville vers Pilate.
Le seigneur payait aussi les dettes des
pécheurs par la mort de son corps : il s’était convulsé une dernière fois
et prit une blancheur livide après s’être vidé de son sang, ses plaies devinrent
des taches noires, la couronne d’épines sur sa tête, la langue baignée de
sang sortait de ses lèvres entrouvertes, son dos se raidit et ses mains se
relâchèrent sous les clous.
Les bandits
s’étaient tus malgré leurs douleurs et Dismas pria. Des pharisiens jetèrent des
pierres dans la fente du roc, mais s’en éloignèrent sous les critiques,
plusieurs d’entre eux se convertirent et retournèrent à Iérusalem très alarmés.
Plusieurs des dévotes retournèrent en ville. Cassius et cinq autres soldats
étaient près de la plateforme, le reste des cinquante (50) soldats s’étaient
postés au portique de la ville et attendaient le renfort de cinq cents (500)
soldats. On vit des disciples loin dans la
vallée et sur les hauteurs.
46
Jonadab était revenu en hâte au Temple, mais le
sacrifice des agneaux fut interrompu dû aux brouillards, avant le tremblement de
terre et l’apparition des morts. Il retourna à Bethléem, car il avait des
enfants en bas âge, sa mère et sa femme étaient aussi malades. Il reprit la
route le coeur changé, bien que son père et Joseph étaient frères, il avait eu
peu d’égard à Jésus. À mi-chemin sa femme avec ses enfants et sa mère vinrent à
sa rencontre en bonne santé. Elles lui racontèrent comment, un peu après midi,
une femme était entrée chez eux en leur disant :
—
Levez-vous pour aller au-devant de
Jonadab qui a couvert un homme nu.Ésaie
58.7
Un bien-être les envahit et elles se levèrent
parfaitement bien. La femme avait disparu en laissant un doux parfum dans la
maison. Jonadab parla du crucifiement de Jésus dont il avait couvert la nudité.
—
Ce fils de Joseph et Marie était
bien le saint prophète, le messie d’Israel, se dirent-ils.
Ils déchirèrent leurs vêtements et versèrent
des larmes en remerciant Dieu d’un si grand bienfait pour une charité si simple.
Ils se parlèrent des signes effrayants qui s’étaient manifestés en ce jour sur
la terre et au ciel. Ils repartirent chez eux émus jusqu’au fond de l’âme, et
après avoir mis ses affaires en ordre, Jonadab se réunit plus tard à la
communauté. Les morts ressuscités se montrèrent aux disciples cachés pour leur
donner des avertissements, ailleurs d’autres ressuscités se présentèrent chez
leur parenté pour rendre témoignage de la mission de Jésus. Aucun des
ressuscités n’était de la parenté de Jésus. Un homme de grande piété nommé
Sadoch fut un des premiers qui reprit son corps pour se montrer à de nombreuses
personnes dans les environs d’Hébron. Il avait vécu cent (100) ans avant Jésus
dans le désir de la venue du messie, et autant pour les anciens de sa
connaissance, il avait aussi reçu quelques révélations. Il avait fondé une
communauté d’esséniens après avoir partagé tous ses biens entre les pauvres et
le Temple. Il ressuscita une seconde fois pour suivre Jésus et parcourut le pays
dans son cortège. Les sombres brouillards en plein jour et le tremblement de
terre eurent de graves conséquences en dehors de Iérusalem, dans tout le
pays :
-
à Thirza, les tours de la prison
avec certains bâtiments s’étaient écroulés ;
-
à Khaboul, près de Tyr et de Sidon,
il y eut des décombres à de nombreux endroits ;
-
en Galilée, les nombreux bâtiments
appartenant aux pharisiens les plus inconciliables furent en ruine, les
décombres avaient écrasé leurs femmes et leurs enfants lorsqu’ils étaient à la
fête ;
-
à Capharnaum, beaucoup de bâtiments
s’étaient effondrés ;
-
au lac de Génésareth, entre
Tibériade et le jardin du centurion Zorobabel de Capharnaum, les habitats des
esclaves étaient presque tous détruits et le mur de pierre devant ce jardin
s’était fendu ;
-
le lac déborda dans la vallée sur 2
km jusqu’à Capharnaum, mais les habitations de Pierre et la dévote mère ne
furent pas touchées ;
-
le lac était devenu très agité et
ses rives affaissées par endroits surtout au sud-est de Tarichée ;
-
à la sortie du lac, entre le lac et
le marais, la chaussée pierreuse qui donnait une constante au Jourdain fut
détruite dans toute sa longueur sous le tremblement de terre ;
-
à l’est du lac, des désastres aussi
à Gergésa, à Gérasa et dans la région de Chorazin où eut lieu la seconde
multiplication des pains, la pierre s’était fendue en deux quand la
montagne trembla ;
-
dans la Décapole, des villes
complètes étaient en ruine ;
-
aussi en Asie à certains endroits
dans Nicée
Turquie, surtout à Panéas ainsi qu’à l’est et au
nord-est.
Après la fête, les pharisiens de la Galilée
supérieure retrouvèrent leurs maisons en ruine, ceux qui l’apprirent à Iérusalem
furent moins arrogants contre la communauté à la Pentecôte suivante. Le temple
de Garizim en Samarie s’écroula en partie, le toit s’était affaissé sur la
fontaine où était l’idole. La synagogue de Nazareth était à moitié écroulée
ainsi que la montagne où ils avaient voulu jeter le seigneur. Rien ne changea
dans Machérunte et autres villes d’Hérode, ils étaient comme ces hommes qui ne
furent pas renversés au jardin des oliviers, par conséquent ne se relèvent pas.
De plus après à ces secousses, un nombre de montagnes, de vallées et de villes
furent bouleversées, le Jourdain changea son cours à différents endroits. Des
groupements de mauvais esprits partirent en grand nombre lorsque les bâtiments
et les montagnes s’affaissèrent à plusieurs endroits, ces secousses rappelaient
les convulsions des possédés avant que le mal se retire. Là où les démons
avaient jeté les pourceaux dans un marais de Gergésa, une foule d’esprits impurs
se jeta dans l’abîme sous la forme d’une fumée noirâtre lorsqu’une part de la
montagne s’écroula dans le marais. Dans un port de Nicée, un surveillant païen
nommé Thramus entendit un fracas et aperçut de sombres figures planer sur le
port. Ils lui crièrent :
—
Fais sortir les bateaux d’ici si tu
veux les conserver, car nous devons entrer dans l’abîme, le grand Pan est mort.
C’est sous le pouvoir de Dieu que ces mauvais
esprits avertirent l’honnête homme en avouant leur défaite. Dès les bateaux en
sûreté, un grand orage se leva et il entendit leurs hurlements quand les démons
se jetèrent dans la mer. La ville aussi s’effondra à moitié, mais sa maison
resta intacte, il fit bientôt un grand voyage et annonça la mort du grand Pan.
C’est ainsi qu’on appelait le sauveur.
Mort dans le Temple| croix
Les brouillards de
ténèbres étant passés, les chefs-sacrificateurs du Temple s’étaient vantés du
retour à la normale et reprirent les
sacrifices, ainsi que le lavage et l’immolation des agneaux. Les
sacrificateurs procédaient aux longues files à cadence régulière sous les chants
des cantiques et son des trompettes. Mais après ces ténèbres des tremblements de
terre secouèrent le Temple ainsi que les bâtiments de la ville. Ceux qui
fuyaient se retrouvèrent devant les ressuscités qui les menaçaient s’ils ne se
repentaient pas. La terreur était partout. Le voile et les murs du Temple se
fendirent avec fracas au premier tremblement de terre. Les deux grandes colonnes
à l’entrée du sanctuaire se déplacèrent, le linteau tomba et le voile se déchira
dans toute sa longueur. Ce voile de plusieurs couleurs avait des cercles
astronomiques et d’autres représentations comme le serpent d’airain. Le
sanctuaire était à la vue de tous ; une pierre du mur côté nord s’était
détachée près de la cellule où priait le vieux Siméon. La voûte de la galerie
était tombée, leurs colonnes déplacées, les planchers et les seuils de plusieurs
salles affaissés. Des cris se firent entendre dans le Temple où fourmillaient
les juifs venus en grand nombre de toutes parts du pays et ailleurs.
La panique n’était pas encore générale et les
sacrifices continuaient par endroits, mais dès que les morts ressuscités
entrèrent dans le Temple, ils laissèrent tout et coururent précipitamment vers
les marches du Temple dans la cohue. La garde maintenait l’ordre à la forteresse
Antonia, et malgré la frayeur générale, la
multitude se dispersa, et chacun revint chez soi dans la crainte -
sentiment que les pharisiens réprimèrent chez le plus grand nombre. La
résistance satanique de Caïphe et ses partisans à la nuque raide fit dévier le
retour universel, et les juifs en majorité ne virent pas ces avertissements
comme des témoignages au messie. Zacharie, le grand cohen assassiné entre le
Temple et l’autel, était dans le sanctuaire, faisant des menaces contre les
meurtres de Jean le baptiste, de Zacharie et des prophètes, il se montra aux
sacrificateurs se trouvant dans le sanctuaire. Il était passé par le mur où la
pierre s’était détachée. Son tombeau se trouvait sous le mur du Temple, il en
sortit quand le tombeau s’écroula, mais il n’y retourna pas. Les deux fils du
grand cohen Simon le-juste, grand-père de Siméon qui prophétisa à la
présentation de Jésus, vinrent jusqu’à la grande chaire du Temple et firent des
menaces contre les meurtres des prophètes. Ils dirent que les sacrifices avaient
cessé et que tous iraient joindre la doctrine du crucifié. Leur caveau se
trouvait au pied de la montagne du Temple, ils y retournèrent avant la mise au
tombeau du seigneur. Jérémie le prophète fils de Hilkija, sacrificateur d’Anatot,
apparut près de l’autel et annonça la fin de
l’ancien sacrifice et le début du nouveau. Les portes du sanctuaire s’ouvrirent
avec fracas et une voix se mit à crier :
—
Sortons d’ici. (Esaie
52.11)
Les anges
partirent et la voix des anges fit entendre des menaces. Aussitôt les
sacrificateurs ressuscités
quittèrent le Temple et retournèrent dans leurs tombeaux. Nicodème, Joseph
d’Arimathie et plusieurs autres quittèrent le Temple aussi. Après leur
conversion plusieurs des trente-deux (32) pharisiens arrivés plus tard au
Goulgolat vinrent faire des reproches à Ananus et Caïphe puis ils quittèrent le
Temple à la vue de tous ces signes.
L’autel des
parfums s’ébranla, un encensoir tomba, l’armoire des écritures bascula, tous les
rouleaux se renversèrent, et la chaire du vestibule s’affaissa. Ananus courut
d’une pièce à l’autre du Temple, terrorisé, gémissant en se tordant, lui qui
s’était acharné contre le messie, qui avait dirigé toutes les actions en secret
contre lui et les apôtres. Ses partisans l’amenèrent dans un lieu caché, et
Caïphe le prit dans les bras, mais en vain, la vue des morts ressuscités l’avait
rendu fou. Caïphe aussi était dans la terreur, mais plein d’orgueil et
d’obstination démoniaque : il mit sous silence la colère de Dieu
contre le
sanhédrin et ordonna de cacher les prodiges dont le
peuple n’eut pas connaissance, faisant répandre la fausse rumeur que les partisans du galiléen avaient causé le courroux céleste
en entrant dans le Temple en état d’impureté. Il fit aussi répandre la rumeur
que seuls des ennemis à la loi pouvaient avoir soulevé de telles terreurs, et
que ces terreurs venaient des sortilèges de Jésus, cet homme qui avait troublé
la paix du Temple dans sa mort comme dans sa vie. Il calmait les uns et menaçait
les autres, et plusieurs cachèrent leurs sentiments. Les sacrificateurs qui
avaient entendu les morts ressuscités dans le sanctuaire cachèrent les
avertissements donnés par lâcheté après qu’il leur fut interdit d’en parler. Les
cérémonies reprirent dès que le Temple fut purifié, mais de nombreux agneaux ne
furent pas immolés suite à la déroute du peuple. Les connaissances de Jean qui
l’avaient fait entrer avec Pierre se convertirent et se réfugièrent avec les
disciples. Dans les tremblements de terre qui suivirent, une partie du foyer où
Pierre avait renié s’affaissa ainsi que l’escalier du tribunal de Caïphe ;
le grand cohen Simon le-juste apparut là aussi et prononça de terribles paroles
sur l’injuste jugement des membres du sanhédrin. Une centaine de morts de toutes
les époques sortirent de leurs tombeaux pour se présenter dans Iérusalem et ses
environs, allant souvent par deux témoigner en faveur de Jésus dans certains
lieux, parlant sévèrement aux juifs qui s’enfuyaient à leur vue. La plupart de
leurs tombeaux étaient dans les vallées hors de la ville, beaucoup dans les
quartiers nouvellement annexés, surtout au nord-ouest dans les jardins entre les
portiques de l’angle et la route du crucifiement, mais aussi autour et sous le
Temple, cachés ou ignorés. Seuls les morts envoyés par Jésus ressuscitèrent
quand les tombeaux s’ouvrirent, ils entraient chez leur parenté à visage
découvert et témoignaient en faveur de Jésus, mais menaçaient ceux qui avaient
pris part à sa condamnation. Le mouvement de leurs pieds ne se voyait pas, ils
planaient au ras du sol, les mains bandées, le voile relevé sur la tête, le
visage pâle se détachait sur leur longue barbe, leur voix était étrange. Les
juifs se regroupaient pour les écouter de loin et fuyaient dès ils avançaient.
L’épouvante était partout dans la ville, beaucoup se cachèrent chez eux dans les
pièces les plus sombres, et à cause de la confusion, peu de gens mangèrent
l’agneau en soirée. Il y eut aussi des apparitions après la résurrection du
messie. Les morts passaient d’une rue à l’autre avec rapidité, se faisant
entendre sans s’arrêter devant ceux qu’ils croisaient sur leur chemin. Ils
s’arrêtèrent à l’endroit où le messie avait été condamné et crièrent :
—
À Dieu la gloire, malheur aux
meurtriers de Jésus.
—
Juge sanguinaire, dirent-ils devant
le palais de Pilate.
Ce palais s’était
entièrement ébranlé et le sol affaissé. La pierre où Jésus fut hué par la foule
était fendue. La cour du tribunal voisin où les innocents égorgés par Hérode
étaient enterrés s’était affaissée. Bien que les murs avaient été sectionnés ou
effondrés à d’autres endroits de la ville, aucun bâtiment ne fut détruit en
totalité. Pris de panique, Pilate se cachait d’une pièce à l’autre depuis que
les morts lui avaient reproché son jugement injuste, quand ils se montrèrent
dans sa cour. Il avait cru voir les dieux du prophète Jésus et courut offrir de
l’encens à ses idoles et leur faire des voeux pour contrecarrer les dieux du
galiléen. Hérode de son côté avait tout fait fermer dans son palais à
Iérusalem.
16 h
Dans l’heure même où les morts ressuscités revinrent dans leurs tombes,
d’autres bouleversements et des signes de toutes sortes arrivèrent dans d’autres
régions du pays, mais aussi dans d’autres pays.
Au retour du calme Pilate reçut des rapports de
tous côtés tandis que le sanhédrin envoyait pour faire rompre les jambes des
crucifiés et les achever pour qu’ils ne restent pas en croix le soir même au
shabat de Pesah. Joseph d’Arimathie vint en personne demander la permission de
déposer le corps de Jésus dans son tombeau creusé près du Goulgolat. Il fut
troublé de voir un homme si considérable vouloir rendre les derniers honneurs à
celui qu’il avait fait si bassement crucifier.
—
Est-il donc déjà mort... dit-il.
Il fit venir Abénadar qui lui rapporta les
dernières paroles du seigneur ainsi que le roc fendu sous le tremblement, et
Pilate dépêcha Abénadar derrière les mercenaires qu’ils venaient d’envoyer.
Joseph partit acheter un linceul de très fin coton de six aunes, plus large que
long. Nicodème avait déjà acheté les plantes aromatiques. de La maison de
Nicodème, les serviteurs prirent des outils pour descendre le corps de Jésus et
emportèrent sur une civière, échelle, marteau, cheville, outres d’eau,
vases et éponges.
48
Il n’y avait plus que Jean, la dévote mère,
Marie-Magdala, Marie de Cléophas et Salomé devant la croix, et les quelques
soldats un peu plus loin avec Cassius à cheval. Ce sous-officier de vingt-cinq
(25) ans était empressé de nature, ses yeux louches et faibles portaient à la
moquerie lorsqu’il prenait un air important. Les soldats avaient planté leurs
lances dans le sol et parlaient à distance avec d’autres soldats. Les six
mercenaires arrivèrent pour briser les jambes des crucifiés avec leurs
outils ; cordes, pelles, échelles et barres de fer. Ils posèrent les
échelles sur la croix de Jésus, mais Jean leur demanda encore un moment, alors
ils allèrent sur les croix des bandits. Deux brisèrent leurs coudes avec les
barres, le troisième brisa leurs jambes. Gesmas criait horriblement, alors ils
frappèrent trois coups sur sa poitrine pour l’achever, Dismas mourut de la même
façon, mais il reverra le sauveur. Ils détachèrent les cordes et leurs corps
tombèrent sur le sol, ils les traînèrent dans une fosse entre le mont Goulgolat
et la muraille de la ville. Devant leurs procédés barbares face aux dévotes,
Cassius réalisa une prophétie sous l’inspiration, et avançant son cheval
entre Dismas et Jésus et prenant sa lance de la fente du roc, il l’enfonça à
deux mains au côté droit du seigneur ; la pointe transperça le coeur et
ressortit un peu sous le sein gauche. Quand il la retira, une importante
quantité de sang et d’eau rejaillit. Dès qu’il en fut arrosé, il sauta de son
cheval, frappa sa poitrine à genoux et le déclara fils de Dieu : son âme et
son corps étaient guéris, ses yeux avaient retrouvé toute leur force, il
louangeait Dieu à genoux. Les soldats aussi se mirent à genoux et frappèrent
leur poitrine en confessant Jésus. Le sang et l’eau de Jésus coula jusque dans
la fente du roc, Jean et la dévote mère recueillirent ce précieux liquide dans
des flacons et essuyèrent avec des linges avec l’aide de Cassius. Les
mercenaires s’en allèrent après avoir reçu l’ordre de ne pas toucher au corps de
Jésus.
16 h 15 Des
serviteurs vinrent les informer que Nicodème et Joseph viendraient déposer le
corps du seigneur dans un tombeau. Jean retourna au mont Sion pour chercher des
nécessités avec les dévotes et pour que la dévote mère reprenne des forces dans
son petit logis près de la salle à manger. Ils passèrent par le portique sud qui
fait face à Bethléem, car le plus proche portique était fermé et sous garde. À
l’est du mont Goulgolat, au nord de la muraille, il y avait des tombeaux au
milieu de jardins et de vignobles. La croix fut enterrée au pied du Goulgolat
parmi de beaux vignobles en terrasse.
49
Le premier portique à l’est de Iérusalem fait
face au quartier d’Ophel. Le portique des brebis au nord-est le plus proche de
l’angle nord-est du Temple. Entre ces deux, un autre assez récent menant à l’est
du Temple traversait les rues des tailleurs de pierres et autres ouvriers dont
les maisons étaient appuyées aux fondations du Temple. Elles appartenaient
presque toutes à Nicodème qui les avait fait bâtir, ils lui versaient un loyer,
soit en argent, soit en travaillant pour lui, étant en rapport permanent avec
lui et son ami Joseph d’Arimathie qui exploitait de grandes carrières de pierre
dans sa région natale. Nicodème avait fait un portique donnant sur ces rues
nommé le portique de Moriah, il venait d’être terminé quand Jésus y entra le
dimanche précédent Pesah. Le seigneur entra par ce nouveau portique de Nicodème
et fut enterré dans le tombeau neuf de Joseph d’Arimathie. Ce portique fut
ensuite muré, il y avait à côté un portique muré que les turcs appellent la
porte d’or. Dans une ancienne tradition, les croyants devaient y passer.
50
Cinq disciples venus de Béthanie jusqu’au pied
du Goulgolat avaient levé leurs yeux vers la croix puis ils se sont discrètement
éloignés. Nicodème et Joseph d’Arimathie vinrent trois fois, mais seulement aux
environs ; la première quand ils rachetèrent les vêtements de Jésus, la
seconde pour voir si la foule se dispersait, puis avant de faire les
arrangements pour la descente du corps. Des serviteurs prirent dans la grange de
Nicodème deux échelles qui ressemblaient à des perches avec des pièces
transversales et des crochets. Nicodème portait cent (100) livres de plantes
aromatiques dans des sacs d’écorce et des paquets d’herbes dans des sacs de cuir
ou parchemin. Joseph apportait une boite d’onguent et du feu dans une lanterne
fermée. Leurs serviteurs qui les devançaient passèrent par le portique que
prirent Jean et les dévotes, cinq dévotes les suivirent à distance avec de gros
paquets de tissu sous leurs manteaux. Elles s’étaient enveloppées le corps d’un
drap qui couvrait aussi la tête suivant la coutume des femmes pieuses de sortir
le soir enveloppées d’un drap d’une bonne aune de largeur, qui servait aussi
d’habit de deuil, elles l’enveloppaient si serré qu’elles pouvaient à peine
marcher. Joseph et Nicodème aussi s’étaient mis en deuil, manches noires, large
ceinture, long manteau gris tiré sur la tête, qui leur servait aussi à cacher ce
qu’ils portaient. Les rues étaient désertes, tous s’étaient enfermés dans leur
maison, la plupart dans le repentir, un petit nombre seulement observèrent la
fête.
Arrivés au portique, ils le trouvèrent fermé et
gardé par des soldats qui avaient en vain essayé de l’ouvrir, la porte était
bloquée depuis le tremblement de terre. Les mercenaires chargés d’achever les
crucifiés avaient dû passer par une autre porte. Après avoir présenté le
laissez-passer signé de Pilate, Joseph avança la main sur la serrure avec
Nicodème et la porte s’ouvrit d’elle-même au grand étonnement de tous.
Maintenant sur le mont Goulgolat avec leurs serviteurs, les dévotes, Cassius et
plusieurs soldats convertis se tenant à distance, discrets et respectueux, les
femmes déposèrent ce qu’elles avaient apporté ; linge, aromates, eau,
éponges, récipients, ils étaient prêts à descendre le corps du seigneur avec le
centurion Abénadar qui venait d’arriver. Cassius lui parla du miracle de la
guérison de sa vue et ils furent pleins d’émotions et de gratitude avec une
gravité solennelle. Cela ne détourna pas Marie-Magdala de sa douleur.
Jacob le plus jeune des trois frères fut grandement aimé de
Jésus Christ, et lui aimait tellement son maître que quand il fut crucifié il ne
voulut pas goûter de viande jusqu’à ce qu’il l’ait vu ressuscité, ce qu’il se
souvenait lui avoir été prédit à lui et ses frères par Jésus Christ pendant
qu’il vivait sur terre. Comme à Marie Magdala et Pierre Céphas, il lui apparut
pour confirmer son disciple en la foi, et de peur qu’il jeûne trop longtemps, il
l’incita à manger en lui présentant un rayon de miel. De s. Thomas, des s.
Jacques, Simon, et Jude, frères - Histoire apostolique, Abdias 1564
Les échelles posées sur la croix, Nicodème et
Joseph retirèrent les clous de son corps après l’avoir attaché aux bras et aux
genoux. Abénadar retira le grand clou de ses pieds, que Cassius mit devant la
dévote mère. Joseph et Nicodème descendirent le corps par étape jusqu’à ce
qu’Abénadar puisse prendre les jambes sans son escabeau. Ils descendaient
l’échelle comme s’ils craignaient de lui causer quelque douleur, levant les bras
au ciel à tout moment et versant des larmes, ne rompant le silence que pour
s’avertir et s’entraider à mi-voix, les coups de marteau leur rappelaient ses
souffrances, ils leur semblaient entendre ses gémissements de douleur. Ils le
drapèrent des hanches aux genoux et le déposèrent dans les bras que sa mère
tendait, le corps déposé sur un drap.
51
Tout fut disposé à faciliter les derniers
devoirs que cette mère épuisée de douleur devait rendre à son fils. Elle couvrit
de baisers ses joues couvertes de sang, Marie d’Héli sa soeur plus âgée suivait
de loin. Jean fit les messages entre hommes et femmes, et leur prêtait
assistance. Tous les mécontents étaient retournés en ville, l’empereur Tibère
mourut cinq ans après le crucifiement du seigneur. Les soldats sur la plateforme
formaient une garde pour empêcher tout dérangement à l’égard du corps du messie.
Marie de Cléophas, Salomé et Véronique tendaient récipients, éponges, linges,
onguents et aromates lorsque nécessaire et se tenaient attentives à distance, il
y avait près d’elles des outres de cuir et un récipient plein d’eau sur un feu
de charbon ; elles tendaient des éponges et des récipients pleins d’eau
pure, qu’elles pressaient ensuite dans les outres de cuir, pendant que la dévote
mère lavait le corps du Christ. Elle lui retira la couronne d’épines qu’après
avoir coupé les épines une à une, qu’elle retirait avec des tenailles arrondies,
et les montrait tristement. Une fois la tête nettoyée, elle l’enveloppa en
partie avec un voile avant de s’occuper du torse. Ses os, de toute la poitrine
jusqu’aux coudes, étaient disloqués et ne pouvait se plier. La croix avait
entaillée l’épaule et laissé une profonde blessure, et le torse était
entièrement lacéré et couvert de lésions. Il avait sur le côté droit une large
incision par où la lance avait percé son coeur. Marie-Magdala baignait les pieds
du seigneur de ses nombreuses larmes et les essuya avec sa chevelure. Quand sa
tête, sa poitrine et ses pieds furent nettoyés, la dévote mère mit un voile sur
le torse de ce corps vidé de sang, puis elle mit du baume sur ses plaies à
commencer par la tête. Les dévotes tendaient une boite d’un précieux baume dont
elle enduisait les plaies en ajoutant des aromates. Elle en mit dans les
oreilles, les narines, dans la fente du côté et aux trous des mains.
Marie-Magdala mit du baume aux trous des pieds du seigneur sans cesser de les
couvrir de larmes et d’y coller son visage. L’eau qui avait servi était déversée
dans les outres de cuir, Cassius avec d’autres allèrent plusieurs fois
puiser à la fontaine Gihon. Quand toutes ses blessures furent couvertes de
baume, Marie enveloppa de nouveau sa tête dans des linges sans encore couvrir
son visage, et ferma les yeux et la bouche de Jésus. Elle posa son visage sur
celui de son fils. Joseph et Nicodème attendaient, ils prièrent Jean de dire à
Marie de se séparer du corps pour qu’ils puissent finir de l’embaumer, car le
shabat de Pesah approchait. La dévote mère l’embrassa encore une fois puis les
hommes le prirent par le drap et le portèrent à courte distance sur une belle
pierre. Ils le lavèrent jusqu’à ce que les éponges rendent une eau limpide, puis
ils versèrent de l’eau de myrrhe sur tout le corps et lui firent reprendre sa
longueur. Il était encore dans la position du crucifié,
les reins et les genoux recourbés. Ils couvrirent ses reins d’un drap rempli de
paquets d’herbes, ils y répandirent une poudre et serrèrent un autre drap
par-dessus. Toutes les plaies à présent couvertes de baume et d’aromates, et les
encens le long des jambes, ils ‘enveloppèrent alors de haut en bas.
Jean vint chercher Marie et les dévotes pour
déposer des paquets d’herbes aromatiques près du cou avec une poudre
odoriférante, que Marie rattacha avec le fin voile reçu de la femme de Pilate.
Marie-Magdala déversa un flacon de baume au niveau de la plaie droite et les
dévotes placèrent des herbes aux mains et aux pieds. Les hommes l’emmaillotèrent
dans un drap blanc et roulèrent une large bande autour de la tête et sur tout le
corps. Enfin ils le couchèrent sur le drap de six aunes et l’enveloppèrent en
diagonale, puis ils se mirent à genoux autour de lui pour un adieu. Pendant
qu’ils priaient, toutes les plaies du corps du messie s’imprimèrent sur le drap
du dessus, en rouge et brun. Ils embrassèrent avec respect ce merveilleux
portrait et pleurèrent de joie en voyant que le drap du dessous était aussi
blanc qu’avant. Étant enveloppé en diagonale, il fallait ramener ensemble les
deux coins du drap pour avoir l’image complète du corps. Ce drap et les autres
linges furent conservés par les proches de Jésus, mais le drap se fit
arracher sous le bras et tomba deux fois aux mains des juifs, il fut plus tard
honoré en divers endroits ; il y eut aussi une contestation à son sujet et
il fut jeté au feu, mais il vola hors des flammes et tomba aux mains d’un
croyant. À la prière de certains saints, trois empreintes sur d’autres linges
furent obtenues par simple application, ces copies ont opéré de grands miracles
dans l’assemblée. L’original, un peu endommagé et déchiré par endroits, fut
honoré en Orient chez des croyants dont la ville est dans un pays voisin de la
patrie des trois rois mages.
52
Nicodème et Joseph portèrent la civière en
avant sur leurs épaules, Abénadar et Jean en arrière, suivis des douze (12)
dévotes ; sa mère Marie, Marie d’Héli, Marie-Magdala, Marie de Cléophas,
Séraphia Véronique, Jeanne Chusa, Marie mère de Marc, Salomé femme de Zébédé,
Marie-Salomé, Salomé de Iérusalem, Suzanne et Anne les nièces de Joseph le
charpentier ; Cassius et les soldats fermaient la procession. Ils
marchèrent sept minutes de la vallée au jardin en chantant des psaumes. Jacob
le-majeur, le frère de Jean, les aperçut de l’autre côté et l’annonça aux autres
dans les grottes. Derrière quelques palmiers à l’entrée du jardin, à droite du
tombeau, se trouvaient les pieux qui servaient à rouler la pierre. Ils avaient
posé sur le seuil une planche couverte d’un drap où ils posèrent le corps.
Nicodème, Joseph, Jean et Abénadar le rentrèrent à l’intérieur, deux soldats
passés en avant éclairaient l’intérieur de leurs flambeaux. Des parfums avaient
été brûlés. À la lueur des flambeaux ils mirent des aromates dans les creux de
la couche et étendirent un drap par-dessus. Ils exprimèrent de nouveau leur
affection et sortirent pour faire place à la dévote mère. Ils revinrent ensuite
rabattre le drap et le recouvrir d’une couverture brune, puis ils fermèrent les
battants de la porte en métal dont les deux bâtons faisaient l’effet d’une
croix. Ils roulèrent la lourde pierre avec les pieux pour fermer le tombeau.
Plusieurs disciples venus suite au récit d’Abénadar tournaient aux alentours du
jardin d’un air triste et repartirent ensuite.
53
Le shabat allait commencer. Nicodème et Joseph
revinrent à Iérusalem par une petite porte du jardin faite dans la muraille de
la ville, une faveur accordée à Joseph.
Cette porte et celle de la salle à manger leur
seront ouvertes quand ils frapperaient. Marie d’Héli, Marie mère de Marc et
quelques dévotes revinrent en ville tandis que Jean et les dévotes retournèrent
prier au Goulgolat. Les serviteurs reprirent les outils et les soldats
rejoignirent la garde à la porte de la ville. Cassius partit dire à Pilate ce
qu’il avait vu et promit de lui faire un rapport complet sur ce qui arriverait
s’il se voyait confier le commandement de la garde du tombeau. Le superstitieux
Pilate lui avait dit de laisser sa lance à la porte.
Des soldats vinrent enterrer les trois croix après leur départ du
Goulgolat.
Caïphe et les principaux des juifs dépêchèrent
sept soldats du Temple pour garder le tombeau pendant trois jours. Pilate ne
voulait plus se mêler de cette affaire cependant il leur donna Cassius, qui lui
ferait un rapport de ce qu’il verrait. Les soldats du Temple sortirent de la
ville avant le lever du soleil avec des lanternes sur perche, sitôt arrivés ils
s’assurèrent de la présence du corps et posèrent une corde à la porte du tombeau
et une seconde sur la grosse pierre, qu’ils scellèrent d’un cachet. Ils
gardaient en avant à tour de rôle, assis à la petite porte de la muraille.
Cassius ne quittait pas l’entrée du tombeau, il avait reçu de grandes grâces
intérieures et l’intelligence de nombreux mystères ; il était entièrement
transformé, devenu un nouvel homme, et passa toute la journée dans la pénitence,
l’action de grâces et l’adoration. Dans le tombeau, le corps du seigneur était
entouré de splendeur, avec deux anges en contemplation à ses côtés.
Joseph et Nicodème revirent les deux
Jacob avec Pierre, ce fut un grand moment de chagrin, tous pleuraient,
Pierre Céphas se reprochait son absence et leur témoigna sa gratitude. Ils
dirent de nouveau que la porte de la salle à manger leur serait ouverte quand
ils frapperaient puis ils partirent à différents endroits rassembler les
disciples dispersés. À leur retour du tombeau, les dévotes allumèrent la lampe
suspendue au centre de la salle et vinrent se placer en dessous, autour de la
dévote mère. Elles prièrent à tour de rôle avec recueillement et tristesse, et
prirent un petit goûter. Elles avaient aménagé dans cette grande salle des
cellules cloisonnées de tapis et de panneaux pour pouvoir y passer la nuit.
Abénadar et les apôtres allèrent dans la salle à manger, les disciples vont
petit à petit venir les rejoindre. Ils passèrent quelques minutes à se dire ce
qu’ils avaient vu et à pleurer, ils prirent aussi un peu de nourriture. Les
hommes, une vingtaine, mirent leurs longs
habits blancs avec leur ceinture pour l’observance du shabat. Ils se
regroupèrent sous une lampe pour prier, plus souvent en silence, car ils se
succédaient pour la lecture de la Torah et des prières,
des nouveaux venaient de temps en temps. Bien qu’ils avaient mangé l’agneau la
veille avec Jésus dans cette même salle à manger, ils mangèrent ces agneaux
tristement et sans cérémonie.
Lazare arriva de Béthanie dans la nuit avec sa soeur Marthe etMaroni la veuve de Naim, Dina la samaritaine et Mara la suphanite.Lazare rejoignit les disciples dans la
salle à manger. On leur raconta le crucifiement et la mise au tombeau du
seigneur. Ils se séparèrent pour se reposer tard en soirée et plusieurs
repartirent dans leur logis habituel. Joseph d’Arimathie et les disciples
accompagnèrent les dévotes qui voulaient retourner chez elles en ville. Tandis
qu’ils marchaient, longeant tristement les rues de Sion, Joseph fut enlevé près
du palais de Caïphe par des païens armés qui se jetèrent sur eux et prirent
Joseph, les autres s’enfuirent. Ils l’enfermèrent dans une prison près du
tribunal sur ordre de Caïphe, ce dernier voulait cacher sa disparition et le
laisser mourir de faim. Les dévotes restées dans la maison prirent une cellule
pour y passer la nuit ; elles restèrent assises quelque temps en silence,
appuyées sur la couverture roulée contre le mur, puis après avoir déroulé
la couverture et retiré leurs souliers et leur ceinture, elles se voilèrent de
la tête aux pieds selon leur habitude et essayèrent de trouver un peu de
sommeil.
Minuit
Elles se rassemblèrent sous la lampe autour
de la dévote mère pour la veille de nuit, particulièrement en cette nuit de
Pesah et de deuil.
3 h
Jean et quelques disciples vinrent frapper à leur porte et elles
prirent aussitôt leurs manteaux pour le suivre jusqu’au Temple selon la coutume
des juifs pieux de se rendre au Temple avant le lever du soleil après le repas
de l’agneau. Le Temple ouvrait de très bonne heure pour les sacrifices, mais ils
l’avaient considéré comme impur par le prodige des ressuscités et tout était
délaissé depuis que les cérémonies avaient été interrompues. La dévote mère
venait également prendre congé du Temple où elle avait grandi dans l’adoration
du saint des saints, jusqu’à le porter dans son sein, véritable agneau sacrifié
la veille. Le Temple ouvert et les lampes allumées, le parvis des sacrificateurs
était accessible, il était vide, sans aucune présence, et tout était en
désordre. Les neveux de Joseph d’Arimathie et les fils de Siméon étaient
surveillants au Temple, ils se joignirent aux dévotes et leur rapportèrent en
quelques mots les incidents de la veille, inquiets pour leur oncle en prison.
Ils regardèrent avec effroi ces signes de la colère de Dieu qu’ils adoraient par
leur silence, rien n’était encore réparé, les dommages dus au tremblement de
terre menaçaient de s’effondrer ; le mur séparant le parvis du sanctuaire
s’était effondré, les colonnes devant le sanctuaire étaient inclinées, le
linteau décroché, et le voile déchiré dans toute la longueur pendant de chaque
côté. Une grosse pierre s’était détachée du mur du parvis, côté nord, près de la
cellule du vieux Siméon, là même où Zacharie apparut. Les dévotes entrèrent dans
cette brèche et virent l’intérieur du saint des saints à travers le rideau
déchiré, ce qui normalement n’était pas permis. Partout des crevasses dans les
murs et les dalles renfoncées, et toutes les colonnes inclinées.
La dévote mère alla aux endroits que Jésus
avait sanctifiés, exprimant ses sentiments par de touchantes paroles, se
prosternant avec larmes pour les chérir et
y poser un baiser, imitée par ses compagnes. L’amour des lieux sanctifiés
rend un sûr témoignage à Dieu et à son pouvoir, et les pieux juifs les
embrassent et se bénissent en les touchant souvent à genoux, en signe de respect
et d’humilité. Les dévotes avaient un vénérable respect des enseignements de
Jésus, de son vivant à sa mort, par le saint-sacrement dorénavant pour tous les
siècles. Les dévotes traversèrent le Temple avec solennité, Marie leur montra
l’endroit où elle fut présentée enfant, où elle avait grandi, où elle fut
confiée à Joseph, où Jésus fut présenté au vieux Siméon, où Anne et lui avaient
prophétisé. La prophétie s’était réalisée, le glaive avait percé son âme. Elle
leur montra où Jésus avait enseigné enfant, elle embrassa respectueusement la
chaire. Elles s’arrêtèrent aussi près du tronc où la veuve avait donné son
dernier denier, où aussi Jésus avait pardonné à la femme adultère. Après ces
hommages des lieux sanctifiés par le messie, elles rentrèrent à Sion avec
espoir. En ce jour de désolation, alors que la dévote Marie se détachait du
Temple, elle se souvint que Jésus avait pleuré sur le Temple et dit : Renversez
ce Temple et je le rebâtirai en trois jours.
5 h
De retour dans la salle à manger, Jean et les disciples se séparèrent des
dévotes pour rejoindre les hommes rassemblés dans la grande salle, où ils
passèrent tout le jour de Pesah dans le deuil et priaient successivement sous la
lampe. Parfois des nouveaux venus se présentaient timidement et parlaient en
pleurant avec eux, surtout avec l’apôtre Jean qui avait assisté au crucifiement
du messie ; bienveillant et affectueux envers tous, il avait la simplicité
d’un enfant. Ils ne mangèrent qu’une seule fois, un grand calme régnait dans la
maison, les portes étaient fermées par précaution, on ne pouvait les déranger,
car cette maison qui appartenait à Nicodème avait été louée pour le repas de
Pesah. Les dévotes se rassemblèrent dans la grande salle éclairée par la lampe,
les portes fermées et les rideaux tirés. Elles priaient tantôt sous la lampe
autour de la dévote mère, tantôt elles se retiraient pour s’asseoir sur les
cendres, tête couverte du voile de deuil, ou elles priaient le visage face au
mur.
Elles retiraient le voile de deuil quand elles
s’asseyaient prier sous la lampe. Les plus faibles parmi elles prirent un peu de
nourriture, les autres jeûnèrent jusqu’au soir.
À cet appel à son
Père, l’âme de Jésus entra au pied de la croix sous forme
lumineuse, Gabriel l’escorta avec plusieurs anges. Sa divinité comme fils de
Dieu unie à son âme autant qu’à son corps, Jésus
entra dans une sphère divisée en trois sections distinctes. En avant des
purgatoires, il y avait une aire paisible, plus claire et verdoyante, où vont
les âmes libérées avant d’être emmenées au ciel, mais ceux en attente d’être
libérés étaient dans une section grise parmi d’autres sections.
Adam &
Ève| descente
Resplendissant de
lumière, le messie passa entre deux sections escorté par les anges de la
victoire :
-
1e section à
gauche étaient enfermés les patriarches de Seth à Melchisedec ; -
2e section à droite, ceux qui ont vécu
de Abraham à Jean le baptiste.
Dans ces milieux d’attente, de craintes et
désirs, ils ne le reconnurent pas quand il passa, mais une dilatation se
produisit et tout fut aussitôt rempli de joies. Jésus s’avança vers Adam et Ève
qui se trouvaient dans un brouillard. Après qu’il a parlé aux premiers humains,
nos parents l’honorèrent dans un enthousiasme indescriptible.
Nos patriarches | descente
Dès qu’ils se joignirent à l’escorte angélique,
le messie entra dans le cercle des patriarches du purgatoire gauche où certains
d’entre eux étaient tourmentés par de mauvais esprits. Les anges frappèrent aux
portes en disant :
—
Ouvrez les portes.
Les mauvais esprits s’écartèrent et Jésus entra
victorieusement, mais ils se mirent à crier :
—
Qu’y a-t-il entre toi et
nous ?
—
Que viens-tu faire
ici ?
—
Veux-tu aussi nous crucifier ?
Les anges mirent des chaînes sur ces esprits et
les poussèrent devant eux. Ceux de ce cercle n’avaient qu’une vague connaissance
du messie et qu’un sentiment faible, mais ils se mirent à chanter des louanges
dès que Jésus leur déclara qui il était.
Sein d’Abraham | descente
Le messie alla dans la section de droite, aux
purgatoires comme tels. À l’entrée il aperçut l’âme du bandit que les anges
amenaient au sein d’Abraham, tandis que les démons amenaient l’autre aux enfers.
Jésus leur adressa la parole. Il entra dans le sein d’Abraham escorté par les
anges, les âmes délivrées, les démons enchaînés. Ces derniers ne voulaient pas
entrer et faisaient résistance, mais les anges les forcèrent et ils durent
déclarer leur défaite et leur honte. Tous les saints
d’Israel étaient là :
- côté gauche, les patriarches,
Moïse, les juges et les rois ; - côté droit, les prophètes, les
ancêtres du messie et ses proches parents ; Joachim et Anne, Joseph,
Zacharie et Élisabeth et Jean.
Aucun mauvais esprit n’était présent, l’unique
souffrance qu’ils avaient éprouvée venait du désir que la promesse se réalise.
Ils saluèrent le messie et l’honorèrent dans le comble du bonheur, une joie
inexprimable pénétra leurs âmes. Certains d’eux furent envoyés sur terre
reprendre temporairement leurs corps pour rendre témoignage au seigneur ;
c’est à ce moment-là que les morts sortirent de leurs tombeaux à Iérusalem et se
montrèrent comme des cadavres ambulants, et qu’ils ramenèrent ensuite leurs
corps sur terre comme un chargé de justice dépose sa tenueofficielle après que l’ordre de ses supérieurs est exécuté.
L’escorte victorieuse du fils de Dieu entra dans une cavité plus profonde du
purgatoire où se trouvaient les
pieux païens qui avaient senti la vérité et l’avaient désirée. Des démons
étaient parmi eux parce qu’ils avaient eu des idoles. Ces derniers durent
déclarer leur fraude, ils furent enchaînés et emmenés captifs. Ces pieux païens
honorèrent le seigneur avec joie en grande émotion.
Centre de l’abîme | descente
Jésus traversa de
nombreux endroits avec victoire et en libéra les prisonniers, il accomplit une
infinité de choses. Enfin il examina le centre de l’abîme 3e
section avec sévérité. L’enfer ressemble à une
construction laide faite de rocs noirs à reflet métallique, de taille immense,
aux énormes portes noires avec des verrous et cadenas de formes abominables. Les
portes du royaume des ténèbres s’ouvrirent dans des hurlements de désespoir et
les cris. La Iérusalem céleste ressemble à une cité où les habitats des bénis
ressemblent aux palais avec des jardins de fleurs et de fruits merveilleux selon
les états de béatitude. C’est un royaume complet avec ses bâtisses, ses habitats
et ses champs ; tout dans ce séjour des bénis est aménagé pour l’harmonie
qui apporte la paix perpétuelle et des joies sans mesure, tout est pour la
contemplation comme base et source. Tout dans le séjour des
réprouvés est aménagé pour l’inespoir qui apporte la colère
perpétuelle et des discordes sans mesure. Au
ciel, ses bâtisses sont d’un beau transparent fait pour l’adoration
et la joie, de jardins pleins de fruits merveilleux qui apportent la vie.
En
enfer, ses prisons, ses fossés, ses déserts et ses marais apportent le dégoût
et l’horreur ; ses temples et leurs autels, ses châteaux et leurs trônes,
ses jardins, ses lacs et leurs fleuves les incitent à maudire, haïr, s’écoeurer,
se désespérer et calomnier comme supplice de leur châtiment. Ici au ciel tout est
bénédiction, amour, union, joie et béatitude, là tout est discordes sans répit
et terreurs de maudits. Ici l’union bénie
des saints, là la corruption
se change en douleur sous les supplices sans nombre d’opérations et de
manifestations. Chaque damné a la pensée que ses tourments sont appropriés et
nécessaires à son péché. Tout ce qu’on y voit et éprouve est l’horreur du péché
exposé, le serpent qui dévore ceux qui l’ont nourri dans leur sein. Tout se
reporte dans une rigoureuse concordance : ici
la paix et le repos, là la terreur et l’angoisse. Dès l’ouverture
des portes, un tumulte de blasphèmes et d’hurlements se fit entendre. Le messie
adressa la parole à Judas. Les anges maîtrisèrent des armées entières de démons
qui durent reconnaître et honorer Jésus. Cela avait été pour eux un supplice.
Beaucoup furent enchaînés et encerclés par les prisonniers. Et lucifer fut jeté
au centre de l’enfer recouvert de chaînes, des vapeurs noires s’étiraient autour
de lui dans cet abîme de ténèbres. Tout se fit d’après les décrets de Dieu.
Il sera déchaîné cinquante ou soixante ans
avant l’an 2000, et quelques démons seront relâchés avant pour punir et mettre
le monde à l’épreuve. Quelques-uns ont pu être déchaînés de nos jours, d’autres
le seront bientôt après.
Des troupes sans nombre de rachetés suivirent
Jésus : ils sortirent du purgatoire des enfers vers un pays de délices sous
la Iérusalem céleste. L’âme du bandit entra dans le paradis et vit le messie
comme promis. Comme dans mes visions de consolation, les tables célestes étaient
prêtes et les âmes prirent une nourriture qui les remplit de force et de
joie.
Dans la terreet la mer | descente
Le seigneur traversa d’autres endroits, dans la
mer en particulier, face à lui les mauvais esprits fuyaient de toutes parts et
se précipitaient aussitôt dans l’abîme : il libéra toute la création et la
sanctifia. Jésus traversa certains lieux dans la terre, il alla dans le
tombeau d’Adam sous le mont Goulgolat où les âmes d’Adam et Ève vinrent le
rejoindre. Il leur parla, puis il alla avec eux sous terre dans les tombeaux de
plusieurs prophètes où leurs âmes vinrent le rejoindre près de leurs os. Avec ce
groupe d’élus où se trouvait David, Jésus traversa les lieux signalant une
circonstance de sa vie. Il leur expliqua dans un amour admirable ce qui arriva
de significatif et comment il avait parachevé ces signes. Il dit aux élus la
signification des circonstances de son baptême, comment la miséricorde sans
limite de Dieu les avait fait participer aux effets de son baptême. Le messie
passa avec ces bénis comme un éclair de lumière dans la terre, les rochers, les
eaux, les airs, ou planant doucement sur la terre.
Rachat perpétuel | descente
Chaque anniversaire de cette délivrance,
renouant avec la miséricorde éternelle qu’il fit ce jour-là pour les pauvres
âmes du purgatoire, il porte un regard libérateur au purgatoire par
l’intermédiaire de l’assemblée. Aujourd’hui même, au moment de cette vision, le
seigneur a sorti du lieu de purification les âmes de quelques-uns qui avaient
péché à son crucifiement. Cette première descente de Jésus dans les purgatoires
est l’opération du rachat jusqu’à présent, au moment même de cette vision, la
descente aux enfers est une réalité permanente du rachat présent. Comme le plant
d’un arbre de grâces, le seigneur Jésus donne ses mérites aux âmes en souffrance
pour leur rachat. Son fruit est un rachat perpétuel dans le jardin de
l’assemblée : l’assemblée militante qui s’occupe de l’arbre en recueille
les fruits et les transmet à l’assemblée souffrante qui ne peut rien faire
d’elle-même. Pour chaque mérite du messie, il faut travailler souffrir avec lui pour en avoir part, manger notre pain à la sueur de notre
front. Tout ce que Jésus a fait pour nous apporte des fruits éternels, nous
devons les cultiver pour pouvoir les récolter sinon il ne sera pas possible d’en
bénéficier dans l’éternité. Malheur aux jardiniers infidèles et paresseux qui
laissent perdre une grâce qui aurait pu guérir un malade, fortifier un faible,
rassasier un affamé ; ils rendront compte du plus petit brin d’herbe au
jour du jugement. (Matthieu 21.41)
À la fin du shabat, Jean alla visiter les
dévotes pour s’attrister avec elles et leur dire des paroles consolantes, puis
Pierre Céphas et Jacob le-majeur vinrent dans la même intention sans
s’attarder.
Elles se retirèrent pour s’asseoir encoresur
les cendres toujours
drapées d’un voile de deuil. La
dévote mère pria vivement de revoir Jésus. Un ange vint lui dire que le seigneur
était proche, d’aller à la petite porte de Nicodème. Marie prit son manteau le
coeur plein de joie et partit sans un mot aux dévotes.
21 h
En haut de la muraille près de la petite porte, elle aperçut Jésus l’âme
tout illuminée qui vint vers elle accompagné de nombreux patriarches. Jésus se
tourna vers eux et leur montra la dévote mère en disant :
—
Ma mère Marie.
Il sembla l’embrasser et disparut. La dévote se
mit à genoux et posa un baiser où il lui apparut, à son retour ses forces furent
renouvelées. Alors que les dévotes s’occupaient à préparer des onguents avec des
aromates, elle les réconforta et les fortifia dans la foi. Elle ne leur dit rien
de ce qu’elle vit. Elles composaient des paquets d’herbes sur une longue table
dont la nappe allait jusqu’à terre, il y avait aussi des pots d’onguent, une eau
de nard et des fleurs fraîches dont un iris rayé ou un lis qu’elles mettaient
dans des linges. En son absence, Marie-Magdala, Marie de Cléophas, Salomé,
Jeanne et Marie-Salomé avaient tout acheté en ville, elles voulaient couvrir le
corps du seigneur de ces aromates le lendemain. Les disciples en prirent une
partie chez la marchande qu’ils mirent devant la porte sans entrer.
63
Peu après le retour de Marie, Joseph
d’Arimathie priait dans son cachot quand tout fut soudainement plongé dans la
lumière et une voix l’appela par son nom. Le toit se souleva, faisant brèche, et
une forme lumineuse tendit un drap et lui dit de s’en servir pour monter. Ce
drap rappelait celui dont il avait enveloppé le corps de Jésus. Prenant le drap
à deux mains et s’appuyant sur des pierres qui faisaient saillie, Joseph s’éleva
de 3 m jusqu’à la brèche qui se referma derrière lui, et la lumière disparut. Il
longea quelque temps la muraille de la ville jusqu’à proximité de la salle à
manger, près du mur sud de Sion, et frappa à la porte. Les disciples qui avaient
cru à la rumeur qu’on l’avait jeté dans un égout eurent une grande joie
lorsqu’il entra, comme pour Pierre Céphas plus tard quand il fut libéré de
prison. Il leur raconta ce qui lui était arrivé et ils remercièrent Dieu,
réjouis et consolés. Ils lui donnèrent aussi à manger. Joseph quitta Iérusalem
pour Arimathie Ramah et revint
seulement quand le danger fut écarté.
Arche de l’Alliance | résurrection
Au sud du mont Sion, entre les ruines du palais
de David et le marché, se trouvait un ancien bâtiment avec des rangs d’arbres au
milieu d’une grande cour clôturée de murs, il y avait aussi deux autres maisons
contre ces murs, une pour le gardien, l’autre servit aux dévotes après le
crucifiement.
Autrefois plus
spacieuse, la salle à manger servit de logis aux capitaines de David et aux
exercices de maniement d’armes. Avant la construction du Temple, même avant sa
fondation, c’est là que l’arche de l’Alliance était gardée. Ce en qui reste est
dans une voûte souterraine où le prophète Malachie se cacha et écrivit les
prophéties du sacrifice de la nouvelle Alliance. Malachie
3 Alors qu’une grande partie de Iérusalem fut détruite par les
babyloniens, cette maison fut épargnée.
2Samuel
5.7-9 - David prit la forteresse de Sion, qui est la cité de David. David
s’établit dans la forteresse qu’il appela cité de David. Il fit de tous côtés
des constructions, en dehors et en dedans de millo (remparts).
http://www.qbible.com/hebrew-old-testament/2-samuel/5.html
À quelques
pas de la porte de Bethléem ou de Rama est un gros et très ancien bâtiment
attaché aux murs de la ville, qu’on appelle vulgairement le palais de David,
fondé sur la tradition qui le regarde comme le lieu dans lequel ce saint roi
demeurait quand il quittait le mont Sion où il avait un palais magnifique que
lui-même avait fait bâtir, qui était dans l’enceinte des murs de Iérusalem. Au
milieu de la face de ce bâtiment est une fenêtre fort haute, mais fort étroite,
qu’on dit être celle d’un cabinet dans lequel David se retirait en solitude. Ce
palais de David porte aussi le nom de château des pisans parce que la république
de Pise en Italie s’étant liguée avec quelques princes de Jérusalem, les Pisans
le rétablirent, le fossoyèrent, le fortifièrent, et le mirent en état de se
défendre. Le bâtiment est massif, solide et peu endommagé, mais il est négligé
et les fossés qui étaient assez larges et profonds sont presque entièrement
comblés. Les mahométans lui donnent le nom d’Elkots qui signifie un sanctuaire.
Relation
historique d’un voyage p.291, Morison 1704.
La ville de
Iérusalem était enfermée par un triple mur excepté du côté des vallées où il n’y
en avait qu’un à cause qu’elles sont inaccessibles. Elle était bâtie sur deux
montagnes opposées et séparées par une vallée pleine de maisons. Celle de ces
montagnes sur laquelle la ville haute était assise était beaucoup plus élevée et
plus raide que l’autre, et par conséquent plus forte d’assise, le roi David,
père de Salomon qui édifia le Temple, la choisit pour y bâtir une forteresse à
laquelle il donna son nom, et c’est ce que nous appelons aujourd’hui le haut
marché. La ville basse est assise sur l’autre montagne qui porte le nom d’Acra,
et dont la pente est égale de tous les côtés. Il y avait autrefois vis-à-vis de
cette montagne une autre montagne plus basse et qui en était séparée par une
large vallée, mais les princes asmonéens firent combler cette vallée et raser le
haut de la montagne d’Acra pour joindre la ville au Temple afin qu’il commande à
tout le reste. Guerre
des juifs, livre 5 chap. 13, Antilly 1668.
Le bâtiment était en mauvais état quand
Nicodème et Joseph d’Arimathie en devinrent propriétaires. Ils louaient la
bâtisse principale comme salle à manger pour les étrangers qui venaient à
Iérusalem pour Pesah, le reste du temps le bâtiment et les dépendances servaient
d’atelier aux ouvriers ou de rangement des pierres tombales. Joseph d’Arimathie
possédait d’excellentes carrières d’où venaient ces blocs de pierre. Sous ses
directives, les ouvriers en faisaient des pierres tombales, des ornements
d’architecture et des colonnes qui étaient ensuite revendus. Avant que Nicodème
prenne part à ce commerce, il taillait à loisir à l’exception du temps des fêtes
juives et devint ami avec Joseph d’Arimathie, puis ils s’associèrent dans leurs
entreprises. Aram et Thémeni, les cousins de Joseph d’Arimathie, étaient parmi
les disciples. La salle à manger était carrée et entourée de piliers, sur ses
côtés se trouvaient des cellules aménagées d’épaisses couvertures roulées pour
passer la nuit, les disciples y passaient souvent leur nuit. Quand on retirait
les panneaux entre les piliers, la salle à manger se prolongeait dans une autre
salle fermée où des ouvertures en haut des murs laissaient passer la
lumière ; il y avait aussi une troisième salle dans le fond, séparée par un
rideau. Cette division par trois pour le Temple était entre le parvis, le
sanctuaire et le saint des saints. Derrière le rideau se trouvait un autel
encastré dans le mur, cette salle servait aussi de rangement pour les vêtements
et autres utilités de célébration de Pesah. De l’autre côté de l’autel, à
l’extérieur, se trouvait un four de pierre en forme triangle rectangle où rôtir
les agneaux. Au-dessus de l’autel, dans une niche dans le mur, était représenté
un agneau ayant un couteau dans la gorge, son sang semblait couler par goutte
sur l’autel. Trois tiroirs de couleurs différentes pivotaient dans la niche avec
des récipients de Pesah et plus tard le saint-sacrement. Il y avait de belles
caves en dessous et l’arche de l’Alliance était sous l’autel. Cinq rigoles d’eau
passaient sous le bâtiment et poussaient les immondices sur la pente du mont
Sion, car le bâtiment était situé en hauteur. Jésus y avait enseigné et fait des
guérisons.
64
Tout était calme aux alentours du tombeau gardé
par les soldats, certains assis, les autres debout autour de la colline, les
lanternes jetaient une vive lueur dans la nuit devant la grotte. Cassius ne
quittait pas l’entrée de la grotte, il attendait dans la contemplation depuis
qu’il avait reçu de grandes grâces et des lumières. Depuis sa mise au tombeau et
ses linceuls, enveloppé de lumière, le corps sacré de Jésus reposait entre deux
anges ressemblant à des sacrificateurs par leur tenue sacerdotale, un à sa tête,
l’autre à ses pieds, bras sans aile croisés sur la poitrine, semblables aux
chérubim de l’arche de l’Alliance. Peut-être que la lumière et la présence des
anges étaient-elles visibles à Cassius de l’entrée du tombeau, car il fut en
contemplation comme un adorateur par le saint sacrement.
Le messie entra au tombeau au travers du rocher
et montra aux patriarches son corps entièrement couvert de plaies.
L’Esprit saint qui l’habitait montra à ces âmes toute la portée de son
martyre d’une manière merveilleuse : son corps fut transparent et tout
l’intérieur se révéla à leurs yeux, ils pouvaient voir toutes ses blessures et
les dommages qui l’avaient tant fait souffrir, et apercevoir les lésions
jusqu’au fond dans le moindre détail. Les patriarches furent remplis de
compassion, de crainte et de respect.
1e
ascension |résurrection
L’âme de Jésus va bientôt sortir du tombeau
dans et avec son corps, mais pas encore en parfaite union, comme ces âmes de
prophètes réunies à leur corps pour aller au Temple puis s’en séparer de
nouveau. Les deux anges soulevèrent son corps et montèrent au travers des
rochers jusqu’au ciel pour que Jésus présente son corps meurtri devant le trône
de son Père céleste parmi des chorales d’anges sans nombre respectueusement
prostrés. Le passage au travers des rochers produit une forte secousse qui
renversa trois soldats de la garde et les fit chanceler. Ignorant la cause
véritable, ils attribuèrent cela à un tremblement de terre. Les quatre autres
soldats étaient allés en ville, Cassius vit quelque chose et fut ému, mais ce
n’était pas clair pour lui, il ne bougea pas de sa place et resta dans le
recueillement, en attente de ce qui allait arriver. L’empaquetage des aromates
terminé, les dévotes se retirèrent dans leurs cellules avant d’aller au tombeau
au lever du jour, malgré la crainte de croiser des adversaires du seigneur.
Remplie de courage depuis que son fils lui était apparu, la dévote mère les
tranquillisa et leur dit de prendre un peu repos avant de se rendre sans crainte
au tombeau, qu’aucun mal n’arriverait.
23 h
Par une force irrésistible, la dévote mère quitta la maison recouverte du
voile gris et passa par le palais de Caïphe jusqu’au palais de Pilate avec
tristesse. Dans les rues désertes, cette force la fit traverser la ville dans le
but de retracer le chemin de la croix, et s’arrêter là où Jésus avait subi un
mal ou essuyé un affront. Elle se mit souvent par terre et promenait sa main sur
les pierres, semblant chercher un objet perdu, puis portait sa main à sa bouche,
comme si elle avait touché une chose sainte, et posait le sang sacré du messie à
ses lèvres. L’amour divin créa une chose surhumaine, elle fut remplie
d’adoration céleste par l’amour, et tous les lieux sanctifiés lui apparurent
lumineux. Lorsqu’elle arriva au Goulgolat, elle fut soudainement devant Jésus
dans son corps, précédé d’un ange, ayant à ses côtés les deux anges du tombeau,
suivis d’âmes délivrées en grand nombre. Il ne bougeait pas, il semblait flotter
dans la lumière qui l’encerclait. Une voix lui annonça ce qu’il fit dans les
purgatoires et qu’il devait ressusciter avant de revenir dans son corps
transfiguré, de l’attendre près du rocher où il était tombé au
Goulgolat.
Minuit passé La
dévote mère partit s’agenouiller à l’endroit indiqué et pria. Le seigneur et son
cortège se dirigèrent en direction de la ville afin que tout son supplice soit
montré à ces âmes dans les moindres détails. Tandis que le perçage crucifiement, le perchageredressement du bois, le
perçage fente du côté, la descente
et la mise au tombeau du corps leur étaient montrés, les anges recueillaient de
manière mystérieuse les parties arrachées du corps dans la moindre substance.
Remplie d’amour divin, la dévote mère vit tout cela en esprit. Marie attirait la
sainteté comme la sainteté l’attirait. Et parce que les grâces accordées par les
prières se réalisent par l’entremise des anges, certains ont dit que la dévote
mère avait plus d’un saint ange, pour sa protection et service, qu’elle envoyait
ici ou là pour remplir telle ou telle mission. En priant pour autrui, il
m’arrive souvent de supplier mon ange gardien d’aller dire telle chose à l’ange
d’une autre personne pour l’amour de Jésus Christ, comme si j’envoyais un ami
pour une affaire importante, je le vois même aller et s’acquitter de la
commission.
Résurrection du corps | résurrection
65
À son retour, Jésus laissa son corps reposer
dans le tombeau pendant que les anges replaçaient tout ce que les outils de
torture des mercenaires avaient soustrait. Bientôt son corps resplendit dans ses
linceuls, gardé par les deux anges à sa tête et à ses pieds. Dès que le ciel se
mit à blanchir à l’est, Marie-Magdala, Marie de Cléophas, Salomé la parente de
Joseph le charpentier et Jeanne Chusa quittèrent la salle à manger, emportant
sous leurs manteaux les paquets d’aromates, l’une avait aussi une lampe allumée
cachée ; elles voulaient couvrir le corps de Jésus de fleurs fraîches et
d’extraits de plantes et d’huile parfumée, et partirent furtivement vers la
petite porte de Nicodème. L’âme de Jésus revint en splendeur et en gloire.
Escorté de deux anges en tenue de combat et environné de formes lumineuses sans
nombre, Jésus passa au travers du rocher pour reprendre son corps, il se pencha
sur son corps et fondit tout à fait avec lui : l’Esprit saint et son âme vivante s’unirent à son corps et il ressuscita.
Ses membres bougèrent, il se dégagea des linceuls au niveau de la plaie du côté
comme Ève du côté d’Adam dans une éblouissante lumière. Au même instant un
monstre sorti sous le tombeau se dressa contre Jésus, il avait deux têtes, une
de dragon, l’autre d’homme, et une queue de serpent. Notre-seigneur avait en
main une remarquable houlette blanche surmontée d’un étendard avec laquelle il
écrasa la tête du dragon et le frappa trois fois à la queue de sa houlette.
Chaque coup le fit plier sur lui-même et sa taille diminua jusqu’à disparaître.
La tête de dragon rentra sous terre, mais la tête humaine paraissait encore.
Cette prophétie de Dieu le Père dit : La semence descendance de la
femme écrasera la tête du serpent. La prophétie de la houlette contre la queue
du serpent est le pouvoir de Jésus. (Genèse
3.15,Ps 23.4, Michée 7.14)
Jésus s’éleva dans la
splendeur au travers du rocher et la terre trembla ; sorti en un éclair du
ciel, un ange guerrier entra dans le tombeau, mit la pierre à droite et il
s’assit dessus. Le tremblement fut si fort que les lanternes furent agitées et
leurs flammes rejaillirent partout, les gardes furent paralysés et tombèrent sur
le sol, leurs membres convulsés, ne donnant pas signe de vie. Ébloui par l’éclat
de la lumière, Cassius revint à lui et entrouvrit la porte du tombeau. Voyant
les linceuls vides, il voulut partir le rapporter à Pilate, mais il attendit
encore, il avait senti le tremblement de terre et vu la pierre mise à côté ainsi
que l’ange assis dessus, mais le tombeau était vide et il n’aperçut pas Jésus.
Alors que la terre tremblait et que l’ange entrait au tombeau, notre-seigneur
ressuscité apparut à sa mère sur le Goulgolat. Il était merveilleusement
radieux, son manteau blanc bleuté flottait derrière lui, il avait aux mains des
rayons lumineux qui allaient de sa plaie jusqu’aux bouts des doigts. Les
patriarches s’inclinèrent devant sa mère, Jésus lui montra ses plaies et lui dit
qu’elle le reverrait. Pendant qu’elle se prosternait pour embrasser ses pieds,
il lui prit la main pour la relever et disparut.
Je suis la résurrection et la vie. (Deut. 32.39, 1Samuel
2.6)
66
Les dévotes étaient près de la petite porte
quand le corps
de notre-seigneur ressuscita, mais elles ne virent
pas ce prodige. Elles ne savaient pas qu’il y avait des gardes et se demandèrent
avec désarroi :
—
Qui nous ôtera la pierre devant la
porte ?
Elles n’avaient pas pensé à cette pierre dans
leur empressement de porter hommage au corps de Jésus ; répandre l’eau de
nard, l’huile parfumée, les aromates et les fleurs, c’était ce qu’elles avaient
de plus précieux à offrir au seigneur, n’ayant pas contribué aux dépenses de
l’embaumement que Nicodème s’était chargé la veille. Elles résolurent de déposer
leurs aromates sur la pierre du tombeau en attendant qu’un disciple vienne leur
ouvrir l’entrée. Arrivées à la petite porte du jardin, elles virent les
lanternes et les soldats allongés par terre. Elles reculèrent tandis que
Marie-Magdala et Salomé entrèrent dans le jardin et passèrent entre les
soldats. La pierre du tombeau était sur le côté et les portes entrouvertes. Les
draps qui avaient enveloppé le corps étaient là, le grand linceul et les
aromates, le drap qui avait enserré son corps avait été plié et placé sur le
bord ainsi que le voile de sa tête, la partie qui avait recouvert son visage
avait été soulevée ; la lumière resplendissait dans le tombeau et un ange était
assis sur la pierre. Marie-Magdala regarda fixement les linceuls vides et
repartit en flèche vers les apôtres, Salomé alla rejoindre Marie de Cléophas et
Jeanne Chusa avec inquiétude. Voulant faire son rapport à Pilate, Cassius passa
près d’elles et leur rapporta ce qu’il avait vu ; elles reprirent courage
et entrèrent dans le jardin. Elles aperçurent les deux anges en tenue
sacerdotale d’une blancheur éclatante et mirent aussitôt leurs mains sur les
yeux et se prostrèrent.
L’ange leur dit de n’avoir pas peur, qu’elles
ne devaient pas chercher le crucifié ici, car il était ressuscité et plein de
vie. Il leur montra la place vide et leur déclara de dire aux disciples ce
qu’elles avaient vu et entendu, que Jésus les précéderait en Galilée. Elles
devaient aussi se rappeler ce qu’il leur avait dit :
—
Le fils de l’homme sera livré aux
mains des pécheurs qui le crucifieront, mais il ressuscitera le
3e jour.
Et les anges disparurent à leurs yeux. Les
dévotes pleurèrent de joie en voyant les linceuls. Elles revinrent en ville
très émues mais sans hâte, s’arrêtant pour voir si elles n’apercevraient pas le
seigneur ou Marie-Magdala. Plusieurs disciples parlaient ensemble debout et
quelques-uns étaient allongés le long du mur quand Marie-Magdala frappa
fortement à la porte de la salle à manger. Pierre Céphas et Jean ouvrirent la
porte et Marie-Magdala leur annonça :
—
On a pris le seigneur du tombeau,
nous ne savons pas où ils l’ont mis.
Et elle repartit au jardin en toute hâte.
Pierre Céphas et Jean la suivirent en courant après avoir dit quelques mots aux
disciples. Jean courait vite. Couverte de rosée, le manteau tombé sur les
épaules, les cheveux dénoués, Marie-Magdala vint au tombeau avec inquiétude,
n’osant descendre seule dans la grotte. Par les portes d’entrée elle vit deux
anges en tenue sacerdotale assis aux deux bouts de la couche et elle entendit la
voix de l’un d’eux dire :
—
Femme, pourquoi pleures-tu ?
—
Ils ont pris mon-seigneur et je ne
sais pas où ils l’ont mis...
La vue des anges ne put la distraire, elle
semblait ne pas s’apercevoir qu’ils étaient des anges, ne pensant qu’à Jésus
devant les linceuls vides ; dans un sentiment confus qu’il était tout près
et qu’elle allait le trouver, elle alla d’un côté et d’autres comme quelqu’un
qui a perdu son chemin, disant :
—
Jésus n’est pas là. Où est Jésus ?
3 h 30
À la lueur du matin, après avoir mis ses cheveux en arrière, elle vit
derrière un palmier une grande figure habillée en blanc à dix pas du tombeau
vers l’est. Elle courut là et entendit ces paroles :
—
Femme, pourquoi pleures-tu, qui
cherches-tu ?
Elle crut que c’était
le jardinier à cause de la bêche qu’il avait en main et du large chapeau
d’écorce. Jésus avait raconté la parabole du jardinier aux dévotes à Béthanie
peu avant son crucifiement.
—
Si c’est vous qui l’avez pris,
dites-moi où il est et j’irai le prendre, répondit-elle.
Comme elle continuait de regarder autour
d’elle, Jésus dit d’un ton habituel :
—
Marie.
Au ton de sa voix elle oublia tout,
crucifiement, mort, mise en tombe. Elle se tourna et dit comme avant :
—
Raboni.
Tombée à genoux, elle tendit les bras aux pieds
de Jésus, mais il l’arrêta d’un geste et dit :
—
Ne me touche pas, car je ne suis
pas encore monté vers mon Père. Va trouver mes frères et dis-leur que je monte
vers mon Père et leur Père, vers mon Dieu et leur Dieu.
Il disparut. Il agit ainsi à cause de
l’impétuosité de Marie-Magdala, trop absorbée du sentiment que tout était comme
avant, qu’il vivait la même vie. En voulant embrasser ses pieds comme autrefois,
elle n’avait pensé qu’à son maître bien-aimé dans son emportement et avait
oublié le miracle qui était sous ses yeux.
2e ascension |résurrection
Jésus ne s’était pas encore présenté devant son
Père céleste depuis la résurrection dans son corps : les prémices des joies
appartiennent à Dieu et il devait remercier le Père céleste pour l’oeuvre du
rachat réalisé et son triomphe sur la mort, et il devait d’abord se
recueillir pour remercier Dieu du mystère de l’opération du rachat.
Marie-Magdala se réveilla comme si elle avait fait un rêve, elle courut au
tombeau et vit les anges assis. Ils lui dirent ce qu’ils avaient dit aux
dévotes. Maintenant certaine du miracle, elle partit retrouver ses compagnes et
les rencontra sur le chemin du Goulgolat dans l’attente de son retour avec
l’espoir de voir le seigneur en chemin. Marie-Magdala venait de quitter le
jardin quand Jean arriva suivi de Pierre Céphas. Jean vit les linceuls
vides du seuil de la porte, Pierre Céphas entra dans le tombeau et vit les
linceuls et les aromates. Ils crurent à la résurrection et ce que Jésus leur
avait dit des écritures devint clair pour eux, ils ne l’avaient pas compris
avant. Pierre Céphas emporta les linges et ils repartirent en courant en passant
par la petite porte. Marie-Magdala dit aux dévotes qu’elle avait vu le seigneur
et les anges, elles répondirent qu’elles aussi avaient vu les anges.
Marie-Magdala revint à Iérusalem et les deux dévotes retournèrent au jardin,
pensant peut-être y trouver les deux apôtres que Marie-Magdala avait prévenus.
Quand les soldats du Temple se relevèrent, ils reprirent leurs lanternes et
leurs piques et partirent en ville, ils leur dirent quelques mots en
passant devant elles. Lorsqu’elles furent près du jardin, Jésus se montra dans
une longue robe blanche qui couvrait ses mains et leur dit :
—
Je vous salue.
Elles sursautèrent et tombèrent à ses pieds. Le
seigneur leur dit quelques paroles, il leur montra quelque chose de la main et
disparut. Elles coururent à la salle à manger pour dire aux disciples qu’elles
avaient vu le seigneur et ce qu’il leur dit, mais ils ne voulurent pas croire,
ni elles ni Marie-Magdala, et mirent cela sur le compte de l’imagination des
femmes, jusqu’au retour de Jean et Pierre Céphas. Jean et Pierre Céphas
parlèrent avec Thadé et Jacob le-mineur, à qui le seigneur était aussi apparu
près de la salle à manger. Jésus était passé devant Pierre Céphas et Jean,
Céphas semblait l’avoir aperçu, car il fut saisi d’une subite terreur. À la
résurrection de
son corps, Jésus s’était montré à plusieurs
personnes à Iérusalem et ailleurs, mais ils ne l’avaient pas remarqué, certains
étaient frappés d’étonnement ou de crainte soudaine, d’autres étaient restés
indifférents, les hommes l’apercevaient qu’à des moments précis.
67
Une heure après la résurrection, Cassius vint à
Pilate lui parler du tremblement du rocher et de l’ange qui poussa la pierre,
des linceuls vides de Jésus et qu’il n’était plus là, qu’il était sûrement le
messie, le fils de Dieu ressuscité. Pilate écouta ce récit avec terreur, mais
n’en laissa rien voir, il dit à Cassius :
—
Tu as agi sottement en allant te
mettre près du tombeau du galiléen, ses dieux ont pris avantage sur toi et t’ont
fait voir ces visions fantastiques. Je te conseille de ne rien dire aux
chefs-sacrificateurs car ils te feraient un mauvais parti.
Pilate voyait les choses à sa manière, pour lui
le corps de Jésus avait été dérobé par ses disciples, et les soldats du Temple
diraient autrement pour cacher leur négligence ou parce qu’ils avaient été
trompés par des sortilèges. Pilate partit sacrifier à ses idoles au départ de
Cassius. Bientôt quatre soldats du Temple vinrent faire à Pilate le même
rapport, mais il ne s’expliqua pas avec eux et les renvoya à Caïphe. Les trois
autres soldats de la garde furent interrogés devant de nombreux vieux
juifs dans une grande cour voisine du Temple, et après quelques
délibérations, ils prirent les soldats un à un, et à force d’argent et de
menaces ils les forcèrent à dire que les disciples avaient pris le corps de
Jésus durant leur sommeil. Les soldats contestèrent d’abord que les autres
soldats qui étaient allés chez Pilate les contrediraient, mais les pharisiens
leur promirent d’arranger la chose avec le gouverneur. Quand les quatre gardes
arrivèrent, ils refusèrent de dire autre chose que ce qu’ils avaient dit à
Pilate. Les pharisiens donnèrent à croire que ces soldats furent soudoyés pour
laisser enlever le corps de Jésus et leur firent des menaces s’ils ne le
ramenaient pas. Ils répondirent qu’ils ne pouvaient pas plus ramener le corps de
Jésus que les gardes de la prison ne pouvaient ramener Joseph d’Arimathie. Le
bruit s’était répandu que Joseph d’Arimathie était sorti miraculeusement de sa
prison. Les soldats ne changèrent pas leurs déclarations, ils parlèrent
ouvertement aussi du mauvais procès de l’avant-veille et de quelle manière Pesah
avait été interrompu. Les pharisiens les firent mettre en prison et répandirent
la rumeur que Jésus avait été enlevé par ses disciples, ce mensonge fut propagé
par les pharisiens, les sadducéens et les hérodiens, et se répandit dans toutes
les synagogues avec des injures sur Jésus ; cette imposture ne réussit pas
chez tous, beaucoup de tsadiqim justes ressuscités
se montrèrent une seconde fois à ceux de leurs descendants capables de recevoir
la grâce et les amenèrent à la foi du messie. Les disciples dispersés à travers
le pays par découragement les virent aussi, les morts ressuscités les
consolèrent et confirmèrent leur foi. Le corps ressuscité de Jésus fut renouvelé
et glorifié, et n’était plus sujet à la mort, il monta au ciel dans son corps
devant ses amis. Les corps des morts ressuscités sortis des tombeaux n’étaient
pas comme celui du seigneur, c’était des cadavres empruntés sans mouvement comme
un vêtement pour les âmes, à redéposer en terre, qui ne ressusciteront qu’au
jugement dernier comme nous tous. Ils étaient moins vivants que Lazare qui vécut
réellement et dut mourir une seconde fois.
68
Le dimanche suivant ils lavèrent le Temple et
le purifièrent en y jetant des herbes et des cendres d’os, en offrant des
sacrifices expiatoires. Ils retirèrent les décombres et cachèrent les dommages
du tremblement de terre sous des planches et des tapis, et reprirent le même
jour les cérémonies de Pesah qui n’avaient pas pu se faire. Ils voulurent mettre
un terme à tous les propos et rumeurs en disant que l’interruption de la fête et
les dommages causés au Temple étaient des conséquences du tremblement de terre
et de la présence de personnes impures aux sacrifices. Ils appliquèrent ce qui
s’était passé à une vision d’Ézéchiel sur la résurrection des morts et obtinrent
facilement le silence parce qu’un grand nombre de gens du peuple avaient été
complices du crime. Ils menaçaient aussi de grave sanction ceux qui parleraient.
Ils n’amadouèrent du peuple que les plus grossiers et les plus débauchés, car
les meilleurs se convertirent ; d’abord en silence puis ouvertement après
la Pentecôte ou
50 jours après Pesah, quand ils revinrent chez eux et
que les apôtres vinrent leur prêcher. Les chefs-sacrificateurs furent moins
arrogants en voyant se propager les enseignements de Jésus. À l’époque de
l’ordination d’Étienne, Ophel tout entier et la partie à l’est de Sion
n’arrivaient pas à contenir la communauté des croyants à cause de leur grand
nombre, et une partie d’entre eux durent cohabiter sous des tentes et des
baraques entre la ville et Béthanie. Dans ces jours, Ananus fut possédé du
démon, il fut enfermé n’en ressortit plus. Caïphe devint fou furieux, il était
secrètement animé de rage très violente. Après le jeudi de Pesah, Pilate fit
chercher inutilement sa femme qui s’était cachée dans la maison de Lazare à
Iérusalem. On ne put le deviner, car il n’y avait aucune femme qui logeait là.
Étienne, alors peu connu comme disciple, allait lui apporter de la nourriture,
il lui transmit la connaissance de l’Évangile. Étienne était cousin de Paul, ils
étaient fils de deux frères. Simon de Cyrène alla trouver les apôtres
après le shabat et demanda à être baptisé pour être admis dans la communauté des
disciples. Toute la communauté était formée de disciples prêts à marcher sur les
pas de Jésus, ayant renoncé à ce monde et ses attraits. Tous leurs biens étaient
en commun. Ils assistaient les pauvres en permanence et enseignaient l’évangile
du messie sauveur. Ils soignaient les malades et rassemblaient sous la houlette
du seigneur toutes les brebis égarées qu’ils rencontraient. Ici se termine le
récit de ces visions qui dura du 18 février jusqu’au 6 avril 1823, jeudi de la
semaine après Pesah.
Fin du récit
d’Emmerich
Sion
et salle à manger (cénacle). La
montagne de Sion et le cénacle. Dominus in Sion
magnus (Ps 98). Après avoir
enlevé cette montagne aux jébusiens, David y plaça l’arche d’Alliance sous un
riche tabernacle et Dieu la regarda dès lors comme une montagne sainte, devenue
son héritage propre : Super Sion
montem Sanctum ejus (Ps 2). Il la choisit
pour en faire le lieu de sa demeure : Mons Sion in quo habitasti (Ps 11). Non seulement
il y attacha son coeur : Montem Sion
quem dilexi ; mais il l’aima même avec une extrême jalousie, dit un
prophète : Zelatum sum Sion zelo
magno (Zacha. 3). Cet amour
de préférence que Dieu a toujours eu pour la montagne de Sion a paru avec
beaucoup plus d’éclat encore dans la loi nouvelle que dans l’ancienne, puisque
ce fut là qu’il accomplit par son fils incarné ces deux ministères qui portent
le caractère de l’amour le plus parfait qu’il ait pu témoigner aux hommes :
le premier fut l’adorable sacrement de nos autels qu’il y institua (dit s.
Thomas, In Opusc. 57) pour
laisser à ses disciples un mémorial éternel de sa passion, un accomplissement
des figures anciennes, un abrégé de toutes ses merveilles, un gage précieux de
son amour infini et une source de consolation dans la tristesse et dans la
douleur que devait leur causer son absence. Le second fut la mission du saint
Esprit qui est l’amour qui déverse (comme dit l’apôtre) la charité dans le
coeur de ceux sur qui il descend, ce fut alors que s’accomplit la prédiction du
prophète évangélique : De Sion
exibit lex (Isai. 2) une loi
sortira de Sion. Description
de la montagne de Sion. La montagne de Sion, où est situé un bout occidental de
la ville, est d’une figure assez irrégulière et tient plus de l’ovale que de
nulle autre. Elle peut avoir deux tiers de lieue de tout (mesuré par le pié), et
quoiqu’elle soit assez élevée, elle est de beaucoup inférieure à la montagne des
olives. Elle a la vallée de Josaphat à son orient ; le mont Gyon à son
couchant ; la piscine supérieure est à son midi (sud) et le Calvaire au
nord. Sa situation est agréable, son air est doux et tempéré, par le moyen d’un
certain petit vent qui modère la chaleur du climat, qui souvent est étouffante,
particulièrement dans les mois de mai, juin, juillet et août. Du temps de
Salomon, cette montagne était peuplée et ornée de cyprès : Quasi cypressus in monte Sion (Eccles. 24). Il s’en
trouve encore quelques-uns, mais le nombre des oliviers y est beaucoup plus
grand, cet arbre étant en Judée le plus commun de tous. Autrefois toute cette
montagne était enfermée dans l’enceinte des murs de la sainte cité, et ainsi son
sommet était entièrement couvert de bâtiments, mais on n’y en voit
aujourd’hui d’autres que ceux que la piété y a conservés en mémoire des
ministères qui s’y sont accomplis, le reste est ou couvert de ruines ou
converti en jardins et en terres labourables dont une partie se cultive pour
accomplir la prophétie : Sion quasi
ager arabitur (Jérém. 26). Du
cénacle. Le
cénacle qui est le lieu le plus auguste sur la sainte montagne de Sion
était autrefois une grande salle haute renfermée dans la maison d’un homme
riche, ami et disciple de Jésus Christ. Cette tradition est fondée sur les
paroles du sauveur même, lui faisant avis du dessein qu’il avait de manger chez
lui l’agneau pascal avec ses disciples, ce
qui se passa dans le cénacle. L’évangile parlant du cénacle l’appelle grand Caenaculum grande, sans doute non tant
par rapport à la grandeur du lieu que par rapport à la grandeur des ministères
qui s’y sont accomplis. Ce fut là que Jésus Christ, obéissant à la loi de Moise,
mangea avec ses disciples l’agneau pascal et satisfaire en même temps
à l’excès de son amour à cette cérémonie, il mit fin à la figure par la réalité,
c’est-à-dire en y instituant le sacrement de son corps et de son sang qu’il
distribua de ses propres mains en chair et sang de l’agneau immaculé qui
devait bien tôt effacer les péchés du monde. Ce fut là qu’il offrit à Dieu son
Père le premier sacrifice de la loi nouvelle, dans lequel il voulut être le
prêtre et la victime, le temple le plus saint et le plus auguste qui fut dans
l’univers. Ce fut qu’après avoir élevé l’homme jusqu’à lui, en le rendant
participant de sa divinité, il s’abaissa jusqu’au-dessous de l’homme, en lavant
les piez à ses disciples. Ce fut là que pour affermir leur foi, et
particulièrement pour guérir l’infidélité de s. Thomas, étant entré, quoique les
portes fussent fermées, il les convainquit de sa résurrection en mangeant avec
eux, et en leur faisant voir son corps et toucher ses plaies. Ce fut là qu’il rendit
leur esprit capable des vérités les plus sublimes, leur donnant l’intelligence
des écritures, qu’il leur communiqua le don des miracles, qu’il leur donna le
pouvoir de remettre ou de retenir les péchés, de conférer les sacrements et de
gouverner son église. Ce fut dans ce lieu que la s. vierge se retira avec les
apôtres et les disciples après l’ascension de son fils, pour s’y disposer à
la venue de l’Esprit consolateur, descendu dix jours après sur un chacun d’eux
en forme de langue de feu afin que par la prédication de l’évangile qu’ils
devaient annoncer par toute la terre, ils embrassent tous les coeurs des flammes
de l’amour divin, et qu’ils dissipent dans tous les esprits les ténèbres du
mensonge en y portant les lumières de la vérité. Le
cénacle changé en église vers l’an 330. L’empereur Adrien fit bâtir dans l’endroit même du
cénacle sur le mont de Sion un temple à iupiter ; la s. impératrice Hélène
fit détruire cet édifice profane et fit construire au même lieu un temple très
superbe, dont le portique était en partie soutenu par cette colonne de marbre
tirée de la maison de Caïphe, que s. Jérôme dit avoir vu de son temps encore
teintée du sang que Jésus Christ répandit dans la flagellation qu’il souffrit
chez ce cruel pontife. Godefroi de Bouillon ayant assiégé Iérusalem (Jac. Vitry liv.1 cap.38 ;
Tresor. Cron. l’an 1343) alla avec ses généraux en procession du mont des olives à celui de Sion,
où était l’église Notre-dame de Sion, dans laquelle la cérémonie s’acheva ;
il confia le soin de cette église à des religieux de l’ordre de s. Augustin
qui y vécurent longtemps sous la dépendance d’un prieur. L’église
de Sion donnée aux religieux de s. François vers l’an 1313. Robert roi de Naples et de Iérusalem bâtit sur
le mont Sion un monastère très beau et très commode qu’il attacha aux murs de
l’église dont je parle et le donna aux religieux de l’ordre de s. François.
Après 200 ans de tranquillité, vers l’an 1560, leur repos fut troublé etc.
Description
du cénacle. L’église qu’on y voit
aujourd’hui, et qui renferme les lieux sanctifiés par les ministères dont j’ai
parlé, est un édifice d’environ 45 pas de longueur, sur 16 de largeur. Sa
hauteur est très considérable, et le bout oriental de ce temple est terminé par
un dôme très propre et couvert de plomb. Les fenêtres à double rang font juger
que cet édifice est à double étage, c’est-à-dire qu’il consiste en deux salles,
l’une basse et l’autre haute. S. Hélène la partagea ainsi pour ne rien changer à
la forme de l’ancienne, étant certaine que le cénacle où se passèrent tant de
prodiges était la salle supérieure. Caenaculum grande stratum (Luc 22). Cependant je
ne sais pas pourquoi on a divisé ces deux salles en quatre parties. La première
partie de la salle inférieure est le lieu où l’on dit que le seigneur lava les
piez à ses apôtres ; cependant il est visible que ce lieu n’est pas
distinct de celui où le divin sauveur fit la cène et institua l’adorable
sacrement de nos autels, ministères qui sont révérés dans la seconde partie de
la salle supérieure. Pour ce qui est de la première qui est sous le dôme, elle
est dédiée à la descente du saint Esprit, mais étant trop petite pour contenir
les six vingt personnes assemblées, sur lesquelles ce divin esprit descendit en
forme de langues embrasées ; cette circonstance fait connaître évidemment
que le cénacle n’était pas ainsi partagé du temps de Jésus Christ, mais qu’il
consistait en cette seule salle supérieure qui était grande, et capable de
renfermer à l’aise ce nombre des disciples qui s’y trouvaient réunis le jour de
la Pentecôte. Tombeau
de David. Le tombeau de David se
voit dans la seconde partie de la salle inférieure. Où
l’agneau pascal fut rôti. Près d’un
escalier par lequel on monte au cénacle, on fait voir un petit endroit fort
serré qu’on dit avoir fait partie de l’ancienne cuisine, et l’on veut qu’on y
ait rôti l’agneau pascal que Jésus Christ mangea avec ses disciples dans la
dernière cène qu’il fit avec eux. Du
monastère de Sion. Le monastère est
un assez gros bâtiment qui pouvait être régulier dans le temps qu’il appartenait
aux religieux de s. François. Les turcs ont fait une mosquée de ce sanctuaire et
le monastère est changé en hôpital qui sert d’asile aux jeunes filles
orphelines. Citerne
près de laquelle les apôtres se séparaient. Dans le milieu d’une petite place voisine du cénacle,
est une citerne près de laquelle les apôtres s’assemblèrent pour se donner le
baiser de paix, et se dire réciproquement le dernier adieu, sur le point qu’ils
étaient de se séparer pour aller porter l’évangile dans les provinces qui leur
étaient échues en partage. On la nomme pour cette raison la citerne de la
dispersion des apôtres. Maison
où la s. vierge demeura après l’ascension. À 50 pas ou environ de la porte du bâtiment dans
lequel est enfermé le cénacle, la tradition fait remarque l’endroit de la maison
dans laquelle la s. vierge demeura, depuis l’ascension jusqu’à son trépas âgée
de 72 ans, la 23e année après l’ascension de son fils. Il ne reste de
cette maison que quelques pierres de roches assez grosses, encore posées l’une
sur l’autre que l’on embrasse par dévotion. Maison
de Caïphe. La maison de Caïphe
n’est éloignée de la maison précédente que de 100 pas au plus. La maison de cet
injuste pontife est convertie en un petit monastère qui appartient aux arméniens
qui y entretiennent cinq ou six moines. Cette maison dans laquelle Jésus
souffrit tant d’opprobres et de si cruels traitements pendant la fatale nuit qui précéda le jour de sa
passion, est éloignée de celle
d’Anne beau-père de Caïphe, d’environ 300 pas. État
présent de la maison de Caïphe(Adricom de loc. mont. Sion numb.
27). Le monastère placé sur les ruines de la maison de Caïphe est fermé de murailles assez
hautes et épaisses. La porte qui est de fer est extrêmement basse, n’ayant pas
plus de 300 piez de hauteur. On descend d’abord de quelques degrez (marches) dans une cour de
longueur et largeur médiocre, au milieu de laquelle est un petit oranger, qui
occupe l’endroit dans lequel les soldats avaient allumé un grand feu pour se
garantir du froid de la nuit. On a gravé sur la muraille voisine en bas-relief
un coq qui semble vouloir battre des ailes et chanter. Salle
du conseil où Jésus fut accusé et déclaré digne de mort(Niceph. Liv. 8. cap.80).
Alors que Jésus n’avait pas encore été introduit dans la salle où
était assemblé le grand conseil, dans lequel présidait Caïphe souverain pontife
et chef de la cabale qui avait juré la mort du sauveur du monde ; on le fit
passer dans la cour où il fut chargé de mille calomnies, par des témoins que la
haine animait et que l’argent avait corrompus. Le conseil souverain appelé
sanhédrin était composé des chefs des 24 familles sacerdotales des plus
considérables de la nation juive. En attendant que le jour parût et qu’il fût
temps d’aller présenter Jésus à Pilate qui seul en qualité de président de la
Judée de la part du sénat romain pouvait prendre connaissance des affaires
criminelles. Le conseil l’abandonna à cette troupe furieuse qui l’avait amené
chez Caïphe, et qui pour se faire un mérite auprès du pontife et de tous ses
ennemis, lui firent endurer pendant toute cette triste nuit tant de cruautés et
de si sanglants outrages que s. Jérôme assure qu’on n’en reconnaîtra l’excès
qu’au jour du jugement dernier. Cette salle
fort petite, dans laquelle le grand conseil conclut d’une voix commune à
la mort de Jésus Christ, fut changée par s. Hélène en une église qu’elle
enrichit de marbre et de divers ornements d’architecture. L’église aujourd’hui
est bâtie sur les mêmes fondements ; on en trouve la porte à gauche en descendant dans la cour. On y
voit deux choses très-considérables. La
pierre qui fermait le sépulcre. La
première est la pierre avec laquelle Joseph
d’Arimathie et Nicodème fermèrent la porte du monument après y avoir
enseveli le corps de Jésus Christ. Cette pierre est très longue, très-large, très-épaisse et d’une roche
très dure, ce qui fait que je ne suis pas surpris de l’inquiétude et de
l’embarras où se trouvaient les femmes dévotes, lors qu’allant de grand matin au
sépulcre chargées d’aromates pour parfumer le corps de leur cher maître, elles
disaient entre elles : qui pourra rouler cette lourde pierre, et nous
ouvrir la porte du monument ? Quis
revolves nobis lapidem ab ostio monumenti ? (Marc 16). Ce fut
l’ange qu’elles trouvèrent assis sur cette pierre qui leur rendit ce bon
office : Et invenerunt revolutum
lapidem. Cette pierre qui est naturellement dépendante du sépulcre, fut
confiée aux arméniens qui l’enlevèrent de l’église du s. sépulcre. Prison
de notre-seigneur. La seconde chose
digne de remarque dans cette église, est la prison dans laquelle les juifs
enfermèrent notre-seigneur, après l’avoir outragé en mille manières, en
attendant qu’il fut temps de le traîner chez Pilate. On y entre par une porte
fort basse et fort étroite qui est vers le fond de l’église à main droite et
vis-à-vis du maître autel. Ce cachot qui est de forme carrée est si étroit qu’à
peine trois ou quatre personnes peuvent y être à genoux en même temps.
Cimetière
des chrétiens orientaux. À 50 ou 60
pas de la maison de Caïphe, du côté du couchant, on trouve un assez grand
cimetière qui est commun à tous les chrétiens orientaux ; contrairement aux
autres lieux où chaque secte a son cimetière à part. Château
et tour de David. Avançant environ
300 pas vers l’extrémité du mont Sion, entre l’ouest et le nord, on trouve
quelques amas de ruines qui paraissent fort anciennes, et qu’on dit être des
débris du château et de la tour que David fit bâtir sur le mont Sion, après
l’avoir emporté sur les jébusiens. Quelques auteurs ont
confondu ce château avec celui des Pisans dont j’ai parlé. N’est-il pas probable
que David bâtit sa forteresse et sa tour dans l’endroit le plus avantageux,
c’est-à-dire sur le sommet de la montagne de Sion, où ces ruines se voient, et
non pas dans un lieu bas, plat, et qui semble ne devoir plus être considéré
comme faisant partie de cette montagne où est le château des Pisans, qui peut
bien avoir été le palais que ce roi avait dans Iérusalem, mais non pas la
citadelle qu’il bâtit sur le mont Sion pour la défense de cette ville. La tour
qu’il y éleva, à laquelle il donna son nom, n’était pas moins admirable pour sa
beauté que pour sa force ; ce qui fait que l’époux des cantiques lui
compare le col de la chaste épouse : Turris David qua edificata est cum
propugnaculis, milie clypeipendent ex ea (Cant. 4).Piscine
de Bethsabée. La piscine dans
laquelle Bethsabée se lavait lorsque le roi la vit, était sous le château de
David au pié du mont Sion, du côté du couchant. Cette piscine a à peu près 200
pas de longueur sur 100 de largeur ou environ, et pas plus de 12 piez de
profondeur. On y descend par un escalier assez large, pratiqué dans le roc aussi
bien que toute la piscine, qui n’est fermée que d’un mur fait avec chaux et
sable aux endroits où la roche vive a manqué. Grotte
de s. Pierre. Descendant plus bas
de 100 pas ou environ, en côtoyant toujours les murailles de la cité, on trouve
vers le milieu du penchant de la montagne, qui est encore celle de Sion, une
grotte fort ouverte assez grande, mais peu enfoncée, dans laquelle on tient que
l’apôtre Pierre alla pleurer son péché. Ceux qui sont assez heureux pour entrer
dans cette grotte, le seraient bien plus encore, si l’exemple de s. Pierre
tirait de leurs yeux les larmes de pénitence, et qui n’y récite à ce dessein ce
psaume si capable d’exciter cette sainte amertume : Misere mei Deus (Ps. 50).
Source
: Relation historique d’un voyage p.429, Morison 1704 (chanoine de Bar le Duc et
chevalier du s. sépulcre)
Vision
de démon.Ce
qu’un démon chassé par Jésus a pu révéler. Arrivé à une lieue
de Béthanie, Jésus délivra un jeune homme possédé, dont les parents coururent
au-devant de Jésus au moment où il entra dans leur village. Il les suivit dans
la cour de leur maison où leur fils devint furieux à son approche, bondissant de
rage et escaladant les murs. Les gens voulaient se saisir de lui, mais ils ne le
purent, car sa fureur allait en croissant et il montrait ses dents à ceux qui
l’approchaient. Le seigneur ordonna à tous les assistants de sortir. Jésus
commanda au jeune homme de venir à lui, mais il ne vint pas et fut pris
d’affreuses contorsions. Il l’appela une seconde fois mais il refusa de venir
et le regardait dos tourné. Jésus leva les yeux au ciel et pria. Cette fois le
possédé vint se jeter à ses pieds. Jésus mit sur lui un pied, puis l’autre, et
fit cela deux fois comme s’il eut marché sur le corps du jeune homme, il sortit
alors de sa bouche un tourbillon de vapeur noire : dans cette vapeur j’aperçus
trois noeuds liés par un gros fil et d’autres, comme trois encensoirs superposés
laissant échapper des nuages de fumée qui s’assemblaient. Le jeune homme était
étendu sans mouvement aux pieds du seigneur. Jésus le bénit de la main comme du
signe de la croix, puis il étendit le bras vers lui avec ordre de se lever. Le
malheureux se leva très pâle et Jésus le rendit à ses parents en leur disant
qu’il le leur redemanderait : il leur dit de ne plus pécher contre leur fils,
car ils étaient coupables envers lui, ce qui l’avait fait tomber dans cet état.
J’eus lavision
du démon que le seigneur avait chassé. Dans les
trois noeuds noirs reliés ensemble, il me sembla voir comme l’ombre d’un homme
en mouvement, puis une forme humaine dont on distinguait les membres et
l’intérieur ; le coeur, le cerveau, et les autres organes avec leurs fonctions,
dont on perçait les pensées, les sentiments, et les actes. On aperçut le corps
et l’âme de cet homme, qui n’avait paru qu’une ombre, et les rapports qu’il
avait avec ses congénères. Dans ces trois noeuds aux teintes noires suspendus
dans l’air, plusieurs subdivisions formaient des ‘jardins’ où j’aperçus des
choses affreuses, avec de petites figures puis des hommes, dans une succession
de différents règnes de leur nature, jusqu’à ce que les ‘jardins’ aient formé
diverses sphères d’action ; à ce stade les trois noeuds étaient devenus un
monde sphérique. Des cercles lumineux s’opposaient à ces sphères ténébreuses, et
les séparaient. Malgré cela des hommes traversaient dans les sphères
ténébreuses, qui avaient l’apparence de mondes pleins de vitalité et d’hommes
dans les ténébreuses églises (assemblée, lieu de culte). Le
culte de ce démon se rendait dans la
plus
basse sphère de ténèbres sur l’autel en forme
de monticule avec un trou (cratère), où d’énormes bûches maintenaient un feu
sombre dont la fumée était dirigée sur terre ; les invocations au démon se
faisaient sur terre avec des offrandes en outrages, profanations, abominations
et toutes sortes d’infamies. On voyait bouillir des plantes avec d’autres choses
hideuses dont les gens s’enduisaient et se transportaient en différents endroits
pour rejoindre des congénères humains et s’adonner au péché ; des filets
rattachaient leurs âmes et l’un savait ce qui concernait l’autre. Dans ces
filets, des oiseaux noirs allaient et venaient pour établir des contacts et
transmettre des maladies aux humains et toutes espèces de mal. Ces gens de notre
temps venaient de tous les pays et dans notre pays : parmi eux beaucoup de
juifs de pays étrangers, en groupes peu nombreux, pratiquaient en secret leurs
folies, abominations et méchancetés, et autour de cette église infernale,
fornication, meurtre, abominations, et tous les actes des adorateurs du démon.
Tous ceux qui commettent ces péchés appartiennent à cette église maléfique sans
le savoir, incluant des relations non interdites par le commun. Il y avait des
personnes qui se frottaient d’onguents pour voir plus loin et participaient
ensuite aux péchés méprisables de la chair. Des nuages noirs
allaient entre les entraînés et les entraîneurs, leur ‘clairvoyance’ avait de
mauvais esprits pour guide et beaucoup de gens semblaient tomber du royaume de
lumière dans celui d’en dessous en prenant part à des opérations pour guérir des
malades ou par intérêt pour la science. Avec des succès trompeurs, les
entraîneurs s’efforçaient de séduire beaucoup de personnes du royaume de la
lumière en confondant les guérisons des ténèbres avec les surnaturelles, et la
clairvoyance infernale avec celle des saints. Des hommes importants
travaillaient pour le royaume de satan sans le savoir. Dans
l’autre sphère est une église où on
retrouvait des associations secrètes, non le démon en personne, où on ne
pratiquait pas son culte comme tel, ni de choses abominables faites
volontairement ou par malice, mais on s’occupait de sciences occultes en
cherchant à percer les secrets de la nature : on y faisait de l’or,
frappait la terre avec une baguette au bout dentelé, portant des amulettes ou
des anneaux gravés de lettres, on célébrait certaines cérémonies, tirait aux
cartes, conjurait la fièvre, guérissait par des moyens bizarres, et mille choses
destinées à contribuer au bien-être externe des humains. Mais il y avait au fond
le culte secret du démon : le désir de guérir sans renoncer au péché, source de mort et de maladies, le secours non demandé à Jésus et à son église
(assemblée) mais à la nature déchue. Ces guérisons en apparence étaient pleines
de dangers, comme un trou recouvert d’une feuille papier, qu’on ne voit pas.
Cette fausse église était cernée de gens occupés à entraîner, moins corrompus
que les autres, toutefois comme une école qui prépare aux plus grands crimes,
peuplée d’une multitude de gens, comme les laïcs relativement aux prêtres par
rapport à la sphère inférieure. Au lieu du culte diabolique, il y avait des
amours fous ou l’idolâtrie de la créature et de la nature, l’affection aveugle
des parents pour leurs enfants, les billets doux (poésie), la musique mondaine,
danses, boucles de cheveux (fétiche), anneaux, portraits d’amants. Ici on usait
de charmes pour inciter la passion, tandis que dans la sphère précédente se
préparaient les breuvages des avortements. Dans
la 3e sphère était l’église de
franc-maçonnerie et choses semblables où il était question de soit-disant
bienfait SANS Jésus
Christ, de lumières hors de la vraie lumière, de science sans Dieu, de bonne
chair, de vie commode. Les gens de cette sphère se croyaient au-dessus de ceux
des deux autres, pensant travailler contre eux alors qu’ils luttaient simplement
contre la religion et laissaient grandir les deux autres, ayant leurs racines
dans le même sol. Ces trois sphères étaient liées ensemble par de triples canaux
ou rayons qui les mettaient en relation. Ces gens ne
produisaient qu’erreurs, aveuglements, misères, et désespoirs ; leurs guérisons
étaient des palliatifs qui déplaçaient le mal en l’augmentant. Dans les deux
dernières sphères étaient de nombreux savants, des médecins et des pharmaciens.
Je vis des amis et gens de ma connaissance qu’une espèce de vertige poussait
vers les cercles ténébreux et je les ramenais en arrière.
Source
: Vie de Jésus Christ par Emmerich, tome 3 ou chap.55
Sermon
du prince des shéols. Le
prince de la mort (satan) au prince des shéols
: Apprête-toi à
prendre ce Jésus qui prétend être messie et fils de Dieu, ce n’est qu’un homme
qui craint la mort, qui a dit, mon âme est triste jusqu’à la mort. Il s’est
opposé à moi en plusieurs choses et beaucoup d’hommes que j’avais rendus
aveugles, boiteux, sourds, lépreux, que j’avais fait tourmenter de plusieurs
démons, il les a guéris d’une parole, et il t’a aussi arraché ceux que je
t’avais emmenés morts. Le
prince du shéol à satan : Qu’est ce prince si puissant
s’il craint la mort... Tous les puissants de la terre gardés ici sont soumis à
mon pouvoir quand tu les amènes soumis par ton pouvoir. Si tu es si puissant,
quel est ce Jésus qui craint la mort et s’oppose à toi ? S’il est si puissant
dans son humanité, en vérité je te le dis, il est tout puissant dans sa
divinité, et personne ne pourra résister à son pouvoir. S’il a dit craindre la
mort, il veut te tromper, malheur à toi dans les siècles éternels. Le
prince de la mort
: Pourquoi
hésites-tu, pourquoi redouter de prendre ce Jésus, mon adversaire et le tien ?
Je l’ai tenté et excité contre lui mes anciens du peuple juif, les animant de
colère et de haine. J’ai aiguisé la lance du persécuteur, mêlé du fiel au
vinaigre à donner à boire, j’ai fait préparer le bois pour le crucifier et des
clous pour percer ses mains et ses pieds. Sa fin est proche, je l’emmènerai
soumis, à moi et toi. Le
prince du shéol
: Tu dis que c’est
lui qui m’a arraché les morts : beaucoup que je retenais ici au purgatoire
m’ont été enlevés des morts (alors qu’ils étaient sur terre), non pas de leur
pouvoir, mais leur tout-puissant Dieu me les a arrachés par les prières divines.
Quel est donc ce Jésus qui m’a arraché les morts par sa parole ? C’est peut-être
lui qui sur l’ordre de ses paroles a rendu la vie à Lazare dont je détenais
(l’âme), mort depuis quatre jours, dans la puanteur et putréfaction.
Le
prince de la mort : C’est ce même Jésus.
Le
prince des shéols
: Je te conjure par
ton pouvoir et le mien, ne l’amène pas vers moi. J’ai tremblé après avoir
entendu la puissance de sa parole, j’ai été frappé de crainte ainsi que tous mes
ministres impies, troublés avec moi, car nous n’avons pas pu retenir ce Lazare
qui nous a échappé avec la vitesse et l’agilité de l’aigle. Lazare est sorti du
milieu de nous quand la terre même qui tenait son corps sans vie l’a sitôt remis
vivant. Et maintenant je sais que cet homme qui a accompli ces choses a
puissance dans le royaume du Dieu fort, et puissance dans l’humanité, il est le
rédempteur de la race humaine. Si tu l’amènes vers moi, tous ceux que je retiens
rigoureusement cloîtrés ici en prison, enchaînés aux liens non rompus de leurs
péchés, il les en dégagera par son humanité, et par sa divinité il les
conduira à la vie qui doit durer autant que l’éternité. Comme satan et le prince du shéol
parlaient alternativement, une voix semblable aux tonnerres et au son de
l’ouragan dit : Princes, enlevez vos portes, élevez-vous portes éternelles que
le roi de gloire entre. Le
prince du shéol à satan
: Sors de mes
demeures te battre contre le roi de gloire si tu es puissant combattant, qu’y
a-t-il de toi à lui... Le prince du shéol jeta satan hors de ses demeures et il
cria à ses ministres impies : Fermez cruellement les portes d’airain. Poussez
les verrous de fer. Résistez résolument, de peur que nous ne soyons réduits en
captivité, nous qui gardons les captifs. La multitude des saints au prince du
shéol : Ouvre tes portes et que le roi de gloire entre. Il se fit une voix
semblable aux tonnerres disant : Princes, enlevez vos portes. Élevez-vous
portes infernales que le roi de gloire entre, dirent-ils d’une seule voix.
Le
prince du shéol
: Quel est ce roi
de gloire ? dit-il comme s’il était dans l’ignorance après que cet appel se fit
entendre deux fois. David au prince du shéol : Je connais les paroles de cet
appel, ce sont les mêmes que j’ai prophétisées par l’inspiration de son Esprit.
Maintenant ce que j’ai déjà dit je le répète : le Seigneur fort et
puissant, le Seigneur puissant dans le combat, c’est Lui qui est le roi de
gloire. (Psaumes 24). Du ciel le Seigneur a regardé vers la
terre pour entendre le gémissement de ceux qui sont dans les fers afin de
délivrer les fils de ceux qui ont été mis à mort. (Psaumes 107.13). Maintenant immonde et
horrible prince du shéol, ouvre tes portes afin que le roi de gloire entre, dit
David au prince du shéol. Le Seigneur de majesté vint sous forme d’un homme
éclairer les ténèbres éternelles : il nous visita et brisa les liens qui
n’étaient pas rompus par le secours d’une vertu invincible, nous qui étions
assis dans les profondes ténèbres du péché, dans l’ombre de la mort du
péché. (Psaumes
107.14). À la lumière
éblouissante et au messie placé tout à coup dans leurs demeures, dans leur propre royaume, le prince du shéol et
le prince de la mort furent dans l’épouvante avec
leurs cruels ministres et crièrent : Tu nous as vaincus. Qui es-tu, toi que le
Seigneur envoie pour notre confusion ? Qui es-tu, toi que la corruption
n’atteint pas, dont l’effet dominateur de ta majesté a pu renverser notre
puissance ? Qui es-tu, toi si grand et si petit, si humble et si élevé, soldat
et général, combattant admirable sous l’aspect d’un esclave ? Roi de gloire,
mort et vivant, que la croix a porté et mis à mort, toi qui es demeuré mort
étendu au tombeau, qui es descendu vers nous vivant. Toutes les créatures ont
tremblé à ta mort, tous les astres ont été ébranlés, et maintenant tu es devenu
libre d’entre les morts et tu troubles nos légions. Qui es-tu, toi qui délies
les captifs et inondes d’une lumière éclatante ceux qui sont aveuglés dans les
ténèbres des péchés ? Les légions des démons furent frappées d’une même frayeur
et crièrent d’une seule voix avec crainte et soumission : D’où es-tu Jésus,
homme si puissant et splendide en majesté, si éclatant, sans tache et pur de
crime ? Ce monde terrestre qui nous a toujours été assujetti jusqu’à présent et
qui nous payait des tributs pour nos sombres utilités, ne nous a jamais envoyé
un mort tel que celui-ci et n’a jamais destiné de pareils présents aux enfers.
Qui es-tu, toi qui as ainsi franchi sans peur les frontières de nos domaines ?
Non seulement tu ne redoutes pas nos supplices, mais de plus tu tentes de
délivrer tous ceux que nous détenons dans les fers. Peut-être es-tu ce sauveur
duquel notre prince satan disait que par ta mort sur la croix tu recevrais une
puissance sans borne sur le monde entier. Par sa majesté, le roi de gloire écrasa la mort sous ses pieds. Il
saisit le pouvoir de satan et en priva le shéol, et il mit Adam sous la clarté
de sa lumière. Le
prince du shéol à satan
: O prince de
perdition, chef de destruction, dérision des anges de Dieu, ordure des justes,
qu’as-tu voulu faire ? Tu as voulu crucifier par la ruine et la mort le roi de
gloire duquel tu nous avais promis de si grandes dépouilles ? Ignores-tu comment
tu as agi dans ta folie ? Car voici que ce Jésus dissipe par l’éclat de sa
divinité toutes les ténèbres de la mort. Il a brisé les profondeurs des prisons
les plus solides, il délivre et relâche les captifs et ceux qui sont dans les
fers. Voici, tous ceux qui gémissaient sous nos tourments nous offensent et nous
sommes accablés de leurs imprécations. Les emprises de nos royaumes sont
vaincues, nous n’inspirons plus l’effroi à la race humaine, au contraire ils
nous menacent et nous outragent. Ceux qui sont morts n’avaient jamais pu montrer
de superbe devant nous, ni éprouver un instant d’allégresse durant leur
captivité. O satan, prince de tous les maux, père des impies et des rebelles,
qu’as-tu voulu faire ? Ceux qui désespéraient du salut et de la vie ne font plus
entendre de gémissement maintenant, aucune plainte ne résonne plus, et plus de
trace de larmes sur le visage d’aucun d’eux. O prince satan, possesseur des clés
des shéols, par le bois de la croix tu as perdu ces richesses que tu as acquises
par le bois de la trahison et par la perte du paradis. Toute ton allégresse a
disparu lorsque tu as attaché à la croix ce messie Jésus, roi de gloire. Tu as
agi contre toi et contre moi. Apprends quels tourments éternels et supplices
infinis tu dois souffrir sans fin sous ma garde. Prince de tous les mauvais,
auteur de la mort, source d’orgueil, tu aurais d’abord dû trouver un juste
reproche à faire contre ce Jésus, et vu que tu n’as trouvé en lui aucune raison
de faute, pourquoi as-tu osé le crucifier injustement et emmener dans notre
région l’innocent et le juste ? Tu as perdu les mauvais, les impies, et les
injustes du monde entier. Le
roi de gloire au prince du shéol: Le prince satan sera
sous ton pouvoir à perpétuité des siècles à la place de mes justes Adam et ses
fils.